Dans le fil « Programme de l’été 2013 », le 04 Sep 2013
Antoine Arnoux a écrit:La semaine dernière encore, Yves Saint-Geours prononçait, presque chaque jour, une chronique relative à « L'Année 1913 ». Dans la pénultième phrase de la pénultième chronique, M. Saint-Geours dit ceci : « Comme l’écrit Proust lui-même : ''La raison ne pénètre pas dans les contrées profondes où gisent nos croyances'' » (http://www.franceculture.fr/emission-l-annee-1913-16-novembre-1913-du-cote-de-chez-swann-parait-aux-editions-grasset-2013-08-30). Voici la citation exacte : « Les faits ne pénètrent pas dans le monde où vivent nos croyances, ils n’ont pas fait naître celles-ci, ils ne les détruisent pas ; ils peuvent leur infliger les plus constants démentis sans les affaiblir, et une avalanche de malheurs ou de maladies se succédant sans interruption dans une famille ne la fera pas douter de la bonté de son Dieu ou du talent de son médecin » (Du côté de chez Swann, I, II, in A la recherche du Temps perdu, collection « Bibliothèque de la Pléiade », premier tome, p. 146). Cette éblouissante remarque s'applique tout à fait à France (in)Culture qui demeure imperméable au moindre doute.
Chez Olivier Poivre d'Arvor, la croyance dans le jeunisme, dans les formes les plus vaines et les plus superficielles de l'expression, relève-t-elle de la psychologie que note Proust à propos de croyance religieuse et médicale (et amoureuse, surtout) ?
Si l'on peut comprendre l'aveuglement qui affecte les hommes quand il est question d'un dieu, d'une maladie ou d'un être aimé, on a du mal à accepter ce fonctionnement pour une perception de la culture. Car enfin, si la raison a du mal à pénétrer les croyances sus-mentionnées par Proust (mais ce n'est pas impossible), on peut quand même penser qu'un esprit d'une certaine maturité (d'âge) et de quelque expérience devrait être accessible à tout ce qui contredit ses propos sur la culture (récités comme un catéchisme par Laure Adler dans
l'abominable vidéo du Trocadéro).
La culture, c'est justement ce qui permet, entre autres, de mettre ses propres croyances en perspective, de les examiner à travers le regard et l'analyse des autres, pour y trouver un fondement ou le cas échéant pour les remettre en cause.
France Culture a été, et est encore partiellement, un outil de réflexion et d'émancipation où la raison peut questionner (
pardon Gomez) les croyances en les voyant exposées par des esprits pénétrants.
Cette imperméabilité au doute que vous évoquez, Antoine Arnoux, reste donc un mystère quand on pense que la direction de FC est quand même régulièrement en contact avec de grands esprits du temps qui devraient, par leur exemple et leurs propos, faire entrer deux sous de réflexion dans l'esprit borné d'un OPDA.
À moins que cette croyance d'avoir toujours raison issue d'un complaisant narcissisme ne soit vraiment pathologique, comme son
interview pathétique le laisse craindre.
(à 0'14" de cette vidéo, voir la tête d'OPDA, les yeux clos, qui se superpose presque à un petit masque aux yeux évidés sur une étagère en retrait - quel symbole ! Rappelle avec éloquence le choix de Gide de se faire photographier sous le masque mortuaire de Léopardi. La photographe
Gisèle Freund évoque longuement la genèse de cette pose dans son entretien avec Dominique Rousset en 1985. Merci à France Culture de 1985 de permettre de faire ce rapprochement...
http://www.photo-arago.fr/Archive/Andr%C3%A9-Gide-sous-le-masque-de-L%C3%A9opardi,-Paris-2C6NU05IL5ZI.html )