Dans l'analyse fouillée d'émissions consacrées au silence,
Répliques et Hors-champs,
Jean-Luuc(https://regardfc.1fr1.net/t781-du-silence-a-la-radio#27029) a écrit: (...) Reste une question : Pourquoi Alain Corbin rit-il régulièrement au milieu de ses réponses ? [son mp3="http://media.radiofrance-podcast.net/podcast09/13397-17.09.2016-ITEMA_21078807-0.mp3" debut="39:00" fin="39:19"]
(...)
Je me pose cette également cette question depuis que j'écoute Alain Corbin. Il n'y a pas de raison à ce gloussement au milieu ou à la fin de chacune de ses phrases hormis l'acquisition d'un tic d'expression et sans doute aussi l'âge.
Les 7 et 14 septembre, Pascale Tison était au domicile de l'historien à la parole si convoitée pour une fois encore lui demander d'évoquer ce qu'il a écrit dans "Histoire du silence" (à l'origine de notre fil créé le 9 août dernier
Du silence à la radio). On n'est pas loin d'une dizaine d'émissions où Alain Corbin a été invité,
Répliques étant la dernière à ce jour.
Pascale Tison a donc consacré deux numéros de
Par Ouï-Dire à l'historien. Deux émissions qui ne sont pas seulement des entretiens, mais comprennent lectures et pièces musicales. Du beau travail de réalisation.
Le premier numéro du 7 septembre présente beaucoup de qualités*. On y trouve (ah nostalgie) "Sounds of silence" de Simon and Garfunkel**, (précédé de l'évocation de la minute de silence par l'historien rieur à 28'14''). Pour entendre résonner des cloches, écouter jusqu'à 32'40.
À propos de cloches (et pas de cloche), Pascale Tison dit, imprudemment à mon avis, "C'est beau les cloches" et avec Corbin se moque des gens incommodés par les cloches d'églises. Il faut ne pas avoir habité près d'un clocher pour traiter les plaignants d'intolérants. Voir les derniers "faits divers" à ce sujet, dont l'un a très mal fini.
Autre question, il est un peu facile et pour tout dire hors-sujet de dire que l'on ne peut plus faire silence devant un tableau "comme au XVIIe siècle". Corbin doit savoir qu'il n'y avait pas de musées à cette époque et que les personnes regardant un Rembrandt chez un particulier n'avaient pas le même "profil" que ceux parcourant un musée de nos jours.
L'évocation de Rembrandt est d'ailleurs l'occasion d'une belle réflexion sur le tableau "Le retour de l'enfant prodigue".
Je recommande très vivement la fin de l'émission à partir de 43'21, Pascale Tison y lit un texte de Maeterlinck après que Corbin a évoqué les poètes symbolistes (Rodenbach, par exemple). Dommage que comme sa collègue Axelle Thiry de l'émission
À portée de mots, elle croie devoir détimbrer sa voix pour faire "poëtique" et sensible.
La seconde émission du 14 septembre est l'occasion de lectures extensives, qui se veulent inspirées, de Sylvain Tesson et de Pascal Quignard. Pour ceux qui apprécient ces deux écriveurs.
*
C'est un historien particulier, sensible au détail, au goût et aux odeurs de la vie. Après un superbe essai sur l'odeur (« Le miasme et la jonquille ») sur le son (Les cloches de la terre), Alain Corbin revient sur le silence cher à son enfance quand il allait pêcher et contemplait la rivière. Condition du recueillement, de la rêverie, de l'oraison, le silence est le lieu intime d'où la parole émerge. Les moines ont imaginé mille techniques pour l'exalter, jusqu'aux chartreux qui vivent sans parler. Philosophes et romanciers ont dit combien la nature et le monde ne sont pas distraction vaine. Une rupture s'est produite, pourtant, aux confins des années 1950, et le silence a perdu sa valeur éducative. L'hypermédiatisation du XXIe siècle nous contraint à être partie du tout plutôt que de se tenir à l'écoute de soi. Une invitation à la méditation. En deux parties.
Pascale Tison** Chanson diffusée, probablement de manière involontaire, à contre-emploi puisque les paroles (1964) expriment un point de vue liant le silence à un cancer : "
No one dare / Disturb the sound of silence/“Fools” said I, “You do not know/ Silence like a cancer grows". Et "The neon god" qui rend silencieux les gens que voit le passant de la nuit est sans doute la télévision : "
And the people bowed and prayed/ To the neon god they made". Ce qui rappelle la nouvelle de Ray Bradbury,
The Pedestrian (1951).
"The Sound Of Silence"Hello darkness, my old friend
I've come to talk with you again
Because a vision softly creeping
Left its seeds while I was sleeping
And the vision that was planted in my brain
Still remains
Within the sound of silence
In restless dreams I walked alone
Narrow streets of cobblestone
‘Neath the halo of a streetlamp
I turned my collar to the cold and damp
When my eyes were stabbed by the flash of a neon light
That split the night
And touched the sound of silence
And in the naked light I saw
Ten thousand people, maybe more
People talking without speaking
People hearing without listening
People writing songs that voices never share
No one dare
Disturb the sound of silence
“Fools” said I, “You do not know
Silence like a cancer grows
Hear my words that I might teach you
Take my arms that I might reach you”
But my words like silent raindrops fell
And echoed in the wells of silence
And the people bowed and prayed
To the neon god they made
And the sign flashed out its warning
In the words that it was forming
And the sign said “The words of the prophets
Are written on the subway walls
And tenement halls
And whispered in the sounds of silence”