Forum des auditeurs passionnés et critiques de France Culture

Nessie a écrit:
Serait-ce d'avoir été formaté par le moule à gaufres de l'enseignement universitaire, qui expliquerait les interminables efforts de Michel Onfray pour parvenir à penser de lui-même ?

Ca, Nessie, c'est une belle hypothèse structuraliste mais vous l'avez piquée au Capitaine Haddock !

Sous la poussée de je ne sais quelle force, et malgré vos recommandations à ne pas l'écouter, voila que j'ai perdu une heure de temps à écouter Michel Onfray (première conférence). Pardonnez moi d'ajouter ici mes âneries !

Car me voila obscurci après trois vagues successives de dénonciation d'obscurcissement éclairée par Michel Onfray. Je guette encore l'éclaircie dans son obscurité. Comment ne pas s'étonner qu'il n'ait pas dénoncé aussi l'obscurantisme de la musique ou des mathématiques (ne sont ils pas des jargons comme les autres ?).

Je note également quelques contradictions flagrantes: il fait littéralement tout ce qu'il dénonce:
- Il y aurait trop de passion et pas assez de raison. Mais sa passion de la raison ne l'emmène-t-elle pas à brûler des pages déjà noircies ?
- Son jargon subjugue aussi très bien mais ne démontre pas
- L'archive que ne dit pas le monde mais il semble n'éplucher que des textes (y compris biographiques)
- Il veut être clair, écrire de l'Histoire rétablie dans sa vérité (encore une archive ?) mais son plan (heureusement donné) se désarticule en contre-histoires
...

Michel Onfray fidèle à lui-même : "Etre professeur de philosophie ça n'est pas être philosophe". Certes. Hélas, pour le démontrer, il ajoute :  "être professeur d'anglais ça n'est pas être anglais"
(aujourd'hui dès l'introduction du cours - dans les 5 premières minutes)

Arrêtons-nous un instant sur cette sortie : Onfray fait preuve ici d'un juste souci de distinction, mais son argument est d'une sottise himalayesque. La philosophie est une pratique. Le philosophe est celui qui vit cette pratique. Le fait d'être anglais n'est pas une pratique mais une propriété.

Mais admettons que Michel plus pressé de parler que de penser, ait suivi là un raccourci, et considère que le professeur d'anglais enseigne une pratique : celle de la langue anglaise ? Eh bien justement : là où le professeur de philosophie n'est pas toujours capable ni désireux de vivre en philosophe, au contraire le professeur d'anglais est toujours parfaitement capable de vivre en anglophone et il a fallu même qu'il en soit quelque peu désireux. Bref par quelque côté qu'on le prenne, le trick rhétorique n'a aucune portée. C'est d'autant plus lamentable que pour distinguer entre "philosophe" et "professeur de philosophie", il y avait mieux à sortir que ce gadget verbal.

C'est dommage, oui. Chaque jour en écoutant Michel Onfray enfin quand on tient le coup, on peut constater que ses conférences sont farcies de ces facilités rhétoriques en forme de bourde, qui masquent aussi bien ses accès de discernement, que ses départs théoriques parfois intéressants quoique toujours à courte-vue.

<< Etre professeur de philosophie ça n'est pas être philosophe, être professeur d'anglais ça n'est pas être anglais. >>
Michel Onfray aurait mieux fait de rester professeur de philosophie au lycée, plutôt que de tenter de devenir philosophe, chose qu'il ne parvient décidément pas à faire, et le cours de cette année le montre plusieurs fois à chaque heure.

Mathieu Laurent s'inspire dans son style de présentation du Don Juan aux yeux de velours et tombeur de ces dames qui officie sur M6 (journal du soir) et nous susurre à 'oreille de sa voix si bien timbrée, si bien posée et si rassurante, les horreurs du monde. Laurent nous raconte sur un ton badin, gentillet, un peu "activités de patronage", la percée du virus Ebola ou une nouvelle rupture de trêve à Gaza (il nous dit que la dernière trêve a été "augmentée"?). C'est un présentateur détaché, non passionné, au point où l'on se demande parfois s'il comprend vraiment ce qu'il nous explique. J'oubliais, il lance le journal de la mi-journée en annonçant en titre principal, en premier, la reprise de la Grande table un quart d'heure plus tard: passez votre chemin, Gazouites, Irakiens, Kurdes, Ukrainiens, Michel Sapin, le fait du jour c'est que la Grande table démarre dans quinze minutes.

Je ne résiste pas au plaisir de souligner celle que je viens d'entendre à 'instant, pour le cas où vous n'auriez pas été à l'écoute.
Auteur : Michel Onfray. Il cite une statistique : il y a en France 235 infanticides par an. Commentaire du contre-philosophe : si vous enlevez les week-end, cela fait 1 infanticide par jour. (c'est moi qui souligne, mais c'est bien lui qui l'a calculé, et dit !)
Mais que font les parents le WE ? ou que ne font-ils pas ? Ce type de statistiques me laisse toujours rêveur.
?

11h06

<<... on peut imaginer qu'avec l'utilisation des substances hallucinogènes que sont les anxiolytiques et les antidépresseurs, on pourrait réduire la souffrance... >>

Réduire la souffrance, bravo.
Ne pas oublier de réduire aussi les hallucinations lexicales.

En voici une belle, vers 11h48  : "Le capitalisme, ce prolongement industriel du nazisme, fait de nous des déchets [consommation/télévision etc]"

Eh bien on est contents d'apprendre que le nazisme n'était pas industriel.

Je ne sais pas si elle est de Gunther Anders ou de Michel Onfray, et vu le foutoir qu'est la conférence diffusée aujourd'hui -la première sur Anders-  c'est difficile de dire si Onfray commente ou interprète ou bien s'il reporte fidèlement, tout en approuvant ou en désapprouvant ou bien ni l'un ni l'autre. Alors : lecture, paraphrase, réécriture, invention complète ? Pour le savoir, il faudra réécouter l'extrait.

Mais la part de l'un et de l'autre, c'est une question secondaire car la bourde est là : godwinner le capitalisme en une seule série comme ça, c'est fortiche : le capitalisme fait de nous des déchets, la consommation fait de nous des déchets, la télévision fait de nous des déchets. Oui la télévision où Onfray ne manque pas une occasion d'aller faire le beau. Oui l'hédoniste qui considère que la consommation nous dégrade. Il faut le faire...

Et sinon, le nazisme-non-industriel on ne sait pas trop ce que c'est. Ca doit être comme le yaourt sans le lait, l'automobile sans moteur, l'autoroute sans le bitume, le rock n'roll sans l'électricité, ou peut-être la philosophie sans la culture. Mais grâce à Onfray on sait maintenant qu'en liquidant le nazisme non industriel le capitalisme a en fait écrabouillé son frère ainé, bien imparfait dans son oeuvre de destruction. On sait maintenant que l'élévation du niveau de vie fait de l'homme un déchet, que l'accroissement de l'espérance de vie transforme les humains en déchets (mais lesquels, au fait : les jeunes ? les vieux ? tous ? ), que l'alphabétisation pour tous et la liberté politique nous a changés en déchets, bref que tout ce qui a été industriellement corrélatif de l'industrie capitaliste et parfois même anticipant l'éveil des consciences sauciales, eh bien tout cela fait de nous autres les occidentaux des déchets humains, ou peut-être sociaux, ou bien tout simplement des déchets politiques. On parlera une autre fois des déchets philosophiques.

Question  : sur quelle radio culturelle peut-on entendre deux écrivains placer 3 âneries dans leur propre domaine, en parlant de 4 formes littéraires différentes et même 5, finalement, tout ça en moins de temps qu'il n'en faut pour raconter l'histoire ?
Pour vous aider : [son mp3="http://franceculture.fr/sites/default/files/sons/2014/08/s34/NET_FC_4e1fb3ba-4569-460a-aae0-13d4da66e6bf.mp3" debut="106:17" fin="106:51"]
Ne cherchez plus : c'était sur France Culture ce vendredi en clôture de la matinale. Mara Goyet et Nicolas d'Estienne d'Orves ont réussi à mettre dans le même sac   :
1) les faits divers
2) les nouvelles en 3 lignes de Fénéon
3) le Haïku.
4) les news parodiques du Gorafi
Donc oui quatre formes brèves ou plutôt trois + une. On ne voit pas ce qui les rapproche sinon superficiellement, car au sens strict du terme, Fénéon a réglé son compte au fait divers, le Gorafi lui aussi à sa façon, quant au Haïku on cherche le lien.

Savoir que ça existe mais pas plus, et placer le mot dans la conversation : ça fait cultivé.
Le Haïku qui est devenu le pont-aux-ânes des incultureux (niveau Beigbeder).
Le Haï-cucul-la praline, oui.

Le bouquet : ils réussissent à qualifier tout ça en bloc, je vous le donne en mille, à qualifier le tout d' "Oulipien". Ici on peut se dire un instant : tiens, il y a donc des gens qui parlent de littérature comme Michel Onfray parle de philosophie ?

Ces empotés de la jugeotte ignorent certainement que nombre de one-line dans le Journal de Jules Renard, ainsi que les brèves de Gomez de la Serna sont plus proches de l'esprit du haïku que ne le sont les 'Nouvelles en 3 lignes' de Félix Fénéon. Quant au Gorafi, ce sont des rédactions longues, et proches de celles du genre parodié. Chose que Mara Goyet ne semble pas savoir, préférant s'arrêter aux titres qui aneffet sont succincts mais n'est-ce pas là le propre d'un titre ?

En l'occurrence, faire Oulipien consisterait à rédiger du fait divers en respectant la métrique du Haï-ku et le principe poétique fondamental, que nos deux rigolos seraient peut-être bien en peine de définir.

D'ailleurs pour placer une telle ânerie, c'est à se demander ce qu'ils ont compris de l'Oulipo.
(Oulipo : nom propre. Définition : le viaduc-aux-ânes des incultureux).

Je partage votre opinion concernant ce  qu'est devenu le "haïku", mis à toutes les sauces. Je crains de devoir aggraver notre pessimisme : la comparaison avec les haïkus figure explicitement en "4° de couverture" (en fait la dernière page) de la très récente édition (revue et corrigée) des "Nouvelles en trois lignes" aux Editions Macula (2014).

Sur son site Internet, cette maison d'édition se présente comme issue d'un groupe d'historiens de l'art... et d'amateurs.
J'imagine que cette référence qui relève effectivement du "pont-aux-ânes" (mais ne fait même plus "cultivé") doit figurer dans un dossier de presse fourni par cette maison d'édition à l'animatrice de l'émission (la matinale), qui la reprend par facilité et par manque de temps pour réfléchir...

Par contre, il y a quelques minutes, mon optimisme pour l'avenir s'est largement renforcé, grâce à France-Culture : en fin d'une émission (le Sens des Choses) où M. Attali enchaîne beaucoup de poncifs, l'invité du jour m'a appris que l'actuel président de notre république n'a pas d'ordinateur sur son bureau. Moi, cela me rassure.

Il est marrant Jean-Pierre Winter quand même : [son mp3="http://franceculture.fr/sites/default/files/sons/2014/08/s35/RF_4BE472AF-6AD6-4B6C-AEC6-82C5B968ABB4_GENE.MP3" debut="62:30" fin="62:44"]

Ah bon, la psychanalyse n'est ni un commerce, ni un fonds de commerce. Dommage, car aujourd'hui, mis à part quelques énormités usuelles (par exemple son éloge de "Totem et tabou") j'avais bien failli marcher.

Comme je me suis donné 24h de délai, voila que me remonte la bourde d'hier quand Marc Voinchet faisait le 2e gendrame face à un invité. Le deuxième gendarme c'est celui qui veut veut faire l'important, et qui croit anticiper sur ce qui est dit alors qu'il ne fait que réinterpréter de travers. C'est ce qui se passe ne moment même et on peut parier que les âneries vont fleurir comme les lombrics sortent la tête après la pluie.

Anattendant, voici celle que le gentil Marc a balancée hier juste avant 8h : l'invité signale que la Russie plutôt que fermer le robinet du gaz vers l'Europe occidentale, a plutôt intéret à l'exporter son gaz, eh oui elle ne peut pas le garder comme ça.

Marc Voinchet toujours obsédé par le désir de faire celui qui comprend, ajoute "Eh oui le gaz c'est volatil, hein"
Bé oui grosse bête : le gaz ça s'envole si facilement hein. On sait pas le stocker. Il sort tout debout et en continu ha ha le gros méchant Poutine hein il est piégé, obligé de le vendre aux français, son gaz volatil.

Volatil, volatil, je t'en foutrai moi du volatil, tsss.
Espèce de volatile, va ...

Il y a quand même quelque chose d'extraordinaire avec Marc Voinchet : quand il balance une énormité, on ne sait jamais si c'est pour faire avancer le débat ou s'il cherche à meubler.

Ainsi en fin de matinale : après avoir ciré les chaussures de Bruno Dumont qui doit en être gêné, il lui glisse d'un air finaudement initié "alors comme ça, vous préparez une version musicale de Jeanne d'Arc ?" (ouais y parait répond l'autre). Et y parait aussi que vous aimez West Side Story ? Et là, d'un air mi-effaré mi-moqueur "Mais comment est-ce possible ? Ca n'a rien à voir avec ce que vous faites..."

Ah bon, ce que fait l'artiste est dans la proximité de ce qu'il aime ? Première nouvelle. Quoique. Ici encore, deux options pour expliquer cet air effaré.
Première option  : le type qui mouille ses pantalons en écoutant Frank Sinatra ne comprend pas qu'on en fasse autant avec Rita Moreno, Dgeorges Chakiris, ou tout simplement Léonard Bernstein. Alors il réagit non mais c'est normal mettez-vous un peu à sa place quoi.
Deuxième hypothèse : son étonnement n'est pas connement surjoué ; Voinchet ne voyant aucun rapport entre le travail de Bruno Dumont et ce gout incongru subitement révélé par la fiche wiki du mec ou par une quelconque page Voici, c'est tout simplement d'un coup de journalisme au ras des pâquerettes que Voinchet se paye le luxe d'une Nième question con.

Hypothèse supplémentaire : le "grand écart" entre Jeanne d'Arc et  West Side Story on s'en fout, tout le monde s'en fout, Bruno Dumont s'en fout, Voinchet s'en fout, Leonard Bernstein s'en fout, l'auditeur s'en fout, mais voila le drame c'est qu'aucune connerie à répéter n'a daigné apparaitre sur l'écran twitter de Voinchet alors vous comprenez on meuble comme on peut.