Dans ce premier billet, je n'avais pas signalé la manière dont
Renaud Machart, grand imitateur, dit le titre de son émission "Comment se ficher le bourdon une veille de réveillon…" : [son mp3="https://media.radiofrance-podcast.net/podcast09/14614-30.12.2017-ITEMA_21541060-0.mp3" debut="01:06" fin="01:14"] À comparer avec le début du sketch de
Raymond Devos,
Les vacances et la manière dont ce dernier dit "
Oui, c'est dernier temps, ç'a n'allait pas ! J'sais pas, J'avais le bourdon".
Dans le deuxième billet consacré à cette émission (cf. post ci-dessus), je proposais d'écouter les pièces de Hindemith que Renaud Machart aurait sans doute qualifiées au sens propre de "lamentables" (où l'on se lamente) il y a 10, 15 et 20 ans, dans
Chambre d'échos,
Paysages composés,
Le Matin des musiciens, etc.
Renaud Machart est un musicien-producteur érudit, sensible, impertinent, maître de la parole radiophonique, dont les intérêts vont de la chanson de cabaret new-yorkais (inoubliables prises de concert avec
Dawn Upshaw) à la musique mélancolique anglaise (
madrigalistes du XVIIe siècle avec
John Dowland, Flow my tears) en passant par la musique française du tournant du XXe siècle, comme celle de
Charles Koechlin auquel il a souvent rendu hommage, notamment dans une série du
Mitan des Musiciens de septembre 2014
Charles Koechlin (1/5) : Ombres et lumière (1).
Pour toute émission radiophonique sur
Charles Koechlin (stations françaises, suisses et belges), voir le spécialiste incontesté du forum sur le sujet,
Fred de Rouen, ici salué chaleureusement, pour qui j'extrais le passage ci-dessous de l'émission du 30 décembre.
En effet, dans l'émission à tonalité mélancolique de la veille du réveillon, Renaud Machart enchaînait Koechlin à Hindemith avec une pièce qu'il qualifie d'extraordinaire :
Chant funèbre à la mémoire des jeunes femmes défuntes, op. 37 1902-07, orch. 1908*, la voici annoncée et diffusée [son mp3="https://media.radiofrance-podcast.net/podcast09/14614-30.12.2017-ITEMA_21541060-0.mp3" debut="72:53" fin="88:10"]
Renaud Machart est et restera un des grands passeurs de France Musique, celui qui sait mettre en condition l'auditeur pour lui donner la curiosité d'écouter de la musique qui sort de l'ordinaire. Et il peut se permettre de finir une émission sur le ton de la confidence et de l'humour, comme en cette fin 2017 (avant l'étiquette sonore mal venue) : [son mp3="https://media.radiofrance-podcast.net/podcast09/14614-30.12.2017-ITEMA_21541060-0.mp3" debut="117:38" fin="118:52"]
* VIERGES MORTES
Œillets blancs, lilas blancs et violettes blanches :
Et le char sépulcral s’en va vers les caveaux,
Sinistre et chaste, au pas rythmique des chevaux
Qui bercent les grands draps déployés sur leurs hanches.
Ô vierges ! D’autres Mais fleuriront les pervenches,
Les baisers écloront dans les Avrils nouveaux
Et la brise des Juins grisera les cerveaux :
Mais vos corps sans désirs dormiront sous les planches.
Toujours ! Et c’est fini sans être commencé !
Votre avenir d’hier a mille ans de passé :
Vos cœurs immaculés sont morts avant de naître.
Lilas blancs, œillets blancs... Vous vous en retournez
Vers l’immense sommeil des choses, sans connaître
Le seul bien que la vie accorde à ses damnés !
Music from Enchanted Gardens :
The « Chant funèbre à la mémoire des jeunes femmes défuntes » op. 37 (1902-08)
for mixed double chorus, organ and orchestra uses the Latin words of the Requiem.
Koechlin takes the programmatic background from the poem »Vierges mortes« by
Haraucourt which, however, is not set to music in the composition. In an
unpublished commentary, Koechlin writes: »[It is] a kind of Requiem, an evocation
of the poem by Haraucourt. My composition is a cry of pity and revolt, not only for
the young girls who must die before they have seen their dreams come true, but
especially for those girls torn by fate from the midst of their lives. This symphonic
poem translates the feelings, evokes the visions suggested to us by such a cruel
and especially unjust loss: the death of a burgeoning soul full of hope and beauty.
First there is the funeral procession described by Haraucourt... Then, as if in a
country chapel with shrill bells, in an atmosphere heavy with sighs and flowers,
after a long plaint played by the orchestra, the voice of the choirs rises up:
›Requiem aeternam dona eis…‹. We are reminded – without being able to resign
ourselves to the truth, almost without being able to believe it – we think of this life
that has been extinguished in the midst of so many promises. But then a brusque
outbreak in the orchestra answers us with the reality of death. In a long crescendo
of the orchestra, choir and organ (›Ad te omnis caro veniat...‹), the voices proclaim
the irreversible final destiny of the body; and they also speak of the eternal light
promised in exchange. The song fades into the distance, the pale voices of the
flutes recall the funeral march from the beginning. As if floating above a tender
memory, comes the apparition of far-off voices: dejected and disconsolate
appeasement in which all thought ceases.«
Otfrid Nies (Charles Koechlin Archive, Kassel)
L'original en allemand :
Musik aus verzauberten Gärten