Au volant : Christine Goémé
Date et heure de l'accident : la nuit dernière, 4h07.
Fréquence : en moyenne une fois par nuit
Type du véhicule : outre d'emphase gonflée à la pompe à main
<< On sait finalement peu de chôses d'André Gide. On sait qu'il fut un immense romancier couronné d'ailleurs par le prix Nobelle (sic). On sait qu'il était protestant, et... homosexuel. Mais, on ignore très souvent la surprenante précocité de son intelligence brillante et tourmentée, et les rencontres qui l'ont nourrie. Très tôt -il avait 18 ans- il se lia d'amitié avec d'immenses zécrivains : Pierre Louÿs, puis Barrès, Mallarmé, Valéry, Oscar Wilde ensuite. Et plus tard Francis Djèmz . Et des peintres, Maurice Denis entre autres, avec lequel il fit un livre. On ignore également son courage, l'audace de son retour de l'URSS ou encore sa préface au Tableau de la littérature française datant de 1939. Et (respire) l'on sous-estime sa générosité : fondateur de la Nouvelle Revue Française, il ne cessa de découvrir et d'aider de jeunes auteurs encore inconnus. Il fut un mmerveilleux révélateur de talents, hors des sentiers battus. Les 3 entretiens de la série avec Jean Amrouche datent de 1949. Gide avait alors... 80 ans. >>
Ce qui est formidable dans les présentations de Christine Goémé, c'est l'absence quasi-totale de pertinence, et la surcharge d'ornements superflus. Par ornement, je ne vise pas tant la boursouflure du ton, bien plutôt les formules de la famille wikipédiale : "est considéré comme" ou "est connu pour" dont Titine raffole, et qu'elle remplace ici par un "on ignore que", ce qui constitue en soi tout de même une petite nouveauté, il faut l'admettre admettons-le je l'admets. Mais ça reste tout aussi inepte.
Alors la pertinence ? Eh bien en premier lieu on se demande à quoi rime ce fatras. Quel rapport avec les entretiens qu'on va entendre ? Encore ça mettrait l'auditeur dans l'ambiance, que ça servirait à quelque chose. Mais Goémé parvient à faire encore plus démodé que le style oral de Jean Amrouche (ce qui n'est pas peu dire).
Et les âneries ? Alors là pardon, mais on n'est pas volés sur la marchandise :
- "On sait peu de chôôses" : on sait au contraire énormément de choses, et l'homme de culture moyenne sait plus de chauses que cette présentation bâclée n'en contient.
- Romancier nobélisé ? Certainement pas.
- La précocité de son intelligence brillante et tourmentée : "Si le grain ne meurt", auto-biographie et auto-analyse, nous en dit assez là-dessus. C'est même, comme un trait initial de la personnalité, un des aspects les plus aisés à mettre en relief dans l'enseignement et dans les manuels scolaires. Ma remarque vaut pour la première partie du livre quant à la seconde elle sera bientôt obligatoire par décret.
- J'arrête là pour les "on ignore" car "on" n'ignore rien de tout ces éléments qui forment le squelette du résumé biographique, d'ailleurs Goémé ne fait pas autre chose. La formule est de trop.
- "et les rencontres qui l'ont nourrie" : oui et non car c'est absurde. Il est peu douteux que l'intelligence essentielle de Gide n'a pu connaître qu'expansion et que ses rencontres y ont participé. Mais en soi, elle leur est bien antérieure aussi la meilleure cheville ici serait "avant" : "surprenante précocité de son intelligence, avant même les rencontres qui allaient la nourrir"
- "Francis Djèmz" : ça c'est la ridicule prononciation erronée pour Francis Jammes (on dit Jam' et même Jamm' ). Titine nous le fait à chaque fois c'est comme Laure Adler qui croit qu'elle appelle Handke par son prénom quand elle lui donne du "Piteur..".
- "avec lequel il fit un livre". Voila qui est fort précis et renseigné. Dommage que ça ne fasse pas le point de capiton avec une phrase du début, dans le même genre comme par exemple je sais pas, moi : "Pendant son enfaaance, il lut de nombreux liivres" (typiquement Goémesque).
- "l'audace de son retour de l'URSS" : a-t-il été audacieux pour lui de revenir ? Ou bien de dire ce qu'il avait vu et compris ? Et pourquoi Christine Goémé qui continue à militer pour le collectivisme égalitaire y voit-elle audace plutôt que trahison ? Et si la position de Gide est juste, pourquoi Christine Goémé fait-elle tout l'inverse à prêcher le marxisme chaque fois qu'elle en a l'occasion ?
- "de jeunes auteurs encore inconnus" : dommage de ne pas en citer quelques uns. Pourquoi rester dans le vague ? Pourquoi citer les gloires confirmées et non les révélations ? Est-ce que par hasard au moment de torcher ce billet la rédacteurE avait égaré le portable qui lui sert à pêcher un peu d'info dans la wiki ? Ou bien la page Gide est-elle trop abondante pour la lecture au téléphone (impossible voyons : on sait si peu de choses sur Gide)
- "hors des sentiers battus" : cette formule est elle-même un des sentiers les plus battus qui soient.
- "Gide avait alors 80 ans" : ici, ça se clôt dans un silence de cathédrale, aussi grandiloquent que la dernière phrase était banale. La réunion des deux sonne à la façon des ponctuations de Jacques Pessis : à côté de la plaque.
Il aurait été plus simple et mieux avisé d'introduire les entretiens (au nombre ni de 2 ni de 3 mais de 4), de dire quels en étaient les sujets, et d'ajouter éventuellement un point de contexte : Dreyfus, Barrès, Paludes, c'était pas du luxe. Pourquoi s'en tenir au généralités et au creux ? Tel est le mystère Goémé, et sa nouvelle consoeur Pénaranda ne fait pas mieux. On regrette Marc Floriot et Lydia Ben Ytzhack.
Et pour ceux qui veulent risquer l'accident de ceinture ou le renvoi de tartine, le doc est disponible ici : https://www.mediafire.com/?zsg8kc9ssz23mem
Dernière édition par Nessie le Dim 11 Mai 2014, 23:22, édité 2 fois