Avenir de la RNT : le rapport d’étape de David KesslerLe 27 mai dernier, le Premier ministre François Fillon a confié à David Kessler, conseiller pour la culture du maire de Paris Bertrand Delanoë, une mission sur l’avenir de la RNT, avec pour objectif de « définir les conditions d'un éventuel lancement de la Radio Numérique Terrestre »[+] NoteLa Radio Numérique Terrestre, Note d’Etape par David Kessler, page 1 X [1]. Cette demande fait suite à la remise de deux rapports, l’un établi par l’inspecteur général des affaires culturelles Emmanuel Hamelin et l’autre par l’ancien président de France Télévisions Marc Tessier, qui s’attachaient exclusivement à la question du financement de la RNT.
Dans son rapport d’étape remis au ministre le 23 octobre, l’ancien directeur de France Culture commence par dresser un état des lieux des positions prises par les acteurs concernés par le sujet. Il fait apparaître de fortes dissensions au sein des radios : si les radios publiques, régionales et associatives sont généralement favorables au projet, les radios privées nationales y sont majoritairement opposées car elles jugent la RNT non profitable. Quant aux diffuseurs et aux fabricants, ils sont intéressés mais ont des réticences liées au coût de mise en place de la nouvelle norme de diffusion et des récepteurs RNT.
Plus largement, le débat « pour ou contre la RNT » se fonde sur des enjeux majeurs. Outre le coût supplémentaire difficile à supporter par les radios, l’avantage pour le consommateur est moins évident que celui offert par la TNT : l’offre de radios FM est déjà très vaste, alors que la TNT a permis aux 75% de téléspectateurs français qui n’avaient accès qu’à 5 chaînes d’en recevoir 15 nouvelles, et ce sans changer de poste. La RNT, quant à elle, suppose le renouvellement des 150 millions de récepteurs FM en récepteurs RNT. D’ailleurs, les principaux pays européens ayant lancé la RNT (Belgique, Espagne, Danemark, Allemagne…) n’ont pas réussi à l’imposer comme modèle dominant face à l’analogique.
Cependant, la RNT offrirait un panel de radios élargi, notamment en province, et donnerait aux radios régionales la possibilité d’étendre leur zone de diffusion. Les récepteurs RNT seraient simples à utiliser et auraient de nouvelles fonctionnalités (fonction pause, retour en arrière…) tout en garantissant l’anonymat des auditeurs. Enfin, la radio IP, évoquée comme solution alternative dans un contexte de multiplication des Web radios, a pour inconvénient de nécessiter un accès réseau haut débit payant, de ne pas être accessible en continu sur le territoire et d’avoir un modèle économique encore fragile.
Ainsi, si le chemin du lancement de la RNT est parsemé d’embûches, il pourrait mener vers un modèle aux bénéfices appréciables. Néanmoins, des conditions sont nécessaires pour que la mise en œuvre de la RNT soit envisageable : elle doit d’abord conquérir son public, ce qui passe par la vente d’appareils de réception aux prix attractifs et incorporés dans les véhicules individuels ; par la garantie d’une qualité sonore au moins égale à celle de la FM ; par la mise à disposition d’une offre de radios enrichie. D’autre part, il faut réussir à diminuer le coût de diffusion de la RNT pour chaque radio (aujourd’hui de l'ordre de 3 à 4 millions d'euros par an et par radio) : cela pourrait passer par la mutualisation des moyens des radios émises par un même multiplexe[+] NoteA l’initiative du GRAM, le premier pylône destiné à la diffusion de la RNT a été installé en mai 2010 à Nantes, et permet la diffusion de plusieurs chaînes radios via un multiplexe (
www.radioactu.com)X [2]. Enfin, l’État doit participer au financement du projet sous trois formes : «[3] participation au développement de la radio publique, participation au lancement public, participation à l'aide aux radios les plus fragiles » [+] NoteLa Radio Numérique Terrestre, Note d’Etape par David Kessler, page 20 X [4].
En conclusion de son rapport, David Kessler lance un appel aux acteurs du secteur : l’État, le CSA, les fabricants, les radios et les diffuseurs devront lui communiquer leur position sur les conditions dégagées, afin qu’il puisse juger s’il est effectivement possible de les réunir ou non. Ses conclusions définitives sont attendues d’ici la fin de l’année.
Céline ALARÇON in INAglobal, 26 nov 2010[img][/img]