Cher Pierre Ropert,
Le moment est venu de t'accorder trop d'importance. Récemment arrivé à France Culture, peut-être n'as-tu pas encore eu le plaisir d'obtenir l'onction des plumes expertes de "Regards sur France Culture". Nous t'invitons donc, toi aussi, à rejoindre le "panthéon des supers-héros" de France Culture. Ceci grâce à la critique citoyenne du succulent morceau de médiocrité que tu nous as servi via ton article "Les super-héros explosent tout " - pardon "exposent tout" (jeu de mots subtil s'il en est!), daté du 2 avril dernier.
http://www.franceculture.fr/2014-04-02-les-super-heros-exposent-toutQuand la médiocrité s'invite à France Culture...
D'abord, le style se cherche, entre balourdise et pédanterie. Quelques aperçus.
"Nous vous proposons de découvrir un échantillon de cette exposition richement fournie." Ceci n'est pas une trousse. Et qu'est-ce que cette proposition apporte à l'article (qui est lui-même d'une vacuité géniale)?
"Au cœur de l’exposition “L’Art des Super-Héros Marvel”, comme l'a suggéré le génial inventeur d’une quasi-mythologie, les statues d'Iron Man ou de Thor ont été préférées à celles, plus traditionnelles, d’Apollon ou Jupiter." Dans la mythologie, Thor, Apollon, et Jupiter sont des dieux, pas des héros. Il faudrait savoir de quoi on parle, de super-héros ou d'un panthéon plus classiquement peuplé de dieux? On dirait bien une quasi-phrase.
Après cela, on a: la construction légèrement bancale de la phrase, qui oppose sans l'assumer les supers-héros en tant qu'individus aux groupes de supers héros. "Chaque pièce est cependant consacrée à un des personnages phares de l'éditeur, qu’il s’agisse d’Iron Man, de Spiderman, de Daredevil, ou bien de groupes de super-héros tels les Quatre Fantastiques, les Avengers ou encore les X-Men."
Autre exemple de maladresse: "A droite, Stan Lee, rétro-projeté sur le mur, discute super-héros face caméra." Tournure lourdingue s'il en est.
"Le néophyte profitera pleinement de l’aspect contemplatif de cette exposition." Alors celle-là, elle vaut le coup d’œil. "Contemplatif"? Ainsi soit-il.
"Les périodes chargées d’histoire, et notamment l’affaire du Watergate, ont eu une influence forte sur les super-héros, et notamment sur Captain America. " Oulàlà.
1) Parce qu'il existe des périodes qui ne sont pas "chargées d'histoire"?
2) Cette phrase comporte une répétition dissonante du mot "notamment".
"Des 4 Fantastiques aux X-Men, en passant par le Punisher, Iron Fist, le Surfer d’Argent ou les Gardiens de la Galaxie, une palanquée de super-héros ornent les murs du musée de l'Art ludique." La chute valait vraiment l'énumération. Tout ça pour placer "palanquée".
"France Culture s’arrête sur ces personnages aux pouvoirs quasi-divins, à cette mythologie de l’Amérique et à tout ce qu’elle nous dit de notre société et de notre passé, en commençant par sa dimension artistique." Proust, le style en moins.
Ultime caractéristique stylistique de l'auteur : l'adverbe qui n'apporte rien. "Il était important de montrer aux plus jeunes que, derrière la technologie, il y a à la base un travail
profondément artistique."
Ensuite, Pierre Ropert nous livre ici un papier trop descriptif, vide en réalité de contenu. On nous décrit la visite de l'exposition par l'auteur, en enrobant d'un vocabulaire fleuri et onctueux un article au contenu résolument radin. Franchement, c'est sans queue ni tête.
Cherchons les preuves.
Quand on n'a pas de contenu, on se répète: "Le néophyte profitera pleinement de l’aspect contemplatif de cette exposition. Mais il n’aura peut-être pas le bagage idéal pour découvrir la richesse des œuvres accrochées aux murs et pour comprendre", puis, plus bas: "et force est de constater que le profane passera probablement à côté de tout un pan de l'exposition." Autre exemple: "Certes, le manque d'explications didactiques, contextualisantes, est un crève-cœur lorsqu'on constate la qualité de certaines œuvres exposées"; puis plus loin: "Pourtant, malgré les commentaires proposés aux visiteurs, l'exposition manque cruellement de mise en contexte, d’explications techniques". Cet article tourne allègrement en rond. Cher Auteur, un petit conseil pour éviter ces turpitudes: n'hésitez pas, à l'avenir, à faire un plan.
A présent, regardez bien: voici le florilège des mots-clés "spéciale culture" que l'auteur a subtilement casé dans son article ("richement fourni", n'est-ce pas) pour rattacher son torrent d'inepties à un quelconque exercice culturel: "pulp culture des années vingt", "mythologie de l'Amérique", ou encore "concept art".
Enfin, outre le contenu pas franchement brillant, question présentation, l'article laisse aussi à désirer. Des photographies lugubres et à peine bien cadrées ornent un contenu à la pagination boiteuse. Un petit cours de code s'impose.
Conclusion de l'article: "Pourtant, malgré les commentaires proposés aux visiteurs, l'exposition manque cruellement de mise en contexte, d’explications techniques sur cet art du comics qui s'est cherché tout au long du XXème siècle." Comme ton article.
Cela mérite un papier labellisé France Culture, c'est sûr. Dommage, car avant qu'on me taxe de snobisme, je préfère souligner que l'art des comic books mérite mieux qu'un tel torchon.
La chute de l'article nous laisse aussi pantois. "Et si l'identité des super-héros se trouve derrière leur masque, celle de leurs créateurs se cache elle derrière leur plume." Ou l'art de la chute qui peut s'appliquer à n'importe quel sujet. Cher Auteur, la réutilisez-vous pour chacun de vos articles?