Dudule a écrit:Ceux qui ont leur poste branché sur France Culture en début de soirée connaissent le slogan lancé chaque soir que diable fait par Arnaud Laporte "La dispute, vous y êtes tous conviés". C'est sympathique tout de même de nous inviter à entrer dans cette noble maison qui a les idées larges. Vous le savez sans doute, grande innovation dans l'esprit d'ouverture sauce Poivre, un répondeur a été mis en place.
Ce gadget m'a d'emblée laissé dubitatif. Que raconter de construit sur un message de répondeur, en quelques minutes ? D'évidence pas grand-chose ou quasiment rien. Aussi est né un soupçon : répondeur pour y laisser des banalités et faire croire aux naïfs qu'ils participent dans un esprit collaboratif à la radio. Cependant, je me suis dit un beau jour "Ben, moi z'aussi je veux faire de la radio ! Moi z'aussi, je veux être immortalisé une minute et vingt secondes avant de retomber dans l'oubli. Moi z'aussi, je veux être célèbre !"
Alors, toute honte bue, je me suis lancé, me disant "Pourquoi pas moi ?" J'ai composé le numéro et ai dit ce que j'avais remarqué de la présentation faite d'un roman de Véronique Ovaldé qui semblait avoir enthousiasmé Arnaud Laporte et les critiques réunis autour de lui pour animer sa "Dispute". J'ai donc tenté de faire oeuvre de "critique" à mon petit niveau puisqu'on nous y invite.
Lors de la présentation de ce roman, j'avais été frappé par le fait qu'Arnaud Laporte avait dit à plusieurs reprises que Véronique Ovaldé était "un romancier américain". Il appuyait son argument sur le fait que de roman en roman, ses intrigues changeaient de lieu géographique. De plus, les autres critiques présents abondaient en ce sens, disant qu'Ovaldé faisait fi des questions théoriques sur le roman et jouissait donc d'une sorte de liberté dont seraient privés d'autres écrivains.
Tout cela me semblait pour le moins vague, sinon scabreux, sinon proche de l'idée reçue.
J'ai donc laissé un message où je revenais sur ces questions. J'ai demandé quelle idée "La dispute" et ses critiques se faisaient du roman américain. J'ai dit que celui-ci ne pouvait se cantonner à une idée aussi vague, que la littérature américaine avait une histoire, des enjeux, comptaient des auteurs différents et que certains d'entre eux avaient (contrairement à ce qui avait été avancé) écrit des livres d'une extrême complexité théorique, qu'il y avait même une veine de cet ordre. J'ai ajouté que l'argument du "voyage" pour rapprocher Ovaldé des écrivains américains me semblait curieux. Somme toute, de la bourlingue, il y en a aussi chez Mac Orlan, Cendrars ou Bouvier ... Sont-ils pour autant des "romanciers américains", peut-on, sans faire d'amalgame, les qualifier comme tels ?
Or que croyez-vous qu'il arriva ? Mon message ne fut jamais diffusé
Ne croyez-pas que j'y voie un crime de lèse-majesté ou que ma vanité en est toute blessée. Simplement, je constate que ce gadget de répondeur est une arnaque ou un attrape-nigaud. Bref, contrairement à ce qui est annoncé, les meilleurs critiques peuvent tenir des propos simplistes, réduire les choses, aller à la facilité, ils ne seront pas contestés et ne prendront pas la peine de répondre.
Ce répondeur existe sans doute afin de donner des gages (faux) de participation. Il sert à flatter le public. Mais, de fait, de "dispute", d'échanges réels, constructifs avec les auditeurs, point !
Je m'en doutais, j'en ai eu confirmation. Et je crois que cette anecdote, en creux et même en rebondi, en dit long sur l'évolution de France Culture vers la démagogie, doublée de facilité. Hélas, trois fois hélas !