De votre stimulant billet je retiens en premier lieu que "sérieux" et "crédible" sont des hyperonymes chéris des forumeurs qui se soucient peut-être d'être crédibles et sérieux.
Sur la Grèce, je vous dirais que je ne sais pas trop quoi penser. Si j'écoute Pastré et Casanova je ne suis pas très convaincu, il faut dire que ça ne me semble pas toujours très clair, ou souvent incomplet. Je reste sur ma faim. Inversement si j'écoute ceux qui les contredisent, disons Lordon, Jorion ou Plihon, par réaction je me replie (un peu effrayé) vers les deux plus haut cités mais je reconnais que c'est par pur effet de répulsion ; que la hargne individuelle d'un Lordon et la coloration de pensée unique d'un Jorion, avec dans les deux cas un jeu de la formule qui voudrait faire mouche alors qu'ils avancent abrités dans un tank de préjugés, tout cela me pousse à ne pas les juger très "sérieux". Peut-être que mon critère est absurde, oui. Et tout en sachant que c'est risquer de s'affaiblir, que de reconnaitre ses doutes quand on se trouve face aux bourrins qui ne savent polémiquer qu'en martelant ou en méprisant (sur RFC on ne les lit guère mais dans le précédent forum je vous jure qu'il y en avait plus d'un), eh bien malgré tout je répète que les asséneurs et les ricaneurs ne me convainquent guère, quand je décèle dès le début, sous les ricanements et le mépris, une mono-orientation et un simplisme doctrinal. Sur ce tout dernier point, la critique vaut tout autant pour les chroniqueuses-passionaria du matin, ce qui me permet de recoller au sujet qui a ici tendance à se fractionner : le paradigme idéologique qui, selon moi, domine à France Culture ; et un autre paradigme, tout aussi facile à identifier, qui dominerait en dehors de France Culture.
En premier lieu, je ne crois pas que cette orientation au libre-jeu de l'économie, orientation que vous décrivez comme une orthodoxie dominante, soit si dominante que ça : certes, elle semble faire la loi dans l'économie instituée et peut-être dans l'économie pratique. Mais au plan intellectuel et idéologique, elle ne domine que le camp actuellement au pouvoir, donc plus pour longtemps, et ce camp n'est pas toute la classe politique. Je pense qu'elle ne domine pas du tout dans les médias. Je crois aussi que cette orthodoxie n'est pas si unifiée que ça, alors que l'éconophobie primaire, elle, me semble beaucoup plus compacte et facile à étiqueter. Et c'est pas parce que le NPA se ramasse comme une merde, qu'en matière d'économie les idées simples reculent.
En second lieu, ce paradigme que vous dites "très bien représenté" sur FC, me semble à moi y être très largement écrasé, par les heures de reportages étiquetés documentaires, ainsi que par l'orientation globale de la Rédaction qui propose reportages et dossiers. On pourrait déjà faire les comptes à partir des chroniques du matin : Meyer y est le plus souvent dépolitisé. Clarini compense Adler. Slama n'y est pas tous les jours aussi idéologique qu'on le dit, et les passionaria de 8h45 doivent ramener le fléau bien près de l'équilibre.
Vous voyez peut-être où je veux en venir : faut-il compter les points ? Eh bien je pense que oui, il faut les compter. Ça fait 12 ans que je propose de le faire, et ça fait 12 ans que je n'y arrive pas, parce que c'est un gros chantier et parce qu'on préfère jouer à d'autres jeux dans les associations groupusculaires d'auditeurs (où on sait un peu compter mais pas du tout écrire et encore moins penser) comme dans les forums où l'engueulade recouvre immédiatement la réflexion. Mais ici sur RFC où on ne s'engueule jamais, on pourrait se lancer dans ce chantier. Ça nous ferait un petit TP sympa, non ?
Cela dit, j'ai peur, aussi, qu'il ne nous mène dans une double impasse, je m'explique :
a) je vois venir de loin un résultat mi chèvre mi-chou, avec des discussions interminables sur la coloration idéologique de toute une série d'émissions comme Fabrique de l'histoire, Fabrique de l'humain, Cultures clémentes, Concordance des temps, et même For Intérieur mais aussi Répliques et puis aussi la production créative avec l'ACR et le département Fiction, si on veut. Ça fait beaucoup ? Oui, mais il faudrait aller jusqu'au bout ...
b) il y a sur FC un alibi de pluralisme, et indépendamment de la couleur résultante ce pluralisme s'exerce dans la quantité. Ça se fait encore et toujours au détriment de la culture dans le programme. Or là devrait être la question principale. Mais enfin, puisque j'ai ouvert ce fil, c'est que je crois kamème que cette question de l'orientation idéologique a aussi son importance.