Un tour de table de haute volée, dirigé de main de maître par Mélanie Chalandon:
Vieillissement et dépendance : la France est-elle dans le déni ? dans
Le Grain à moudre d'été.
Factuel, intelligent, non-polémique, ouvrant (ou rappelant) de nombreuses perspectives de réflexion et d'action, voilà une "discussion" qui devrait faire l'objet d'une mise en valeur sur le site de France Culture.
Les trois intervenants ont, chacun dans leur activité, une expérience débouchant sur une réflexion qui retient l'attention. Pascal Champvert,
président de l’Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA), est un excellent orateur et pédagogue ; Serge Guérin,
sociologue, spécialiste du vieillissement parle un peu plus abstraitement mais reste intéressant ; Annie De Vivie,
Fondatrice, PDG et rédactrice en chef du site www.agevillage.com spécialisé dans les questions du vieillissement en direct au téléphone, fournit son savoir spécialisé.
L'art de la direction de débat est illustré de belle façon par Mélanie Chalandon qui a bien préparé son sujet*. À classer parmi les exemples à suivre. Ce niveau n'est pas sans rappeler les débats de qualité sur le même sujet que nos voisins d'outre-Rhin ont dans une émission de format identique "SWR 2 Forum".
Suggestions d'écoute (France Culture aurait pu elle-même faire cette recherche...) : passionnants numéros de
Sur les Docks en 2010
"Un peu d’humanitude : une formation de soignants en maison de retraite – Première partie" et
2e partie. (AJOUT : ah, déréférencés et introuvables... En ce cas, voir descriptifs ci-dessous**. Eh, oh, FC ? On remet en ligne les numéros ?)
La recension d'une chronique sur ce forum
Le vieillissement durable, une opportunité pour tous.
* Elle a écouté un autre débat pour se préparer. On l'apprend sur la page de présentation où l'on peut lire cette très surprenante phrase d'introduction : "
C’était il y a quelques mois dans un magazine de débat d’une radio concurrente et néanmoins amie – le téléphone sonne sur France inter –"
Je croyais que les stations du groupe Radio France étaient complémentaires et non pas concurrentes.
**1.
Sur les docks C'est la rentrée ! (4/5) : "Un peu d’humanitude : une formation de soignants en maison de retraite – Première partie" 1 02.09.2010 - 17:00 Premier volet d'un documentaire en deux parties de Claire Hauter et Vanessa Nadjar
Pour faire face au vieillissement inéluctable de la population française – 5,5 millions de personnes âgées de plus de soixante-quinze ans en 2008, avec un pic de la dépendance dans les décennies 2030-2050 - il est urgent d’améliorer les modes de prise en charge des personnes âgées dépendantes. En particulier celles atteintes de maladies Alzheimer et apparentées, surtout quand on sait que les médicaments dont on attendait beaucoup se sont révélés jusque-là décevants. D’où l’intérêt des approches non médicamenteuses.
Or la diminution des moyens et des effectifs dans les maisons de retraite tendent trop souvent à faire du soin une succession d’actes vidés de sens, voire une simple prestation de service. D’autant qu’une étude a montré que 60 % des professionnels de soin, en France, n’ont pas la formation appropriée pour faire la toilette d’une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer, qui requiert une vraie technicité.
La Maison Morlot est une maison de retraite médicalisée comme tant d’autres dans le 9e arrondissement de Lyon. De taille moyenne, elle accueille soixante-cinq personnes âgées dépendantes, dont douze résidents atteints de la maladie d’Alzheimer. A raison de 0,5 soignant par résident - la moyenne dans les établissements français - le personnel est sous pression.
Ces jours-ci, justement, une formation originale est dispensée par Jacqueline Oulevay. Cette ex-infirmière et directrice de maison de retraite s’est ralliée à l’Humanitude, une philosophie de soins née il y a vingt-cinq ans et implantée en Suisse, au Benelux et au Canada. Changement de regard sur la vieillesse, remise en question de la culture soignante héritée du temps des hospices, valorisation du travail des soignants, quête de sens et de plaisir dans le travail, tels en sont les grands axes. Ses concepteurs, Yves Gineste et Rosette Marescotti, en ont fait une méthodologie qu’ils enseignent à longueur d’année dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).
Testée dans des institutions auprès de patients atteints de maladies dégénératives, cette méthode agit sur les troubles de la mémoire, de l’orientation ou du langage ; elle vise le maintien de l’autonomie psychique et fonctionnelle et atténue de nombreux troubles du comportement. Son application repose sur quatre piliers simples : le regard, la parole, le toucher, et la verticalité.
« Tout ce qui construit l'être humain dès son plus jeune âge - le regard, la parole, le geste tendre - est trop fréquemment refusé aux personnes âgées, explique son concepteur, Yves Gineste. Celles-ci ne reçoivent en moyenne que cent à cent vingt secondes de paroles par jour et dix secondes de regards ; et encore, il s'agit de regards balayeurs, qui ne fixent pas mais réduisent au néant. Certaines personnes se replient alors sur elles-mêmes et deviennent grabataires, d’autres peuvent adopter des comportements de résistance ou d'agressivité. Quand une personne atteinte par la maladie d’Alzheimer se sent menacée, crie et se débat, même si la maladie l'empêche d'interpréter adéquatement son environnement, c'est à nous de nous y adapter. Il faut en finir avec les soins de force trop souvent pratiqués, reconnaître l'être humain chez l'Autre, malgré les troubles cognitifs et je dirais même parfois grâce aux troubles cognitifs. »
Pendant quatre jours, une dizaine de soignants - cadre de santé, infirmières, aides-soignantes mais aussi psychologue et personnel de service – va mettre en pratique la méthode Gineste-Marescotti dans les soins dispensés aux résidents atteints de CAP – comportements d’agitation pathologique.
Ce cursus sera l’occasion de découvrir le travail quotidien des infirmières et surtout des aides-soignantes et de constater que le prendre soin des résidents est indissociable d’une meilleure formation et d’une remise en dignité des personnels de base dans les établissements destinés aux personnes âgées.
Avec :
Léandre Borbon, directeur de la Maison Morlot ;
Jacqueline Oulevay, formatrice Humanitude ;
Docteur Anne-Claire Thury, médecin coordonnateur,
Et le personnel de la Maison Morlot.
2. C'est la rentrée ! (5/5) : "Un peu d’humanitude : une formation de soignants en maison de retraite – Seconde partie"
03.09.2010 - 17:00 Seconde et dernière partie d'un documentaire de Claire Hauter et Vanessa NadjarA la maison Morlot – une maison de retraite accueillant 65 personnes âgées dépendantes, dont 12 résidents atteints de la maladie d’Alzheimer - la formation à l’Humanitude va bientôt s’achever.
L’originalité de cette formation est qu’elle passe par la mise en pratique immédiate des enseignements théoriques lors des toilettes des résidents atteints de CAP, les comportements d’agitation pathologique. Les enjeux profonds du soin sont donc liés à la qualité de la rencontre entre soignant et soigné, à mi-chemin deux ornières que sont la relation fusionnelle et la distance défensive surtout quand il s’agit de personnes âgées dépendantes.
A présent l’heure du bilan approche. Déjà il en est question au grand salon où les résidents valides se retrouvent chaque jour pour des activités dirigées : eux aussi sont concernés par l’Humanitude : aujourd’hui, ils préparent des affichettes pour que les soignants n’entrent pas dans leurs chambres sans autorisation. Un premier pas vers un changement de regard et d’attitude.
Mais qu’en restera-t-il de ces acquis au terme des quatre jours, une fois chacun repris dans sa routine et ses contraintes ? Comment faire pour mette en application cette méthodologie de soins, qui implique souvent de procéder aux toilettes à deux alors que le quota est de 0, 5 soignant par résident et quand on sait qu’il faudrait au minimum doubler le nombre de professionnels dans les Ehpad, les établissements accueillant les personnes âgées dépendantes, selon le dernier rapport de la Cour des Comptes ?
Le fait de revenir à la maison Morlot, quinze jours après la fin de la formation, permettra d’y répondre.
Avec :
Léandre Borbon, directeur de la maison Morlot ;
Jacqueline Oulevay, formatrice Humanitude ;
Docteur Anne-Claire Thury, médecin coordonnateur,
Et le personnel de la maison Morlot.
1 commentaire
Marie06.12.2010 Je suis AMP diplomée depuis 1993 et depuis 4 ans je travaille en maison de retraite dans le Sud Ouest, j'exerce en fait un travail d'aide soignante que je regrette profondément, ma formation d'AMP était axée sur le prendre soin de la personne et l'accompagnement dans tous les gestes de la vie quotidienne. J'ai déjà eu la formation Humanitude dans cette maison de retraite et demain on nous fait comme ils disent une piqure de rappel, je voulais simplement dire que la première formation ne nous a servi à rien, quand je vois la charge de travail que nous avons, pas le temps de prendre le temps, c'est l'usine... J'essaie de faire de l'humanitude quand je peux mais franchement je rentre chez moi avec une boule au ventre, car je n'ai pas fait ce que j'aurais voulu faire, je me bats tous les jours avec ma hiérarchie et mes collègues pour cela, je ne quitte pas mon boulot car j'ai besoin d'argent, mais franchement ces formations ne servent à rien, on ne peut pas les mettre en application... Alors que faut-il faire pour que ça change ?? Dites-moi !!!! J'adore mon boulot, dommage pour toutes ces personnes !!