masterkey(https://regardfc.1fr1.net/t343p100-france-culture-avant-et-maintenant#31293) a écrit: (...) Le désaccord, donc, c'est lui qui m'intéresse : sur la durée, je ne vous rejoins pas. Il y a bien des sujets qui ne se satisfont pas à mon avis de 55 minutes : tant de fois a-t-on entendu tel producteur presser ses invités car "l'heure tourne et nous voilà déjà à la fin de l'émission" (...)
Oui, cette phrase, où est intégré généralement un "malheureusement", est le fait de producteurs imprévoyants ou/et mal préparés. Je l'entends sur toutes les radios, depuis celles de Radio France jusqu'aux étrangères archivées dans les sous-forums BBC, SWR, RTS, RTBF. En général, les conducteurs d'entretien ont tourné autour du sujet, ne l'ont pas clairement cadré et ont laissé les invités digresser. Voyez comment
Vincent Charpentier serre ses émissions de 30 minutes. Oui, il lui faudrait 45 ou 55 minutes, mais qui voudrait écouter 90 minutes ? Vous, moi, oui, peut-être, mais je n'en suis pas convaincu. Pour reprendre la comparaison du train, personne ne prend plus les trains "lents" avec arrêts aux stations s'il y a un direct.
Vous me direz, il y a le format des "A voix nue", ou même celui des Chemins de la philo et de la Fabrique, qui segmentent un long sujet en 4 ou 5 fois 55 minutes. Mais c'est autre chose que d'avoir une discussion dont le fil n'est pas rompu pendant, par exemple, l'heure et demi de l'émission discutée.
Je ne crois pas. Les
À voix nue sont enregistrés en une seule fois et tranchés en cinq parties. La plupart des auditeurs de radio culturelle écoutent en différé (ce que sait la chaîne) et donc regroupent les cinq épisodes en une seule tranche de 2h.
Je ne suis pas sûr que, lisant le programme d'alors, une partie des auditeurs ne l'auront pas enregistrée sur cassette - 1972, c'est l'âge d'or du magnétophone - pour se la réécouter en tranches.
C'est vous qui êtes facétieux ! Qui enregistrait les émissions de FC sur mini-cassettes en 1972 ? 0,001 % des auditeurs ?
Mais écoute en tranche ou pas, ce format n'en reste pas moins précieux et manque aujourd'hui car on y rentre sans conteste dans plus de détails, on y est plus précis, on a sans doute aussi moins l'oeil sur la montre
Pas d'accord. Notamment parce que la tendance française à se complaire dans l'écoute de sa parole se voit encouragée lorsqu'on laisse la bride sur le cou à des bavards (ils sont nombreux).
Je reviens à un exemple :
Olivier Germain-Thomas conduisait des entretiens en profondeur en 55 minutes et actuellement les riches émissions de
Jean-Noël Jeanneney durent moins d'une heure, musiques et archives comprises.
Notez que ce n'est pas parce qu'une émission est courte qu'elle est supportable, cent exemples me viennent à l'esprit...
Peut-être bien que la technique actuelle, celle des podcasts qu'on peut lire et faire défiler d'un glissement de doigt, qu'on peut programmer en deux clics pour une extinction automatique et qui facilite grandement l'écoute séquencée, offre à ces longs formats la même seconde vie que ce que les appareils photo numériques avec leurs superbes capteurs et leurs fonctions de visée assistée offrent aux vieux objectifs manuels des années 70, leur permettant d'aller bien plus loin dans ce qu'ils peuvent offrir qu'à l'époque de leur conception.
Là, il faut pousser la réflexion : combien de personnes écoutaient France Culture dans les années 1960-1970 et même 1980 ? Qui pouvait se permettre de suivre une émission d'une heure, de deux heures, voire de trois heures en flux ? Qui ?
Et pourtant des programmes de qualité ont été fabriqués. Pour qui ? Pour nous. Consciemment ou non. Ces
Tournier de 1967 et ces
Monte-Cristo de 1980 auront eu beaucoup plus d'auditeurs aujourd'hui grâce à Internet.
Les directions de la chaîne et les producteurs auraient-ils dû se dire "à quoi bon, personne n'écoute" ? Au lieu de cela, ils ont fabriqué du patrimoine pour nous. Car ne nous leurrons pas, les auditeurs de radio culturelle fréquentent
les Nuits de Garbit plus que les Jours socio-politisés.
C'est une leçon pour les responsables de la radio actuelle : non, ce n'est pas la fréquentation maximale qui va de paire avec la médiocrité et la superficialité qu'il faut rechercher, mais la qualité, l'intemporel, afin de nourrir ce média de programmes à écouter dans une, deux ou trois générations.
Qui peut croire un seul instant que la majorité des émissions de jour soit réécoutable à l'avenir ? Personne. C'est de la radio jetable, du gaspillage de ressources et d'énergie (dont le but est l'endoctrinement soft, mais c'est une autre histoire).
Il ne faut pas cesser de remercier les créateurs de radio culturelle qui ont dépassé autrefois la notion de produit utilitaire (ah les promotions permanentes de FC actuellement !) pour faire de la radio valable 20, 30 ou 40 ans plus tard, voire plus.
Et de remercier
Philippe Garbit et son équipe de nous donner ces émissions.
Et de remercier l'actuelle direction de FC de conserver cet espace de qualité.