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Fictions / La Vie moderne du 01 09 2014

Oui mais nous, comment on fait pour notre exposé ? 1/5 de Jean-Charles Massera, Emmanuelle Pireyre

7 minutes.

C'est sur France Culture.  Pourquoi ?

Oui, qui est Sophie Dol ? (Ou Dole, ou Doll ?). On ne le sait pas à la page de "La Vie moderne", elle n'y est pas mentionnée. C'est pourtant elle, comme lectrice de qualité, qui fait exister le texte de Dominique Rousset Un goût de miel 1/5*.

Ces petits récits s'écoutent avec intérêt et donnent un autre regard sur un phénomène qui est souvent à la une des journaux télévisés. C'est aussi une manière d'émouvoir sans donner à réfléchir. Dominique Rousset que l'on connaît comme analyste d'économie et de géopolitique a peut-être voulu changer de perspective.

Episode 1

« Lamine, Tarek, Anita : combien sont-ils à tenter, comme eux,  le passage vers une autre vie ailleurs, une vie meilleure ? Combien à traverser la mer, à se glisser sous les bâches des camions, dans le ventre des cargos, à escalader les clôtures sous le feu des gardiens et même à  se cacher dans les trains d’atterrissage des avions ?  Ils laissent des familles, leurs enfants, parfois des villages entiers, qu’ils vont  nourrir à distance, dès que cela sera possible.  Ils ont choisi, plus souvent accepté d’être celui ou celle qui part. Ils ne savent rien de ce qui les attend et, quand ils le savent, ils partent quand même. Ils reviendront peut-être, la plupart l’espèrent, mais sûrement pas les mains vides. Portraits de ces femmes et de ces hommes courageux,  jusqu’au bout de leur long parcours : « Vous ne voulez pas de nous, dit Lamine, mais vous nous avez donné le goût du miel ».

« Un goût de miel » de Dominique Rousset est publié aux Editions du Seuil (2008)

Ce voyage en train de la série « La vie moderne », "Vers la mer" de Sophie Lemp, dure 35 minutes et se déroule en 5 épisodes. Trop court. On s'habitue à ces monologues intérieurs de passagers ruminant leurs difficultés existentielles sur fond de grincement d'essieu. Unité de ton et de préoccupation : la maladie, la mort, la solitude, l'amour non partagé, la tromperie, la déception. Le bonheur n'est-il pas radiophonique ou est-il absent de la "vie moderne" ? Aucun de ces cinq passagers ne se réjouit. Une tendance... (assez française d'ailleurs, il faut cultiver le mal-être...). Pourtant, on accroche immédiatement en raison du climat, de la qualité des interprétations et de la crédibilité des narrations. Les récits auraient mérité 10 épisodes au moins.  

"Mesdames et messieurs bonjour, vous avez pris place dans le train Intercités numéro 3353 à destination de Trouville Deauville. Il desservira les gares d’Evreux, Bernay et Lisieux. Pour le confort de tous, merci d’utiliser vos téléphones portables sur les plateformes prévues à cet effet. La SNCF vous souhaite un bon voyage."

Dans ce train, il y a Marie-Claude, Suzanne, Etienne, Justine, Paul... des voyageurs comme ceux que l'on croise régulièrement et que l'on ne reverra plus... A travers leurs pensées qui nous sont donné à entendre comme autant de voix intérieures, à travers leurs espoirs et leurs douleurs, qui se mêlent ici, des histoires et des vies se dessinent. C’est ainsi que nous les partageons, le temps d’un Paris Deauville.

Sophie Lemp est l’auteure de plusieurs adaptations radiophoniques – Passion simple, L’événement et Les Années d’Annie Ernaux, Il était un piano noir, d’après les mémoires de Barbara - ainsi que d’un premier feuilleton, Eperdue. Elle est également comédienne. "

Plus haut, le 8 septembre

Philaunet a écrit: (...) Que pense Cédric Aussir de sa propre adaptation ? L'hebdomadaire culturel ( ? )Télérama va-t-il faire une demi-page sur le sujet et inviter le réalisateur à expliquer son projet ? (ici smiley riant jaune...).

Le 5 septembre, trois jours avant le post ci-dessus, Malik Teffahi-Richard faisait un papier conséquent sur cette adaptation de Balzac à France Culture dans Télérama. Il y rapportait des propos de Cédric Aussir.

Je me demande si le journaliste a écouté beaucoup des épisodes de cette série de 10 fois 25 minutes afin de réaliser son papier exclusivement louangeur (TTT).

Quoi qu'il en soit, une présentation développée comme conseil d'écoute de fiction radiophonique, voilà qui est  trop rare pour ne pas le signaler : “Les Petites Misères de la vie conjugale” : le ménage désenchanté

Pour les découragés du feuilleton, les désespérés de la fiction, les suicidés de la tranche de 20h30 qui morflent sérieux ces temps-ci, pour les renégats de chez Balzac et les saturés par les adaptations de Jean-Philippe Toussaint, voici une quasi-bonne nouvelle : France Culture n'a pas produit de fiction pour la semaine en cours.

Au lieu de quoi pour tenter de se raccrocher à la culture après le matraquage politique qui a envahi cette semaine jusqu'A voix nue, France Culture vous propose une semaine de, de, de .... ne cherchez plus, c'est un cadeau inattendu : 5 numéros de la série de Patrice Galbeau dont on a parfois un numéro dans les Nuits de FC. Bonnes nouvelles et grands comédiens.

- Lundi : Madeleine Robinson lit Romain Gary
- Mardi : Gianni Esposito lit Panaït Istrati
- Mercredi : Jean Piat lit Elie Wiesel
- Jeudi : Jean Martin lit Scott Fitzgerald
- Vendredi : Geneviève Casile lit Tchékhov

On se dit que les réductions de budget sont tout de même une belle invention.

Nessie a écrit:(...) France Culture vous propose une semaine de, de, de .... ne cherchez plus, c'est un cadeau inattendu : 5 numéros de la série de Patrice Galbeau dont on a parfois un numéro dans les Nuits de FC. Bonnes nouvelles et grands comédiens.

- Lundi : Madeleine Robinson lit Romain Gary
- Mardi : Gianni Esposito lit Panaït Istrati
- Mercredi : Jean Piat lit Elie Wiesel
- Jeudi : Jean Martin lit Scott Fitzgerald
- Vendredi : Geneviève Casile lit Tchékhov

Gianni Esposito lit Bakar de Panaït Istrati et c'est tout simplement splendide et mémorable. Vingt minutes qui nous font entrer avec beaucoup de subtilité dans une relation entre un homme errant, affamé et assoiffé, et un vendeur de limonade dans un kiosque à Héliopolis. C'est à travers les yeux du premier que l'on découvre le second, un artiste possédant quelque talent mystérieux que nous allons découvrir progressivement. Une histoire d'amitié, de relation de confiance profonde nouée entre deux êtres. Gianni Esposito lit avec grande sensibilité.  

C'était en 1973. Et en 2014 ? Depuis des années nous avons un lecteur de grand talent, sous employé à France Culture, qui lit des bribes aux « Nouveaux Chemins de la Connaissance ». Un grand artiste, considéré comme la cinquième roue du carrosse, j'ai nommé Georges Claisse.

Après avoir entendu René Huyghe faire le portrait de Van Gogh, je me dis qu'une lecture de la correspondance du peintre par Georges Claisse serait à coup sûr un chef d'oeuvre d'art radiophonique. De même la correspondance de Flaubert, par exemple. France Culture créerait pour la postérité.

Où a été entendu Georges Claisse sur la chaîne récemment dans une lecture de plus d'une minute ?

Pourquoi ces séries de huit minutes de la Vie moderne sont-elle rangées dans la case Fiction, on se le demande.
La série intitulée Regarde les lumières mon amour 1/5 d'Annie Ernaux n'a rien de poétique, au cas où le titre donnerait quelque idée d'effusion. Non, selon le descriptif «  Durant une année, Annie Ernaux a tenu le journal de ses visites à l’hypermarché du centre commercial des Trois-Fontaines, en région parisienne ». Comme c'est passionnant ! Le caddie sale, le sac en plastique, la librairie avec les best-sellers sur 10 mètres  (mais ouf, quelques livres de poche au nom de l''artiste se trouvent dans les rayonnages). De l'hyperréalisme ?

Écrivez : « je lis le blog Regards sur France Culture, assis/e sur une chaise de bureau devant un écran de la marque X acheté dans le magasin Y », et vous voiià aussi écrivain qu'Annie Ernaux.

Philaunet a écrit:Gianni Esposito lit Bakar de Panaït Istrati et c'est tout simplement splendide et mémorable. Vingt minutes qui nous font entrer avec beaucoup de subtilité dans une relation entre un homme errant, affamé et assoiffé, et un vendeur de limonade dans un kiosque à Héliopolis. C'est à travers les yeux du premier que l'on découvre le second, un artiste possédant quelque talent mystérieux que nous allons découvrir progressivement. Une histoire d'amitié, de relation de confiance profonde nouée entre deux êtres. Gianni Esposito lit avec grande sensibilité.

On retrouvera Gianni Esposito dans la rediffusion nocturne des "Morceaux choisis" consacrée à Georges Limbour.
Nuit de mercredi à jeudi. De 3h17 à 4h32. C'est une émission-modèle pour qui a envie de découvrir un écrivain oublié et une formule d'émission qui n'a rien de surprenant, qui n'a rien de bouleversant, qui n'a rien de génial.... mais qui a disparu de la chaine France Culture où 40 ans plus tard on en trouve d'autres qui, en comparaison, ne valent pas un clou.

Ah mais j'en vois d'ici qui renâclent : comment, 3h17 mais ça va pas la tête ? Ok, ok, l'émission sera disponible en réécoute le lendemain. On s'efforcera de la relayer ici : ça sera une première, du coup j'en profite pour placer cette info qui intéressera les amateurs de fiction : avec la nouvelle offre de réécoute des Nuits, on peut proposer sur le forum des pastilles sonores et des propositions d'écoute puisées dans le programme de nuit. Jusqu'ici je n'ai pas trop osé tenter le coup, tant il est visible que les réécoutes neuves du programme de nuit sentent à la fois le soufre, le bug, le piège électronique et autre chose je ne sais pas quoi peut-être la chaussette d'unijambiste ?

Goya, Schubert, HBO : même art... [son mp3="http://franceculture.fr/sites/default/files/sons/2014/09/s39/RF_AA1243DB-28B5-4103-B770-6BC112E69CC9_GENE.MP3" debut="00:00" fin="00:30"]

Ecrivains en séries-Séries américaines-3/5 Six feet under de Laure Limongi rediffusion de 2010

Longue énumération d'accidents et de crimes. L'auditeur initial de 11h50 (ou en 2010, à une autre heure) apprécie ? En podcast, on passe à autre chose.

« La vie moderne », il n'y a pas grand-chose à sauver. Pas La légende de Bornéo par exemple : « (...) nous avons souhaité, en prenant comme point de départ notre spectacle La Légende de Bornéo, interroger notre monde par le prisme de cet endroit de nos vies de plus en plus tendu : le travail. » Marie Richeux fait des émules.

Ca n'est pas tout à fait de la fiction mais ça passe dans la case feuilleton : ce sont des extraits du Journal de Michel Leiris. Sous le titre usuel dans ce genre radiophonique : "Pages arrachées au journal de ...." . Dans le passé récent, le feuilleton nous avait donné ainsi des 'Pages arrachées au journal de Mireille Havet', 'Pages arrachées au journal de NIcolas Bouvier.

Nous avons donc  10 épisodes. Les 5 premiers ont été diffusés dans la semaine écoulée, les 5 suivants dans la semaine à venir, comme de raison. J'en ai placé un dans le médaillon 'Proposition d'écoute', où il devrait apparaître d'ici 2 jours.

Ca fait réfléchir à ce qu'est la lecture par un comédien de talent : l'intérêt de l'auditeur ne faiblit pas alors que  celui du texte est lui très faiblard. C'est que le journal de Michel Leiris est plus proche de celui d'Anaïs Nin que de celui de Gide ou de Léautaud, hein. Disons que ça ne brille pas par la profondeur : ce sont des comptes-rendus au quotidien, pas tout à fait des remarques ramenées du marché car le quotidien d'un intellectuel n'est pas celui d'une ménagère, mais enfin ça ne vole pas bien haut tout de même. Il en reste un petit travail de mémorialiste, qui fait une bonne matière première pour un feuilleton radiophonique : le résultat s'écoute très agréablement. D'ailleurs une voix bien chargée ou une lecture au contraire pas trop chargée, ça vous métamorphose aisément un texte insipide comme on a pu le constater samedi dernier quand Sami Frey lisait Dora Bruder. Sami Frey qui au contraire de ses parents, a pu échapper à la déportation et à l'extermination, est-ce pour cela que sa lecture de 'Dora Bruder' était si bonne ? Non. C'est parce que Sami Frey est un bon professionnel qui a perdu depuis longtemps la vanité de se faire mousser, je dis ça parce que sur FC en général et dans les fictions/lectures en particulier, on constate l'inverse.

Pour Michel Leiris, c'est Jean-Louis Trintignant, autre grand du métier, qui lit les pages du Journal. Il réussit à donner du relief à ce qui n'est guère plus que des souvenirs. Enregistrée en 1990, cette série a été diffusée de nouveau en 2005. On trouvera le premier épisode au bout de ce lien.