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Sur le blog de Jean Lebrun, on a pu lire en commentaire un reproche fait à la rédaction de FC, d’ouvrir chaque dimanche le micro à un propos moins journalistique qu’idéologique. Ce reproche, relayé par nous
ici, a été suivi d’un reproche symétrique d’offrir au Figaro une tribune sur FC. Je ne relaye pas la suite du débat, qui promet de s’envenimer si le second ne se calme pas. Mais comme la critique est récurrente (cf post précédent), il m’a semblé qu’un non-lecteur du Figaro pouvait essayer d’y répondre :
A lire la critique radicale et politisée contre France Culture, on dirait que la matinale est vendue au Figaro, comme jadis on disait que toute la chaine était devenue un agent de la mondialisation néo-libérale. C’est un peu court, de résumer la présence de deux chroniqueurs d’un journal, à une tribune accordée à ce journal. Et encore plus court d’en déduire un déséquilibre. C’est même le contraire, et là est le drame de cette radio : un bilan rigoureux de la présence des chroniqueurs de la matinale devrait tenir compte de la sensibilité politique des autres chroniqueurs. Ensuite de quoi on en viendrait à sortir une fois de plus sa calculette pour déterminer si –au vu des matins- FC penche à droite ou à gauche. Ensuite de quoi on se rendrait peut-être compte que la direction de FC s’efforce (et pas seulement le matin, mais en général) de donner approximativement la parole en quantité égale aux deux camps, précisément par souci d’éviter l’accusation de préférence pour l’un ou l’autre. Le résultat est à l’inverse de l’objectif : nombre d’auditeurs l’accusent de favoriser l’autre camp que le sien. Il reste une troisième catégorie d’auditeurs, ceux qui ne se sentent ni de droite ni de gauche (ne vous en déplaise, ce ne sont pas des débiles mentaux pour autant), et qui trouveront plutôt que cette radio qui se dit (se croit ?) culturelle donne trop de place aux prises de position idéologiques et à la politique. De même, d’ailleurs, que les discussions sur les programmes selon la même règle de contamination des conversations, maladie endémique en France.
Passons à ces deux chroniqueurs que les militants aiment fusiller : Alain-Gérard Slama et Alexandre Adler. En premier lieu, leur profil journalistique et politique est assez différent, de même que leurs états de service en tant qu’essayistes. Résumer ces profils et ces personnes par une appartenance à un journal, et le même en plus, c’est commettre une erreur de raisonnement à la fois courante et funeste. Et il ne s’agit pas seulement d’amalgame : c’est tout simplement remplacer le jugement individuel par le jugement catégoriel, or nous savons que c’est là le fondement du racisme. Je ne dis pas que vous l’êtes, mais je dis que le point de vue que vous présentez y conduit. Merci de saisir et de respecter cette nuance.
A titre d’exemple qui vaudrait démonstration , dira-t-on que Jean-Claude Casanova, parce qu’il est éditorialiste associé au Monde, est un homme de gauche ? Je ne pose pas la question pour recevoir une réponse, mais pour attirer l’attention sur ce qu’il y a de simplificateur et de stérile dans le jugement automatique d’appartenance, surtout s’il sert de prétexte au procès idéologique ou moral.
Pour parler un tout petit peu plus précisément des chroniqueurs de la matinale, en commençant par Adler : on peut n’avoir rien à redire à sa chronique sans pour autant la soutenir par défaut (cette accusation récurrente qu’on nous fait n’apporte rien au débat) … parce qu’on ne l’entend pas. Pour ma part, je l’évite soigneusement. Quand j’écoute les Matins c’est presque toujours en différé ; je passe par-dessus le Journal et la chronique Adler, pour reprendre directement au retour de l’invité. C’est qu’à 8h je préfère écouter les infos de la radio Suisse Espace2, moins dramatisantes, moins sensationnelles, moins répétitives que celles de la rédaction de FC. D’ailleurs je prends mon élan au moment de la chronique Duhamel, que je zappe assez aisément quand elle me semble lourdement rhétorique (souvent) ou engagée à l’excès (presque toujours). Quant à la chronique de Slama, elle est la seule de toute la matinale à porter toujours sur le sujet de l’émission, et donc se trouve bien mieux à sa place entre la parole de l’invité et le débat. Et la personne qui parle chaque jour un peu avant 8h30, c’est M. Slama, c’est pas le directeur du Figaro, ni un think-tank imaginaire nommé « Figaro ». C’est Slama, avec ses qualités et ses défauts, avec sa culture et son expérience, avec ses caractéristiques propres de polémiste et d’essayiste. Et ne vous en déplaise, on peut juger que ses analyses sont à la fois plus profondes et mieux construites que celles, disons, de Duhamel, et pour ces raisons les juger plus enrichissantes pour la pensée, cela sans avoir soi-même jamais voté à droite…. Maintenant, s’il faut approfondir et justifier, alors il faudrait partir de quelque chose d’un peu solide, c’est à dire des chroniques elles-mêmes, plutôt que des éternels jugements dans le vide. Et si le blog de Jean Lebrun n’a pas été fait pour ça, autant ouvrir le débat ici, sur RFC, par exemple dans un fil consacré à Duhamel, Adler & Slama, ou bien dans
le fil des Matins (mais ça serait dommage peut-être) pourquoi pas dans ce même fil, à la suite de ce post...
A chacun de voir ...