Forum des auditeurs passionnés et critiques de France Culture

Une émission d'une érudition pas possible menée à fond de train par Ludovic Orlando en duplex avec Vincent Charpentier : La conquête du cheval : une révolution ! Samedi 20 mai 2023.  

La page descriptive, richement illustrée, réorganise le propos de l'archéologue en un résumé instructif. Un OVNI dans la grille de France Culture.

Désormais, plus aucun cheval ne serait sauvage. Pour autant, où et dans quel contexte se déroula sa première domestication ? Une enquête à la croisée de l’archéologie, la paléo-génomique et l’histoire des peuples…
Avec

   Ludovic Orlando Directeur de recherche en archéologie moléculaire au CNRS, spécialiste de l'étude des ADN anciens, et directeur du Centre d'anthropobiologie et de génomique de Toulouse (CNRS et Université de Toulouse III Paul Sabatier).

La conquête du cheval est une révolution, conquête semble-t-il tardive, mais aux résultats immédiats. Dès 1960, dans son extraordinaire roman anthropologique, « Pourquoi j’ai mangé mon père », Roy Lewis s’interrogeait sur la domestication du cheval, du moins sur l’ancêtre du cheval (l’hipparion), par un jeune pithécanthrope, dont la conclusion se révèlera par un cuisant échec. La question de la domestication du cheval a suscité nombre d’articles, de suppositions. Si, dès le Paléolithique, il tient un rôle central dans l’art de nos cavernes (notamment dans la grotte de Pech Merle, Lot), la toute première domestication s’opère loin de l’Europe occidentale (...).

4e de couverture du livre paru en mars 2023 : "La Conquête du cheval".

Le cheval a été domestiqué il y a 4 200 ans dans les steppes du Nord-Caucase. Ce ne fut ni plus ni moins qu’une révolution annonçant une ère nouvelle : celle de la vitesse. Dès lors, « le monde lui-même parut plus petit que jamais ». L. O.

Des chevaux rupestres aux champions des champs de courses, c’est l’histoire du cheval et du long compagnonnage que nous avons entretenu avec lui que nous conte ici Ludovic Orlando.
Son livre est une passionnante enquête généalogique, mêlant génomique de pointe, archéologie, histoire des peuples, des langues et des migrations.
Qu’ils soient chevaux de Botaï ou de Przewalski, pur-sang anglais ou arabes, mules ou mulets, destriers médiévaux ou encore montures des Vikings et de Gengis Khan, avec la génétique, nous savons désormais à quoi ils ressemblaient et d’où ils venaient.

Un nouveau numéro de Carbone 14 qui vaut le coup d'oreille : Quand les rois de France barraient la route aux Vikings Samedi 27 mai 2023.

Avec
• Cyril Marcigny Archéologue et protohistorien à l'Inrap
• Vincent Carpentier Archéologue et chercheur à l'Inrap

La période d'histoire étudiée s'étend sur plus de deux cents ans. En mois de 30 minutes, sous la houlette de l'indispensable Vincent Charpentier, les deux spécialistes se passent le relais pour évoquer les recherches sur le site. C'est clair et précis. Mission culturelle accomplie ! Quelle autre émission de la grille de France Culture peut revendiquer la même rigueur ?

Page illustrée synthétisant l'entretien :

Les fouilles de l’enceinte d’Alizay, sur de la Seine normande, mettent en lumière un exceptionnel ouvrage défensif d’âge viking.

Les raids vikings
Les premières incursions vikings débutent en 793 sur les côtes anglaises. Après Noirmoutier en 819, ceux-ci explorent l’embouchure de la Seine. En 841, ils incendient Rouen, et de 120 navires assiègent Paris en 845, puis en 851-852. Le plus spectaculaire des raids vikings se déroule à Paris entre 885 et 887.

Face à la menace, les royaumes occidentaux, dont les francs, se voient dans la contrainte d’indemniser les vikings, au travers du "Dangeld", le tribut aux Danois. Toutefois, cette stratégie s’avère une catastrophe, suscitant la venue de plus en plus de prédateurs. (...)

Charles le chauve met en place, en 860, une nouvelle stratégie : barrer la Seine à Pont-de-L’Arche, la Loire au Pont de Cé, pour mieux contrecarrer le fléau scandinave. (...)

Pont-de-l’Arche

Le traité de Saint-Clair-sur-Epte, entre Charles III le simple et Rollon, achève, en 911, cet épisode de raids et de pillages et constitue la base de la fondation de la Normandie.
Ainsi, les vikings, désormais chrétiens, s’intégreront. Pour autant, le pont et ses enceintes conserveront leur rôle stratégique au cours des siècles et lors des phases d’occupation militaire de la forteresse qui se succèderont du XIIe au XVe siècles. (...)

Pourquoi suivre l'émission Le mystère du Mormont, espace sacré des Helvètes ? alors que son sujet n’intéresse pas le rédacteur de ce post ? Tout simplement parce que l'on est pris par l'érudition et la rigueur des deux intervenants, les parfaites relances de Vincent Charpentier, le rythme. Voilà comment l'art radiophonique (un présentateur idoine, des invités précis et passionnés par leur sujet, un domaine inconnu) capte l'attention de l'auditeur et suscite sa curiosité : une radio de l'offre surprenante et non de la demande (de toujours le même).

Ce numéro du 3 juin 2023 est donc à conseiller tant au profane qu'au connaisseur. Page de présentation synthétique fort instructive. Merci Vincent Charpentier et l'INRAP !

C’est un lieu majestueux au sommet d’un massif suisse, au cœur du canton de Vaud, et surtout un lieu énigmatique qui demeure sans équivalent en Europe celtique.

Vincent Charpentier reçoit Lionel Pernet, archéologue, spécialiste de l’âge de fer, directeur du musée cantonal d'archéologie et d'histoire de Lausanne, et Claudia Nitu, archéologue, responsable des fouilles de Mormont, membre de la société suisse d'archéologie Archéodunum.

Occupé au tournant des 2e et 1er siècles avant notre ère, le Mormont soulève quantité de questions sur son statut, sa fonction, les pratiques religieuses et les rites qui s’y sont déroulés.
Entre 110 et 80 av. J.-C., des centaines de personnes sont probablement montées sur la colline du Mormont pour y célébrer des moments importants de la vie communautaire mais aussi y pratiquer des rites atroces.
Le mystère du Mormont

Découvert en 2006, à mi-distance entre les lacs Léman et de Neuchâtel, le site a fait l’objet de plus de dix années de recherches, lors de fouilles préventives sur de vastes surfaces menacées par l’exploitation d’une carrière de ciment.

Le site se compose de 250 fosses, certaines profondes de cinq mètres, dans lesquelles ont été disposés des milliers de restes de repas, ainsi que des dépôts rituels complexes impliquant non seulement des objets encore fonctionnels, mais aussi des animaux entiers et des ossements humains.

La population qui fréquentait le Mormont est variée, on le voit grâce à la diversité des objets mis au jour dans les fosses, ainsi qu’aux restes humains d’une cinquantaine de personnes. Femmes, hommes, enfants et jeunes sont impliqués, mais aussi des esclaves ou des prisonniers, puisque des entraves de cou ont été mises au jour. Les quelques restes d’armement indiquent que des guerriers ont participé aux rituels. Parmi eux, figure une exceptionnelle cotte de mailles (...).

Aux origines du Japon le samedi 14 octobre 2023, un numéro passionnant de Carbone 14 qui fait la synthèse d'au moins une quinzaine d'années de recherches, comme le montrent les émissions de 2010 et 2018 données en lien sur la page informative du descriptif.

Il est par ailleurs intéressant au fil des trois émissions écoutées à rebours de noter les changements de voix et d'assurance au micro en l'espace de 14 ans. On notera aussi l'imprégnation idéologique surgissant en 2023, soit celle de Vincent Charpentier, inconsciente ou volontaire pour obéir au paradigme de la station, soit celle des chercheurs qui ont voulu appuyer sur l'exploitation d'une classe sociale. Laurent Nespoulous, questionné par Charpentier, ne s'y attarde d'ailleurs pas.

L’archéologie japonaise révèle un lointain passé fort original…
Avec
• Laurent Nespoulous Archéologue, chargé de la direction du département d'études japonaises à l’Institut NAtional des Langues et Civilisations Orientales (INALCO).
Le Japon possède actuellement bien plus d’archéologues que la France et l’ensemble des nations : il est intéressant de voir ce pays où la tradition semble très prégnante, accéder à cet éclairage, et ainsi, au travers de l’archéologie, de remodeler la manière dont il peut se représenter sa propre histoire.

Présentation aux éditions Belin de la synthèse :  Le Japon Des chasseurs-cueilleurs à Heian (- 36 000 à l'an mille) Coll. Mondes anciens.





Jōmon, aux origines de la société japonaise Dimanche 25 novembre 2018

Société préhistorique japonaise perdurant quelque dix millénaires, la culture Jōmon constitue un cas très particulier pour les archéologues, puisqu’elle semble avoir « tracé son propre chemin, au rebours de toute autre civilisation, notamment occidentale » (le croissant fertile).
Avec
• Laurent Nespoulous Archéologue, chargé de la direction du département d'études japonaises à l’Institut NAtional des Langues et Civilisations Orientales (INALCO).

Le Japon et le contre-exemple Jômon, un monde à l'envers Mercredi 26 mai 2010

Avec
• Laurent Nespoulous Archéologue, chargé de la direction du département d'études japonaises à l’Institut NAtional des Langues et Civilisations Orientales (INALCO).
Il y a 12 000 ans émerge dans le Japon préhistorique une culture très particulière : le Jômon. Cette société qui se développe sur environ 10 000 ans connait la poterie bien avant l’agriculture, voire même la sédentarisation. Il s’agit donc d’un modèle fondamentalement différent de ceux qui apparaissent sur le continent asiatique. Le Jômon ne doit-il pas être considéré comme une société contre le Néolithique, contre la néolitisation ?

Sommes-nous sur France Culture ? Oui. Sommes-nous dans une production de France Culture ? Pas vraiment. En réalité Carbone 14 est un podcast de l'Inrap mis en ligne par la station publique, un partenariat public-public, en quelque sorte, l’Institut national de recherches archéologiques préventives étant un établissement public.

On retrouve dans Carbone 14 toute la rigueur scientifique de l'Inrap, mâtinée ces dernières années de tendances à la mode sous prétexte d'"inclusivité".

Le numéro du 3 février dernier, accompagné d'une riche page descriptive, était fort intéressant : L’art rupestre sublimé.

Le cadre : l'exposition Préhistomania Du 17 novembre 2023 au 20 mai 2024 au Musée de l'Homme.



Très belle photo de l'enregistrement de l'émission par Sandrine Chapron :


La lecture du descriptif et celle de la présentation de l'exposition avec ses liens sont de véritables plongées dans la connaissance.

En 28 minutes il est difficile de faire mieux que cette mise en bouche radiophonique de l'exposition, quoique pas impossible. Par exemple, ce qui occupe une ligne sur le site du Musée de l'Homme "Une cinquantaine de relevés (...) vous emmènent sur les traces des releveurs... et des releveuses, les femmes étant nombreuses, particulièrement au sein des expéditions de l'ethnologue Leo Frobenius" devient durant 20% de l'émission : et les femmes alors ? La préoccupation féministe franceculturienne aurait pu être sobrement traitée comme au Musée de l'Homme et davantage de temps consacré aux questions scientifiques. Mais peut-être Vincent Charpentier a-t-il été briefé auparavant par la responsable de communication (équipe presse du MdH : 4 femmes) et a-t-il visionné la mauvaise vidéo de 30 secondes de présentation de l'exposition ?

À propos de féminisme ou de représentation paritaire, le Musée de l'Homme a fait une encoche dans son "o" qui au début peut donner l'impression d'un + mais qui observé horizontalement renvoie au symbole

ou, si l'on préfère, une personne allongée (la nouvelle langue préfère : "un humain" ou "sapiens" tout court, "homo" étant apparemment trop marqué...). Bien pensé en tous les cas.

En plus d’un siècle, les préhistoriens ont entrepris quantités de relevés, véritables œuvres d’art, issus des parois de grottes et d’abris-sous-roche. Leurs noms : Henri Breuil, mais aussi Henri Lhote ou encore Léo Frobenius.
Avec
• Jean-Loïc Le Quellec Anthropologue, directeur de recherche émérite au CNRS, spécialiste des images rupestres
• Jean-Louis Georget Professeur en études germaniques à l'Université Sorbonne Nouvelle, directeur du CEREG et chercheur associé à l'EHESS (Centre Georg Simmel).