Forum des auditeurs passionnés et critiques de France Culture

Journal de 12 h 30. Thomas Cluzel.
La rencontre Macron-Poutine est traitée au bout de 12 longues minutes, alors qu'elle fait les titres de tous les médias. Elle est traitée de façon totalement négative, comme un échec. Il faut l'intervention d'une maîtresse de conférence de Sciences Po pour apporter un peu de réalisme et de bon sens. Même Le Monde, pourtant peu favorable au PR quoi qu'il fasse, titre au même moment : "Crise en Ukraine : Emmanuel Macron arrive à Kiev, avec des assurances de Poutine".
A FC, on se rapproche de la désinformation.

Le titre du jour, pour FC, c'est l'énorme déficit de la balance des paiements. Il faudra attendre, là encore, une intervention extérieure pour apprendre qu'il est dû à nos achats, conséquence en partie de la désindustrialisation, du poids grandissant du coût du pétrole et du gaz, mais que notre balance des services est fortement excédentaire.
La BNP annonce un bénéfice record ? La journaliste "économiste" habituelle de FC s'interroge gravement: "Est-ce que cela va durer ?". Pour elle, il n'y a jamais de bonne nouvelle. Jamais. Elle nous apprend aussi, horreur !, que des dividendes en croissance vont être distribués aux actionnaires de la banque.

Bref, tout est pris en mauvaise part. Systématiquement tout ce qui est positif est relativisé ou "déconstruit", tout ce qui est négatif passe au premier plan.
On imagine l'ambiance délétère qui doit régner dans les studios de FC en fin de matinée… Seul petit rayon de soleil : les "Merci infiniment" que la nonne Olivia Gesbert adresse à ses invités venus vendre leur salade du jour.

Journal de 12 h 30. Juliette Pietraszewski. Commémoration de la signature des Accords d'Evian. Ce long sujet est traité de façon assez particulière, sans guère d'analyse, juste un historique de Christian Chesnot. Est  cependant rappelée la controverse ridicule lancée par MLP et EZ (non cités) sur la date de commémoration choisie. Sans intérêt autre qu'électoral. Puis nous avons eu droit à un long développement sur le mauvais accueil des Harkis en France (90 000) avec une intervention très digne de descendante sur la citadelle de Doullens. Et c'est tout.

J'ai toujours considéré le traitement réservé aux Harkis par l'administration gaulliste et par l'Etat depuis lors comme une honte nationale. Néanmoins, peut-être eût-il été préférable de parler aussi et même d'abord du million de Français d'Algérie qui durent fuir précipitamment l'Algérie et que nous avons accueillis en quelques mois. Ils souffraient de cet exil forcé et précipité, beaucoup se retrouvaient sans rien, certains furent mal accueillis (en Corse par exemple).

Le biais anticolonialiste de FC lui interdit donc de rappeler un fait historique, lui fait considérer un million de compatriotes chassés comme un effet collatéral négligeable de la sanglante histoire des relations entre l'Algérie et la France.
En règle générale d'ailleurs, les médias qui se sont enfin réveillés sur le problème des Harkis après des décennies de silence ne traitent jamais de l'accueil des "pieds-noirs" laissant le sujet à l'extrême-droite.
Sur cette commémoration, FC n'a pas fait son travail. Une fois de plus.

Journal de 12 h 30.
Est interrogé Roland Marchal, chercheur à SciencesPo sur la situation au Tchad.
Il se lance à grande vitesse, sans la moindre respiration, dans un cours sur l'évolution classique de ce pays entre dictature et passage du pouvoir à l'héritier. Thomas Cluzel profite d'un reprise de souffle pour lui demander quelle est la position de la France. Marchal s'enflamme : le communiqué du quai d'Orsay était sec, ne proposait rien, ne rendait pas hommage aux victimes, indigne, etc. Le chercheur est véhément et ne le cache pas. C'est sa minute de politique à lui.

Il y a quelques semaines, on se demandait beaucoup, sur cette antenne sur ce que faisait la France néocolonialiste dans cette région du monde. Aujourd'hui, un invité lui reproche de ne pas intervenir assez ou pas du tout. Thomas Cluzel n'a rien à dire, ne relance pas, remercie l'intervenant.
Et voilà comment la situation au Tchad est retournée contre le gouvernement français qui a peut-être d'autres préoccupations immédiates.
C'était sur France Culture, l'esprit d'ouverture.

L'indignation chez France Cu, elle va dans le sens du vent, au fil de l'actu. Par exemple, prenons voulez-vous (mais rendons-la après) la coupe du monde de foot au Qatar. On pourrait penser que ce sujet devrait plus avoir sa place ailleurs que chez France Cu, mais comme cette radio n'a plus grand chose de culturelle (tout est culturel, surtout l'actu), et qu'elle ne cherche qu'à reprendre ce qui se fait à côté (France Inter, Info etc...) pour gratter des points d'audimat en enfilant comme des perles les sujets sociétaux (la sociologie, c'est de la culture, en fait, pour être honnête, c'est LA base de LA culture), eh bien nous avons une mixture indigeste d'émissions qui reprennent ce qu'on entend déjà ailleurs sur le Qatar.
Indigeste parce que vous n'apprenez rien de neuf, parce que l'angle d'approche est le même que sur France Inter ou Info, parce que, cerise on ze cake, les journalistes sont les mêmes.
Jean-Marc Four, pour prendre un exemple concret, est "éditorialiste international pour Radio France". Son travail pour France Inter et pour France Culture est le même. A quoi que ça sert ? A transformer un peu plus France Cu en radio généraliste, qui doublonne pour mieux audimater.
Actuellement, le scandale qu'il est convenu de développer pour bien être inzeouind de l'actu, c'est le Qatar.
Donc France Cu a développé un fil dentaire sur sa page, un fil dentaire spécial Qatar, pour y répéter ce que vous savez déjà, mais sur France Cu.

                    

Or, dans ce fil fourni, il manque un truc bidule. Une vidéo youtubesque datée du 26 septembre 2021, signée par l'éditorialiste sus-nommé, aidé de Franck Ballanger. Et "avec la collaboration de Éric Chaverou et de Chadi Romanos". Une super-production. Quatre journalistes pour signer un article aussi fouillé, ce n'est jamais de trop.

                                                                        

Pourquoi cette vidéo ne s'est pas attachée au fil dentaire de l'actu ?
Mystère...
2021... mon Dieu, c'était il y a une éternité...
Et attendez, il y a pire. Si l'on remonte dans l'Antiquité de l'actu, on découvre que l'attribution de la coupe au Qatar date de 2010 après J-C. Après J-C, vous rendez-vous compte ! Pincez-vous, vous ne rêvez pas !
Entre 2010 et 2022, il y avait la bagatelle de 12 ans pour jouer aux indignés, pour crier au scandale, pour monter un fil dentaire d'actu musclé pour dénoncer les injustices (pour la radio culturelle on fait comme d'hab' on laisse tomber).
Remontons dans le temps et relisons ce merveilleux article du 26 septembre 2021.
Son beau titre : "Diplomatie : le Qatar veut devenir le Genève du XXIe siècle"
Le contenu : une bonne tranche de pub pour le Qatar, où les scandales sont minimisés pour ne pas heurter les sensibilités les plus qatariennes.
Du boulot de journaliste d'investigation de qualité.

Dans ce riche exposé nous trouvons des passages exquis, à mi-chemin de la fiche Wikipédia et des dépliants touristiques.

"Le Qatar veut s’imposer comme un grand médiateur international, comme un symbole aussi de modernité au Moyen-Orient avec l’organisation de premières élections législatives en ce mois d’octobre. C’est un formidable rebond pour ce pays, un temps accusé de liens avec le terrorisme"

" Le Qatar, fort sa richesse gazière, veut donc se poser comme un acteur incontournable qui parle à tout le monde..."

"Le Qatar est le premier producteur au monde de gaz liquéfié
L’émirat a eu l’intelligence d’investir les milliers de milliards qui en découlent (...)
Il y a des zones d’ombre : les circuits de financement sont accusés d’opacité par certaines ONG. »
Ces zones d’ombres, relevées par « certaines » ONG, sont mentionnées avec beaucoup de délicatesse, et surtout, par la grâce de nos deux journalistes d’investigation, elles gardent toute leur saveur en restant bien dans l’ombre.

«  l’économie du Qatar repose aussi sur une forte communauté de travailleurs immigrés, notamment des Indiens, souvent exploités.
(...)  Amnesty International estime que des milliers de morts de travailleurs immigrés restent inexpliquées"
Les enquêteurs de l'extrême restent prudents en gardant leur distance avec Amnesty International et en laissant les morts dans la zone d'ombre afin de les protéger du soleil.
Pourquoi tous ces morts ? Et d'ailleurs, sont-ils vraiment morts ?
Explication des experts :
"Mais le Qatar dément, et il est certain en tout cas que cette immense richesse financière est utilisée avec un but précis : s’imposer comme un acteur international incontournable."
Il ne nous reste plus qu'à bomber le torse et à chanter fièrement l'hymne national du Qatar.

Maintenant, le droit au Qatar. Merci de ne pas rire.
"le droit au Qatar est d’abord celui d’une famille et d’une religion. (...)
L’organisation d’élections législatives pourrait, quand même, provoquer une petite ouverture du système. »
En usant du conditionnel, et en ajoutant le si subtil adjectif « petit » nos enquêteurs de l’extrême gardent un esprit critique aiguisé.

« Psychologie et sociologie 
Il y a d’abord, l’ambition forte de cette famille des Al Thani. Le père de l’émir actuel a, le premier, voulu développer l’influence mondiale du Qatar.
Son fils Tamim, aujourd’hui au pouvoir, a encore accéléré le processus.  (…) Il voit Doha comme un Genève du XXIe siècle. »
Le discours officiel de la famille Al Thani est relayé sans un milligramme de commentaire. Aucune analyse, rien. Tapis rouge pour Al Thani. Que d’émotion. Pleurez braves gens.

Mais attention ! Il reste la zone d’ombre !
« Mais cette ambition possède des facettes plus opaques.
...la nature exacte des relations avec les groupes islamistes, le Hamas, le Hezbollah le Front al-Nosr
...les circuits de financement de l’Islam en Occident, en France en particulier.
….comme la famille Al Thani contrôle tout le pouvoir...il est difficile de savoir ce que pense la population qatarienne. »
Mais nos journalistes ont enquêté : « le niveau de vie élevé garantit un certain soutien populaire ».
L’ajout de l’épithète « certain » est délicieux.
La synthèse, l’idée maîtresse de toute cette riche analyse :
« En résumé, le Qatar est animé d’une ambition forte, et il voit son nouveau rôle de médiateur comme une source de légitimité, voire une assurance vie. En plus de sa richesse qui autorise une diplomatie du carnet de chèques. »

Nous sommes très loin de

                    

...mais c’est parfaitement compréhensible. En 2021, nous n’étions pas encore en 2022.

France Cu, il est huit heures. Tougoudougoudoumtougoudougoudoum le journal de Clara Lecocq Réale tougoudoudoudoumdoumdoum...
Tout de suite, le petit plus de France Cu, la radio culturelle dézidés et tutta la macchina.
Le principal titre iz (de Clara Lecocq Réale) émeutes à Brasilia, les bolsonaristes ont pris d'assaut le Congrès, la Cour suprême & le palais présidentiel. Tout de suite, les infos, par Clara Lecocq Réale.
Et après la mise au point nécessaire de Clara Lecocq Réale, Guillaume-goooooood-mooooorniiiiiiiiiing-it's-eight-o'clooooock-wake-up-and-shake-your-booooooooooty- nous annonce le petit plus tant attendu, une chercheuse en ligne, oui madame, oui monsieur, historienne spécialiste du Brésil contemporain "nous l'interrogerons sur le sens à donner à cet évènement". Le sens vite nous sommes perdus on comprend que dalle au secours on va se planter dans un mur vite le sens !
Autres titres : procès Mediator, procès Danone, et l'actu tuturelle en fin de course, becauze France Cu is a cultural radio my dear. Alors a little bit of culture at la fin, it is au poil.
Arrêtons-nous sur le Brésil et le petit plus de France Cu, la réaction de la spécialiste qui doit donner un sens à tout ce bouzin.

Preumière partie, les infos par Clara Lecocq Réale :
- les lieux attaqués sont des lieux de pouvoir
- les bolsonaristes ont refusé le résultat de la présidentielle
- répétition des faits donnés dans le titre du journal de et par Clara Lecocq Réale
- cela a duré près de quatre heures avant que les forces de l'ordre les dégagent
- Récit de notre correspondante au Brésil, Anne Vigna.
Anne Vigna n'est pas que notre correspondante. Elle est la correspondante de deux points attention ça va être un peu long Marianne, L'Express, L'Architecture aujourd'hui, Le Monde des religions, Terra Economica, Le Monde diplomatique but also Le Soir of Bruxelles, La Tribune de Genève, Processo un periodico mexicano, Agencia Publica no Brasil, et maintenant les radios avec Radio France Corporation, la RTBF, et la RTS c'est logique, & Radio Formula au Brésil.
Donc notre correspondante est moultement partagée, ce qui permet d'avoir des points de vue multiples sur la situation dans la presse françouaize. De toute façon aucune importance, notre correspondante ne fait que rappeler les faits qui ont déjà été rappelés dans les titres du journal de Clara Lecocq Réale. La partie interprétation est laissée à la spécialiste en ligne.

Deuzième party :
Début du duplex, Clara Lecocq Réale (c'est son journal je rappelle) nous apprend que notre correspondante vient juste d'arriver à Brasilia. Donc, déduction mon cher Watson, déduction, elle n'était point virgule là lors des émeutes.
Notre correspondante : il est quatre heures du mamate, elle entend des sirènes de voitures de police qui passent à toute vitesse. La ville est déserte à cette heure, ce qui est surprenant vu l'heure, et comme c'est la fin des émeutes, eh bien la zone est rigoureusement interdite, il y a eu des arrestations mais on ne sait pas encore combien il est trop tôt.
Question de Clara Lecocq Réale : que s'est-il donc passé pour en arriver là où nous en sommes arrivés ?
Réponse de la correspondante, qui je rappelle n'était pas sur place, donc elle reprend les infos que n'importe quelle AFP connaît et mouline depuis des heures : à quinze heures les manifestants sont arrivés, ils sont allés là où il fallait pas aller et la police a juste sorti les pop-corns pour regarder cette nouvelle série Netflix. Et là, la situasse a "complétement dégénéré les manifestants ont rapidement détruit les barrières et ils ont envahi le bâtiment et ils ont saccagé à peu près tout à l'intérieur". Un compte-rendu essentiel à notre compréhension de la situation, plein de détails et surtout d'inédit.
Question de Clara Lecocq Réale : Mais ne pouvions-nous pas anticiper ce souk ?
Réponse : "il semble que les autorités de la capitale n'ont pas pris la dimension de c'qui s'passait", des mesures ont été prises... et "c'était sans doute une grave erreur". Fin du duplex du journal de Clara Lecocq Réale.

Troiziaime parti :
Maintenant, le plus France Cu, avec le sens à donner à cet évènement avec la spécialiste en ligne, mais qui, bien que spécialiste en ligne, réagit à chaud.
La réaction à chaud, que vous soyez spécialiste ou pas, n'est pas une idée de génie, à moins de vouloir faire comme les chaînes info et broyer du vide.
Sur France Cu, avant le vide, les sémillants présentateurs ont pour consigne de rappeler tous les titres de gloire des spécialistes afin d'en foutre plein les oreilles aux auditeurs éberlués qui doivent comprendre que dorénavant, il va falloir boire avec recueillement la bonne parole.
Donc... Clara Lecocq Réale, dans son journal, rappelle que la spécialiste en ligne est historienne du Brésil contemporain, professeure à l'Université Paris 8 Vincennes-Saint Denis et chercheuse à l'Institut Français de géopolitique.

L'analyse en ligne de la spécialiste.
Clara Lecocq Réale, maîtresse de son journal, souligne que le portrait robot du responsable ressemble beaucoup à Bolsonaro, bien qu'il ait condamné officiellement les méfaits.
L'analyse de l'historienne du Brésil contemporain, professeure à l'Université Paris 8 Vincennes-Saint Denis et chercheuse à l'Institut Français de géopolitique :
- bien sûr que le bolsonarisme est responsable, ce n'est pas une situation qui aurait dégénéré, c'est calculé de chez calculé, et comme il faut remplir, on va dire que c'est un complot, une conspiration, que ça a été organisé, qu'il y a eu quelqu'un qui a financé le complot de la conspiration organisée.
- Répétition de l'info donnée par Anne Vigna il y a quelques secondes dans le journal de Clara Lecocq Réale, "le responsable de la sécurité de l'ordre public à Brasilia est l'ancien ministre de l'intérieur & de la justice de Bolsonaro". L'homme actuellement en Floride est activement recherché par la justice brésilienne.
Clara Lecocq Réale reprend les rênes parce que c'est son journal : quel sens donner à tout ça ? Bon Dieu quel sens ?
L'auditeur souffre, il n'en peut plus, il veut du sens !
Réponse en ligne :
Le sens est "triple". Un triple sens. Presque un carrefour.
Il y a eu déjà des signes avant-coureurs en décembre, un attentat déjoué par exemple. Ce désordre "vise à provoquer le chaos". Les militaires n'ont pas suivi la voie du coup d’État, ce qui est finement observé. Mais quand même l'armée n'a pas trop bougé pendant l'émeute, "elle a guidé les émeutiers" et a "mis quatre heures à intervenir".
Si vous trouvez que l'on tourne en rond, que vous aviez déjà entendu ce truc avant, c'est normal, vous avez trouvé le sens. Le triple sens ne faisait qu'un.
Relance de Clara Lecocq Réale, l'illustre créatrice de cette œuvre immortelle sobrement intitulée "Le journal de Clara Lecocq Réale". Elle, donc, Clara Lecocq Réale, autrisse du "Journal de Clara Lecocq Réale", invite à faire le parallèle avec les émeutes du Capitole d'il y a deux ans à peu près pile, et que trumpistes et bolsonaristes sont unis par un amour partagé de la haine. Vous aviez déjà entendu ce parallèle ? Comme vous êtes forts ! Et surtout, vous n'êtes pas encore sourds.
Réponse en ligne de la spécialiste en ligne : oui, il y a parallélisme évident. La comparaison qui suit et clôt l'analyse à triple sens se divise en deux.
D'abord les points communs :
Les bolsonaristes admirent les trumpistes, et c'est presque la même date.
Et puis les différences :
Au Brésil l'ampleur est plus grande, mais il y a moins eu de victimes, car dimanche les bâtiments étaient vides.
Le sens à donner : cela reste "très fort".
Fin de l'analyse de l' historienne du Brésil contemporain, professeure à l'Université Paris 8 Vincennes-Saint Denis et chercheuse à l'Institut Français de géopolitique, en exclusivité pour le journal de Clara Lecocq Réale.

Journal de 18h du jeudi 16 février [son mp3="https://media.radiofrance-podcast.net/podcast09/10060-16.02.2023-ITEMA_23290071-2023C10069S0047-21.mp3" debut="14:40" fin="17:08"]

Extrait du rapport Alcens cité en ouverture des explications de Fiona Moghaddam :
« Malgré la passion de Sandrine Treiner pour la chaîne et sa vision pour l’éditorial les audiences ne se font ni au prix ni grâce à la souffrance au travail. »

Ce n’est pas la fin de la phrase qui est à discuter, encore qu’avec les auditeurs, le rapport autoritaire y était aussi, il n’y a qu’à prendre les interventions à l’antenne de la direction, dans les Matins ou dans les Rendez-vous de la médiatrice. Cet autoritarisme était largement palpable et a même été signalé moult fois ici-même, sur le ton de la dérision. Mais les auditeurs, eux, n’avaient pas affaire directement avec la direction...

Revenons plutôt au début de la phrase.
La « vision pour l’éditorial », il faut voir à quoi elle ressemble, elle est tout aussi pitoyable que la gestion du personnel. Le rapport, forcément, ne creuse pas le sujet, mais signale l’objectif ultime de cette vision : les audiences.
La vision était simple : tout pour l’audimat, quitte à achever France Culture en tant que radio culturelle pour en faire un mix de radio associative, de débats d’actu au format pompé sur les chaînes info, et d'entretiens promo (des publi-émissions), avec toujours moins de création et toujours plus de racolage.

Une vision qui continue de s’étaler généreusement dans les programmes. Une vision qui ne fera jamais l’objet d’un audit parce que le seul objectif fixé par Radio France à France Cu, c’est l’audimat. L’audimat à tout prix. Et plus ce prix est bas, plus il racole. Il racole des auditeurs, plus nombreux, qui croient écouter une radio culturelle alors qu’en réalité la chaîne propose le même contenu qu’ailleurs (on ne compte plus les doublons France Inter / France Cu). Le racolage via les cases docu fait appel au voyeurisme le plus éculé : témoignages intimes, sordides… Tout est bon pour l’audimat.  France Cu enrobe le tout dans de la sociologie, mais l’écoute ne trompe pas : même « trucs » que dans les docus que l’on peut voir sur certaines chaînes de la TNT, l’image en moins of course, avec nappage de musique qui fout la trouille, montage haché, propos anxiogènes, et quand ce n’est pas assez anxiogène on rajoute une couche de musique à trouille…

Cette semaine dans les programmes :
- Mauvais genre : avec Hélène Frappat, qui fait le tour de la grille pour vendre son livre, comme quoi il y a bien martelage de pub sur cette chaîne.
- Répliques & concordance des temps : deux scies avec migrants et méritocratie. Non pas que les sujets ne soient pas inintéressants, mais c'est du matraquage. Parce que les sujets sont vendeurs, clivants ? D'après vous...
L'invité de Concordance, J-P Demoule, est venu parler du même sujet dans Carbone 14 l'année dernière, et les deux sociologues (quelle surprise, des sociologues !) de Finkie ont été multi-invités (sur le même sujet doit-on préciser) sur France Cu ces derniers mois.
- Fictions : que des rediffusions.
- Après Mengele, les requins, avec comme accroche visuelle sur le site un  vulgaire pompage de l’affiche des Dents de la mer.
- Et, pêle-mêle, des émissions vulgaires dont voici les titres :
De FTX à la crise des cryptomonnaies : une faillite de la croyance ?
Vivons-nous la fin de la conversation ?
Pourquoi Gaston Bachelard aujourd'hui ?
Agar Agar : "Musique et jeu vidéo sont des arts de l’espace"
Qu'est-ce qu'une rencontre amoureuse aujourd'hui ?
“Le Dit du Genji” : quel est le premier roman de l’histoire (selon Google) ?
Y a-t-il un âge pour faire de la politique ?
Julie Doucet : "J’étais comme une bouteille d’encre renversée sur le papier"
Seynabou Sonko :"J’ai l’impression de travailler en partenariat avec le silence et le temps"
Grabuge à l’Assemblée : une poussée de fièvre démocratique ?
L'amour est-il asocial ?
La Grande Sophie fait le pont en chansons entre les époques
L’amour est-il toujours décevant ?
Travail, bien-être, planète
Pourquoi l’affaire Pierre Palmade suscite-t-elle autant de commentaires ?
Retraites, inégalités, climat… Faut-il taxer les ultra-riches et les super-profits ?
ChatGPT, Bard ou Ernie : quelle IA va l’emporter ?
Bourgeoise de mère en fille
ChatGPT, l'école doit-elle revoir sa copie ?
Jeanne Candel : "Quand je crée, j’aime le risque vertigineux d’aller vers ce que je ne connais pas"
Etc... etc...

Il faut atteindre le quota obligatoire de moulinades sur la biodiversité, le féminisme radical (« total » nous dit Didine inspirée) ou l’anticapitalisme.
Ne pas s'étonner si un beau jour, peut-être pas si lointain, la direction de Radio France décide de supprimer France Cu, ou de la fusionner avec France Musique. France Cu l'aura bien cherché.
A force de faire pareil qu'ailleurs, de ne plus être une radio culturelle, elle devient totalement dispensable.