Yann Sancatorze a écrit:Quiconque a la malchance, par exemple de passer de l'écoute du "Sur la route" d'aujourd'hui ("Sur la route... d’une zone commerciale XXL, dans les Bouches-du-Rhône") à Tout un Monde ("Le goût de la guerre, Jeter un éclairage cru sur cette "libido virile" et sur les actuelles "mutations radicales de la violence" à l'échelle de la planète toute entière, permettra-t-il des les éradiquer, ou a minima de les canaliser?") n'a plus envie de se laisser prendre à l'écoute de France Culture en direct. C'est un long tunnel de militance pénible et soporifique.
J'ai eu cette infortune, mais mon opinion diffère de la vôtre.
Je concède que les thématiques abordées dans ces émissions n'étaient pas vraiment culturelles. Encore que dans le cas de la seconde, au sujet d'un livre récemment publié, on puisse considérer qu'il s'agissait d'actualité culturelle ? Disons que je reconnais que ces thématiques étaient dans la lignée des obsessions de France Culture telles qu'elles ont justement été soulignées maintes fois ici.
Cependant, ces deux émissions ont laissé entendre des discours qui tranchaient avec ceux des producteurs.
Je ne nie pas qu'en apprenant que Julie Gacon consacrait son émission hebdomadaire à la première grande zone commerciale de France, au sens chronologique, je m'attendais à un festival de bien-pensance altermondialiste, mais cette édition de
Sur la route n'a pas comme ce fut le cas donné à entendre la vulgate antilibérale comme ce fut le cas lors de l'émission consacrée à Montpellier, il me semble. L'entrevue avec l'éleveur bovin en fin d'émission m'a parue culcul la praline à souhait, mais les autres intervenants étaient : l'un des fondateurs de l'affaire (archétype de l'homme d'affaires pied-noir), son fils, le président de l'association des commerçants, et un urbaniste confessant être fasciné par l'endroit malgré ses a priori défavorables.
Je n'en ferai pas mon émission de l'année, mais je veux dire que j'ai été surpris de l'absence de biais dans le traitement du sujet auquel je m'étais attendu pour avoir écouté d'autres émissions de cette productrice. Je suis néanmoins d'accord pour dire que ce n'était pas un grand moment de radio.
Cependant, l'émission de
Tout un monde du même jour me paraît valoir l'écoute. Les citations que vous en tirez proviennent, je suppose, du descriptif de l'émission (j'ai la paresse coupable de ne pas m'en assurer maintenant -
c'est après rédaction fait)
Pour avoir écouté cette émission, je dois dire avoir pris grand plaisir à écouter Jean-Claude Guillebaud dont la parole est d'un niveau de correction sur lequel nombre de producteurs de France Culture devraient prendre exemple.
De surcroît, son propos est venu contredire le discours dominant de la chaîne.
Exemples :
Doxa France Culture : La guerre c'est caca.
Guillebaud : La guerre est excitante.
Doxa France Culture : Les religions monothéistes impliquent la violence.
Guillebaud : C'est une énorme sottise (voyez la guerre du Pélopponèse).
Peut-être est-ce perversité de ma part mais j'ai été amusé d'entendre la vision du monde de Mme Fraïssé mise en perspective par M. Guillebaud. Le passage où ce dernier déclare être chrétien et ne pas devoir s'en cacher avant de critiquer la critique simpliste des religions comme mères de toute violence m'a paru amusant.
Mon intention est surtout de dire que le discours de M. Guillebaud ne saurait se réduire à la problématique imposée par la page de présentation de l'émission. A mon sens sa teneur est que la guerre procure à l'homme des sensations extrêmement intenses, le fascine, et qu'il convient de prendre en compte ce fait plutôt que de le nier au nom de principes humanistes abstraits, sans quoi nous passons à côté du problème.
Quant au choix des intermèdes musicaux, il m'a ravi (moins que leur troncation après soixante secondes, mais c'est toujours moins pire que les dix secondes en fin de
Grande Table, en quoi vous reconnaîtrez en moi l'auditeur de moins de 35 ans qui n'a pas connu la grande époque de la station et dont les exigences sont hélas à la baisse).
Ceci étant dit, j'ai constaté en cherchant à retrouver l'origine de vos citations que Guillebaud a été également invité à la
Grande Table quelques jours après. Je n'ai pas écouté cette émission mais je suis tenté de déplorer un certain matraquage publicitaire...
(Pour la petite histoire j'habite dans la région Sud-Ouest où paraît le quotidien du même nom où contribue hebdomadairement Guillebaud - après avoir été catapulté correspondant de guerre par le directeur M. Amouroux dans les années 70 qui en a fait son poulain pour obtenir le prix Albert Londres, jusqu'alors chasse gardée des grands quotidiens parisiens, ce que j'ai appris en écoutant tout un monde. Jusqu'alors je ne le connaissais que comme ce chroniqueur du dimanche, centriste et chrétien, dont les contributions m'ont toujours parues singulières et intéressantes, tout en étant moi-même pas nécessairement des mêmes bords. Bref pas fâché d'avoir entendu le bonhomme in vivo).
Je profite de ce message pour remercier tous les contributeurs de ce forum pour leurs interventions qui donnent du grain à moudre, si l'on peut me passer l'expression.