France Curture communique pour défendre le théââââtre et la fiction.Déjà, chapeau bas pour avoir débauché Jean-Claude Biette, qui fut critique aux
Cahiers du cinéma, mais aussi un peu cinéaste, avant de décéder en 2003. Le faire revenir d’entre les morts, juste pour écrire un machin promotionnel de quelques lignes pour France Cultureuh, c’est déjà un exploit. Sera-t-il homologué comme miracle officiel par le Vatican ?
Laissons en suspens cette question pleine d’interrogations pour passer au communiqué promo.
« la chaîne ne cesse de renforcer son engagement pour le spectacle vivant »Reste à préciser que c’est plutôt sur les débats d’actu que l’engagement est le plus profondément renforcé, et que pour le théâtre, le renforcement consiste surtout en des intervious promo. Mais
« engagement pour le spectacle vivant », ça sonne mieux, ça cache mieux la misère.
Les invités promo de cette semaine spéciâââle sont toujours les mêmes - je passe les noms - ils nous diront que les temps sont durs, que nous vivons une époque difficultueuse.
En dehors de ''ça'', un débat d’actu :
« Existe-t-il encore un théâtre populaire ? »Ça sent le moulinage de vents. La question sous-entend lourdement que non, pas trop. Invité : Olivier Py, qui est au théâtre populaire ce qu’une girafe est à un soutien-gorge.
Pour réflexionner, des directriceteurs de théâtre, et en guise de création radio, une redif’ de 2007 d’un feuilleton sur le Festiv’ d’Av’, mais pas en entier c’est trop long, faut laisser de la place aux débats d’actu.
Et le tout donne un communiqué fracassant. A partir de deux/trois émissions sur le sujet, la direction AJT vend une semaine spéciale de quatre jours.
Oui parce que j’ai terminé d’en faire le tour.
Mais il y a après un rappel de tout le bien que fait la station au théâââtre.
Un bilan. Donc des chiffres.
Et avant, ceci :
« France Culture poursuit sa politique de soutien à la création sous toutes ses formes et contribue à la transmission de la culture patrimoniale à travers des cycles dédiés à de grands auteurs classiques ou contemporains. »Si l’on prend les programmes de toute l’année 2020 (on peut remonter un peu dans le temps aussi, c'est pareil), et nous en arrivons presque au bout quand même, de cette belle année, ce n’est pas exactement ce qui frappe dans la programmation.
« sous toutes ses formes » = essentiellement des lectures de textes, en mode fin du monde.
Exemple, sur la page d’accueil, mais en bas parce que c’est la fiction et pas du débat d’actu, la fiction est représentée essentiellement par des redif’ :
- Tchernobyl
- Alejandra Pizarnik :
« Ecrire c’est donner un sens à la souffrance... »- un hommage à Michael Lonsdale avec un panaché d’extraits d’œuvres radio que la station service n’a pas le temps de diffuser en entier, débats d’actu obligent.
-
« 7 minutes-comité d’usine » : « Dix femmes attendent la porte-parole qui négocie leur avenir avec les repreneurs de l’usine. Elles devront voter au nom des 200 ouvrières qu’elles représentent.... »
Alors l’expression « sous toutes ses formes », on peut légèrement la modérer. Il est étrange que là, nous n’ayons pas quelques précisions sur les différentes formes.
Et les grands auteurs classiques, c’est de la diffusion au compte-goutte, pour pas faire d'ombrage aux grands classiques des débats d'actu.
La seule dramatique radio vraiment originale a été outrageusement planquée sous le tapis, même pas présente sur la page d’accueil :
« Les palmes » de François Pérache.
Comme le bilan est très maigre, il convient, afin de faire croire que quand même c’est une station culturelle, de gonfler le bilan aux hormones.
Les chiffres :
« En 2019, France Culture a fait 63 acquisitions d’œuvres dramatiques inédites. » Si l’on sait qu’une année comprend 365 jours, voire un de plus, ça fait en fait pas bezef.
De plus, quelles sont ces œuvres ? Gageons que les trois quarts seront à la gloire d’une refonte de ce monde pourri de merde qui nous entoure, et que ces fictions offriront un panorama sous toutes ses formes d’un paysage mental se préparant à une fin du monde prochaine.
« Le confinement et Un Rêve d’Avignon ont été l’occasion de rediffusions exceptionnelles d’environ trente œuvres théâtrales représentant quelque soixante heures sur l’antenne de France Culture. »Si l’on met à part leur diversité de formes qui tend vers l’unicité, c’est mathématiquement la misère, surtout comparé aux débats d’actu et autres émissions promo, qui se chiffrent en milliers d’heures.
Pour un bon relai dans la presse de cette annonce posthume de J-C Biette, un bon partenariat est de mise avec un hebdo branchouille du type les Inrocks, qui se feront un plaisir de relayer la Voix Officielle de la Ligne Générale.
Dans la foulée,
un autre communiqué annonce une création radiophonique à tomber : un feuilleton de 5 épisodes,
« Les bijoux de la Castafiore ». Une aventure de Tintin par les comédiens tristes de la Comédie Française.
Les précédentes aventures,
Les Cigares du Pharaon (2016),
Le Lotus bleu (2016),
Les 7 Boules de cristal (2017) et
Le Temple du Soleil (2019), étaient soigneusement réalisées, mais vraiment ternes. La fidélité aux albums, que quasiment tout le monde connaît par cœur, posait problème. Quel était alors l’intérêt de l’adaptation, à part la quête d’audimamate ?
Mais la station service culture a un argument de poids : le nombre de réécoutes.
Un seul petit paragraphe promeut la qualité radiophonique de la chose :
« Avec cette nouvelle version de Tintin, France Culture a le plaisir de renouveler la forme traditionnelle du feuilleton radiophonique, en l’amenant, par son scénario, du côté du cinéma, en le modernisant tout en s’appuyant sur ce magnifique alliage des acteurs, de la musique et du bruitage pour servir des héros ancrés dans notre patrimoine culturel. »Une magnifique manière de réinventer le fil à couper le beurre. Une dramatique radio = acteurs + musique + bruitage. Extraordinaire ! C’est ainsi depuis belle lurette, mais là, cela devient
« un magnifique alliage » !
Quel renouvellement.
Le service pub a fait fort : c’est un gros pâté de contradictions. Moderne & patrimonial, chapeau !
Par contre, on se demande comment on peut renouveler la forme en piquant du côté du cinéma. La contradiction, là, n’est pas résolue dans l’harmonie et la joie.
Il existe, disponible sur le site de l’INA,
une autre version des
« Bijoux de la Castafiore » de 1963 avec des acteurs déchaînés mais pas de la Comédie Française, des bruitages et de la musique, un truc complètement dingue !
L’INA a compilé les 34 épisodes de 10 mn en une grande dramatique de 4h.
Une comparaison entre les précédentes aventures de Tintin avec la Comédie Française et celles adaptées par Nicole Strauss et Jacques Langeais à la fin des années 50/début des années 60 donne un gros avantage à ces derniers, qui ont adapté dans la même veine toutes les aventures de Tintin écrites alors.
Mais pour faire oublier qu’il existe mieux, et à défaut de faire autre chose de plus créatif & original, aucune dramatique radio « patrimoniale » n’a été (re)diffusée dans les Nuits depuis septembre.
Les nouveaux auditeurs doivent impérativement croire que ce que propose le plan quinquennal de la direction est extraordinairement révolutionnaire, que l’histoire de la radio commence en 2015, et qu’avant c’était de la bouillie inaudible pour intellos.