En deuxième partie de cette Grande Traversée réduite à 2heures en 2014, alors là c'est vraiment affreux ce qu'on entend. On est subitement renvoyé aux heures les plus sombres de l'ère Laure Adler, du temps où le samedi, "Cinéma l'après-midi" nous offrait un dialogue débraillé, ponctué de rires cons et essentiellement composé de propos erratiques, incomplets, inachevés mais surtout parsemés de chaipas, de 'fin, de voila et de koi. Nathalie Richard a des choses à dire, certes (enfin quelques unes) le dommage est qu'elle a du mal à faire plus que lâcher un bout d'idée (par exemple : un comédien c'est un corps, un corps puissant) elle ne sait plus que le délayer au fil de 3 ou 4 répétitions et d'exemples qui font sourire ("Julien Carette, c'est un corps" atassion les amis, ne pas rire). Résultat : on ne posera pas un orteil plus loin dans l'analyse. Quand l'atmosphère devient vraiment trop étouffante autour de la table, parce que ça tourne en rond et que ça ne dit rien, un des intervenants se dévoue et lâche un trait d'esprit qui permet à la tension de se libérer comme dans une percée d'orage en l'occurrence éclate un grand rire collectif qui rappelle l'ambiance de la télé dans ces émissions qui se voudraient bidonnantes mais qui sont surtout à moitié bidonnées à force d'être montées-charcutées. Ces émissions fidèles au modèle Ruquier où personne n'a rien à dire et ou tous les invités rigolent comme des veaux devant un public d'amis invités se divertit fort sous l'oeil consterné du téléspectateur qui attend l'une ou l'autre séquence, l'un ou l'autre invité, et se demande combien de temps il peut tenir le coup.
Ainsi l'on perçoit une fois de plus la désastreuse influence qu'exerce sur France Culture l'ambiance des émission de plateau à la télé. Alors qu'on devrait parler cinéma, on rigole en groupe surtout quand rien n'a été dit. Le résultat est désastreux : l'auditeur cherche en vain la justification du titre de l'émission, et aussi du drapeau de la chaîne : où est la culture dans ces rires gras de l'entre-soi ?
C'est d'autant plus affreux et dommage, en premier lieu parce que ça n'est pas du direct mais du direct enregistré, puisqu'on en a entendu des extraits en début de matinale. Ca veut dire que l'émission a été réécoutée, peut-être un peu raccourcie ou légèrement nettoyée, et qu'en fin de compte la chose a été jugée diffusable. Eh bien voila qui en dit long sur le niveau d'exigence du côté de la production, hein. Ensuite parce que sur les 3 invités+le producteur, il y avait tout de même deux personnes qui pouvaient s'exprimer autrement que comme des ados attardés. Le mystère étant d'ailleurs que ce soit la comédienne qui se montre incapable de produire une seule phrase complète. Avec un effort de maintien, avec une préparation je sais pas moi peut-être quelques consignes avant le top départ ou bien avec un temps d'échauffement, il y avait là le potentiel permettant de produire pour à peine plus cher un débat passionnant et de meilleur maintien : l'acteur chez Resnais. D'ailleurs il n'y a pas que la préparation collective : on se demande quelle préparation individuelle a permis ce brouillon radiophonique. Du côté de Charles Tesson, il n'y a pas de doute que le sujet était bien maîtrisé. Du côté Guillot, pas de doute non plus qu'il y avait un pré-bâti sous forme de fiche carton à moins que ce ne soit 3 items sous forme de mots-clés griffonnés sur un ticket de cinéma .
A mon sens, s'il fallait désigner un coupable à une imaginaire vindicte d'auditeurs, le fautif idéal et parfait c'est ici le producteur. J'ai bien dit le producteur et non le comptable. Car ça n'aurait pas couté plus cher de produire 2h de radio réussie. En première partie la rediffusion d'un entretien, c'est de bonne guerre dans un programme d'été. On n'avait pas besoin de la parsemer du condiment qu'était ce rappel Guillot, qui cassait l'écoute et faisait tache sur l'ensemble. Ensuite il y a la deuxième partie et là le même Guillot est peut-être déjà intoxiqué par la télé, comme le sont Laporte et Goumarre. L'ambiance de son débat colle à l'ambiance-type de la télé . Et c'est ainsi que de la télé de merdre, on passe naturellement à la radio de merdre.
France Culture ou "Comment saboter les meilleurs sujets" : il suffit d'imiter la télé.