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Le programme de nuit, îlot de culture (II)    Page 43 sur 53

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Curly 


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Atelier de création radiophonique - Chili (1976) par Andrew Orr et Carlos Teles - Ven 09 Sep 2022, 19:31

Atelier de création radiophonique - Chili (1976) par Andrew Orr et Carlos Teles
- Les yeux de cuivre et de salpêtre, Chili 1 (21-11-1976)
- La chasse aux frères est ouverte, Chili 2 (28-11-1976)
Groupe de réalisation : Janine Antoine, Gérard Brodin, Monique Burguière, Claude Giovannetti, Tricou Maciel, Sylvie Marion, Yann Paranthoën, Viviane Van Den Broeck, et Huguette Faget (partie 2 seulement)

Cet ACR en deux volets est à mi-chemin du documentaire, et de la création purement artistique. L'entrelacement des lectures, des entretiens et des archives, virtuose, peut s'admirer en tant que tel, indépendamment de l'aspect documentaire de l'émission.
Le centre de l'émission est la mise en place de la dictature au Chili en septembre 1973, tout converge vers cet évènement tragique.
Dans la première partie, on remonte plus de cent ans en arrière, avec notamment l'histoire du syndicalisme, racontée par un de ses représentants. Dans ce long entretien, l'équipe de réalisation résout le problème du surtitrage. Car en effet, il est difficile souvent de rendre vivante une voix qui non seulement parle une autre langue, mais aussi qui passe en fond sonore, couverte par la voix du traducteur. L'enregistrement de l'entretien passe alternativement en avant ou en arrière plan, et les propos ne sont pas traduits par une voix neutre (ce n'est pas en direct, il est possible d'aller plus loin) mais joués par Pierre Santini qui par moments reste seul, la voix espagnole ayant totalement été coupée. Le procédé ne fonctionne qu'à condition que l'acteur n'en fasse pas trop.
Certaines voix se retrouvent dans les deux parties, notamment un ancien diplomate chilien, sans doute réfugié en France, comme plusieurs autres voix entendues dans l'émission, ou Julio Cortázar, qui lit les violations des droits humains du régime dictatorial.
La première partie revient aussi longuement sur le rôle du gouvernement américain dans la mise en place d'un régime autoritaire : archive d'une conférence de presse de Gérald Ford (la phrase clé répétée comme un leitmotiv), lecture de rapports confidentiels de la CIA.
L'entretien avec un militant d'extrême droite est particulièrement glaçant. Il nie dans un premier temps vouloir tuer Salvador Allende. Il explique ensuite qu'il souhaite vivement organiser son assassinat.
Dans le début de la seconde partie, nous arrivons au coup d’État, la prise de la Moneda. L'émission utilise des enregistrements effectués sur place, notamment les funérailles de Pablo Neruda (on peut entendre le poète dans la première partie), mais aussi des émissions de la radio chilienne, et un enregistrement pirate effectué dans un camp de prisonniers.
Moments très forts, d'anciens prisonniers racontent les tortures qu'ils ont subies.
A la fin, tirade du diplomate entendu déjà dans la première partie, qui revient sur la stratégie de répression de la junte, et nous livre une conclusion teintée d'optimisme : "ils ne se trompent pas quand ils répriment, mais ils se trompent quand ils croient que la répression est perpétuelle".
Elle ne fut pas perpétuelle, mais, en 1976, il lui restait encore une dizaine d'années devant elle.

Cet ACR est un même temps une création radiophonique riche et un document historique précieux.

Curly 

Curly

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Bonjour Monsieur Rousseau (1950) / Bonjour Monsieur Gogol (1952) - Le doublage au cinéma (1986) - Mar 20 Sep 2022, 19:43

Les deux émissions suivantes retracent la vie et l’œuvre du Douanier Rousseau et de Nicolas Gogol.
Rien que de très classique en apparence. Or, Alain Trutat et Georges Charbonnier ont élaboré leurs émissions de manière originale : mélange d'éléments forts différents pour arriver à un tout homogène, et richement élaboré, malgré la simplicité de leur construction (la naissance à la mort).
Nous pouvons entendre : récit interprété par un ou plusieurs acteurs, commentaires du producteur, reconstitution de moments de la vie de l'artiste, extraits de pièces de théâtre, lectures d'extraits, chansons (Rousseau s'est illustré dans le genre, et ce ne fut pas une grande réussite, l'émission en parle avec humour), brefs extraits de films, commentaires de spécialistes (commentaires la plupart du temps écrits, comme souvent dans les années 50).
Le tout assemblé avec art.
Ces émissions sont marquées par le temps, et c'est tout à fait normal, mais formellement, elle sont toujours aussi novatrices, parce que soixante dix ans plus tard la radio a, au lieu de continuer à innover, choisi de régresser.
En une heure trois quarts environ, l'auditeur a un aperçu consistant d'une œuvre, d'un artiste. Les acteurs sont excellents, le montage, qui mêle les différents éléments cités plus haut, donne une grande densité à l'ensemble.

Pour le Douanier Rousseau, nous pouvons entendre des témoignages de personnalités l'ayant connu, comme, en guise de long final, le récit d'un certain René Rousseau (pas la même famille attention) qui raconte la fin de vie et le pillage de l'atelier, abordé aussi par Blaise Cendrars plus tôt.
Le Douanier n'a pas donné que dans la peinture. Nous pouvons entendre un extrait d'une de ses pièces de théâtre, dont le titre dit déjà tout de son inspiration : « La vengeance d'une orpheline russe ».
Il écrivit une autre pièce, « Une Visite à l'Exposition de 1889 », que Jean-Christophe Averty réalisa pour la tévé en 1983.

A chaque fois, l'artiste prend la voix d'un acteur : Pierre Larquey pour Rousseau, et Alain Cuny pour Gogol.

Il existe une troisième émission, elle aussi diffusée dans les Nuits, mais en 2007, donc indisponible :  « Bonjour Alfred Jarry » (15-12-1951). Elle a été éditée en un coffret de deux CD par André Dimanche en 1999, accompagnée d'un livre proposant le découpage de l'émission.

Bonjour Monsieur Rousseau (02/09/1950 Chaîne Nationale)
par Georges Charbonnier et Alain Trutat
réalisation Alain Trutat
Générique
Pierre Larquey : Le Douanier Rousseau
avec Denise Bonnal, Georges Charbonnier, Henri Crémieux, Ginette Franck, Jacqueline Harpet, Pierre Leproux, Claire Maffei, Jean Topart, Colette Mars.
Sur les chanteurs amateurs : Aimé Doniat
Accompagnement de piano, violon et mandoline sous la direction de Nicole Geissweiller
Avec les témoignages de Marie Laurencin, Blaise Cendrars, André Dunoyer de Segonzac et Luc Durtain
Précisions historiques : Lo Duca
Analyse graphologique : Alfred Nahon
Lectures musicales : Albert Cabi
Souvenirs intimes de René Rousseau père (sans lien avec le Douanier)


Bonjour Monsieur Gogol (05/04/1952 Chaîne Nationale)
par Georges Charbonnier
réalisation Gérard Herzog
Alain Cuny : Nicolas Gogol
Extr. des « Âmes mortes » avec Jean Marchat, du « Revizor » avec Louis Seigner, François Chaumette, de « Ménage d'autrefois » avec Raymone, Pierre Larquey, de « La brouille des deux Ivan » avec Jean Temerson, Jacques Hilling, du « Journal d'un fou » avec Michel Vitold
avec aussi Ulrich Guttinguer, Jacques Dufilho, Arlette Thomas, Rita Reciot, Albert Gercourt, Hubert Prelier, Pierre Olivier, Nelly Benedetti, Lily Siou, Pierre Reynal, Yves Penaud, André Lorière, Denise Bonal, Jacqueline Harpet, Jeanne Lion, Juliette Jérôme, Gilberte Géniat,
et la participation de Véra Volmane

Marguerite Moreno et Charles Dullin dans l'adaptation par Pierre Brive des « Âmes mortes », extrait du feuilleton radiophonique réalisé par Maurice Cazeneuve en mai/juin 1947

Extr. du film « Tarass Boulba » de Alexis Granowsky avec Jean-Pierre Aumont et Harry Baur (1936)

Témoignages de Elsa Triolet, André Barsacq, Marc Chagall, Jean Maquet, Henri Troyat

Chants ukrainiens par Grigori Shoumara [?]
Prise de son : Jean Jusforg
Assistante de réalisation : Nicole Geissweiller




Mardis du cinéma - Je n'ai jamais rencontré de cow-boy américain : Le doublage au cinéma (02/12/1986)
par Catherine Ardent
groupe de réalisation : Michel Creis, Claude Giovannetti


Dire que c'est un très bon « Mardis du cinéma » ne serait pas exagéré. Au début, Kirk Douglas, alias Roger Rudel, dans « El Perdido » de R. Aldrich, puis deux témoignages courts : ceux de Michel Chion, qui a beaucoup travaillé sur le son au cinéma, en plus d'être un compositeur de musique dite concrète (membre du GRM dans les années 70), et de Roger Rudel, star du doublage mais qui finalement a peu à dire à son sujet.
On peut entendre aussi Jean Topart à la fin, qui cabotine autour de son doublage de F. Murray Abraham dans « Amadeus »  de Forman,  Anouk Ferjac et Nathalie Nerval qui parlent de leur travail sur un film de Bergman, et Linette Lemercier, spécialisée dans les voix d'enfants, au cinéma, à la télévision (Rintintin) et à la radio.
Le meilleur, et ce sera la partie la plus développée de l'émission, nous l'aurons avec Jacqueline Porel, qui a non seulement eu une grande carrière de doubleuse, mais a aussi dirigé un nombre incalculable de doublages. Elle explique le travail des acteurs, et l'aspect virtuose d'un doublage bien fait.
Il est question aussi du sous-titrage. Bien sûr, l'avantage d'entendre les vraies voix des acteurs n'est pas négligeable. Encore que pour le cinéma italien, qui n'utilisait jamais le son direct, ce soit en grande partie faux.
Mais le sous-titrage mange une partie de l'image, ce qui pour certains films peut-être un vrai gâchis. Sans compter, Anouk Ferjac et Nathalie Nerval le soulignent, que la richesse de certains dialogues disparait dans le sous-titre, qui doit ne pas être trop long afin de pouvoir être lu le plus rapidement possible par le spectateur. Il est en ce cas préférable d'avoir des dialogues traduits et doublés, plutôt que des bouts de phrases qui font passer à la trappe une partie des intentions de l'auteur.

Curly 

Curly

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Saint François d'Assise (1982) - Le double (1964) - Dim 25 Sep 2022, 17:01

Les samedis de France Culture - Saint François d'Assise ou la pauvreté créatrice (06/11/1982)
par Christine Goémé
avec André Vauchez, Henri-Jacques Sticker, Père Eloi Leclerc, Jacqueline Risset, Jacques Paul, Marc Devade, Jacques Henric, Jean Colet, Carl de Nys et Olivier Messiaen
réalisation Jacques Taroni

Christine Goémé, qui apparaît sur France Culture au milieu des années 70, qui devint par la suite une prolifique productrice sur la chaîne avant d’arriver à la présentation des Nuits dans l’équipe de Philippe Garbit, avant de disparaître des écrans radars au milieu des années 2010, montre dans cette émission exactement ce qui fait (volontairement) défaut à la chaîne aujourd’hui : maîtrise de son sujet, précision de ses questions. Ce qui a pour effet de mettre en valeur et les intervenants, et le sujet même de l’émission.
En plus des intervenants, quelques lectures (il y en a peu), quelques commentaires de la productrice sur Saint François. La structure de l’émission est toute simple : contexte historique, l’Église au XIIème siècle, le rôle de Saint François, sa philosophie, le personnage de Saint François dans la littérature (Dante), la peinture (Giotto), le cinéma (Rossellini évidemment, mais aussi Pasolini, Fellini, et Renoir), et enfin la musique.
La dernière partie se termine par un entretien avec Olivier Messiaen, qui présente son opéra sur Saint François, qu’il mit huit ans à écrire, de 1974 à 1982 (création 1983). Saint François, en tant que sujet d’opéra, était pour Messiaen une évidence. Pourtant, il affirme avoir hésité entre plusieurs sujets avant de se lancer dans Saint François. Il précise par ailleurs les éléments de l’histoire du saint qu’il a supprimés dans son opéra, pour des raisons avant tout dramaturgiques.

Anthologie insolite - Le double (24/04/1964)
par Georges Neveux
réalisation Arlette Dave

Georges Neveux présente plusieurs textes fantastiques qui proposent des variations autour du thème du double. Les textes sont parfois très courts, parfois juste de courtes citations. Quelques textes plus longs, que le producteur a découpés, résumant les parties qui ne sont pas jouées par les acteurs. Les lectures sont toutes réussies, et l’ensemble ressemble à un long travelling balayant le thème tel qu’il fut exploité au XIXème siècle.
L’émission est centrée autour de quatre histoires :
« L’ombre » de Hans Christian Andersen, avec Bernadette Lange
« William Wilson » d’Edgar Allan Poe, avec Jean Mercure
« Le double » de Fédor Dostoïevski, avec Michel Bouquet
« La sœur Custode » de Charles Nodier, avec Catherine Le Couey

Une précision. Ces deux émissions ont été sélectionnées par l'équipe des Nuits période Philippe Garbit. La nouvelle équipe navigue maintenant à fond dans l'ultra maigre ligne éditoriale des programmes de jour : outre les icônes vénérées dans la journée, on retrouvera en abondance sociologie, politique, et bien sûr psychanalyse.
De quoi faire oublier que France Culture fut bien plus que tout cela.

L'image qui orne les programmes du mois d'octobre :

                                                                                Le programme de nuit, îlot de culture (II) - Page 43 Oper1477

Ce n’est plus un îlot de culture, mais un banc de sable.

Philaunet 

Philaunet
Admin

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Bonjour Monsieur Gogol (1952) - Dim 25 Sep 2022, 22:01

Curly(https://regardfc.1fr1.net/t852p420-le-programme-de-nuit-ilot-de-culture-ii#38193) a écrit:Les deux émissions suivantes retracent la vie et l’œuvre du Douanier Rousseau et de Nicolas Gogol.
(...)
Ces émissions sont marquées par le temps, et c'est tout à fait normal, mais formellement, elle sont toujours aussi novatrices, parce que soixante dix ans plus tard la radio a, au lieu de continuer à innover, choisit de régresser.
En une heure trois quarts environ, l'auditeur a un aperçu consistant d'une œuvre, d'un artiste. Les acteurs sont excellents, le montage, qui mêle les différents éléments cités plus haut, donne une grande densité à l'ensemble.
(...)
A chaque fois, l'artiste prend la voix d'un acteur : Pierre Larquey pour Rousseau, et Alain Cuny pour Gogol.
(...)
Un plaisir d'écoute sans réserve que cette création théâtrale radiophonique d'une heure quarante-cinq mêlant biographie, oeuvres et témoignages (la partie "interprétation des œuvres" est la plus étendue et hautement savoureuse). Et elle date de 70 ans ? La comparaison avec la médiocrité et la vulgarité que produit France Culture aujourd'hui avec tous les moyens à sa disposition est terrible. Le pire étant la quasi disparition sur cette station à la fois de la création dramatique littéraire contemporaine de qualité et de la mise à disposition des œuvres produites entre 1950 et 2000, sauf exceptions, comme ici, en multi-rediffusion, la dernière datant du 23 septembre 2022.
Bonjour Monsieur Gogol (05/04/1952 Chaîne Nationale)
par Georges Charbonnier
réalisation Gérard Herzog
Alain Cuny : Nicolas Gogol
Extr. des « Âmes mortes » avec Jean Marchat, du « Revizor » avec Louis Seigner, François Chaumette, de « Ménage d'autrefois » avec Raymone, Pierre Larquey, de « La brouille des deux Ivan » avec Jean Temerson, Jacques Hilling, du « Journal d'un fou » avec Michel Vitold
avec aussi Ulrich Guttinguer, Jacques Dufilho, Arlette Thomas, Rita Reciot, Albert Gercourt, Hubert Prelier, Pierre Olivier, Nelly Benedetti, Lily Siou, Pierre Reynal, Yves Penaud, André Lorière, Denise Bonal, Jacqueline Harpet, Jeanne Lion, Juliette Jérôme, Gilberte Géniat,
et la participation de Véra Volmane

Marguerite Moreno et Charles Dullin dans l'adaptation par Pierre Brive des « Âmes mortes », extrait du feuilleton radiophonique réalisé par Maurice Cazeneuve en mai/juin 1947

Extr. du film « Tarass Boulba » de Alexis Granowsky avec Jean-Pierre Aumont et Harry Baur (1936)

Témoignages de Elsa Triolet, André Barsacq, Marc Chagall, Jean Maquet, Henri Troyat

Chants ukrainiens par Grigori Shoumara [?]
Prise de son : Jean Jusforg
Assistante de réalisation : Nicole Geissweiller

(...)

Curly 

Curly

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Dis-moi ce que tu rêves ? (1975) - Sœurs, combien encore vivantes ? (ACR, 1974) - Relation véridique de la conquête du Pérou par François Pizarre (1984) - Jeu 13 Oct 2022, 19:09

Depuis la rentrée 2022, les Nuits de France Culture passent à la vitesse supérieure pour être synchrones avec les programmes obsessionnels du jour. Obsessionnels parce qu’au bout de la trois millième émission sur les injustices sociales, les crises et catastrophes de toutes sortes, on peut sans crainte user de cet adjectif riche en savoirzéconnaissances.

Les voix jeunes et obsédées par les mêmes sujets imposent silence à l’art de manière générale, y compris, et surtout, radiophonique, pour balancer de l’Histoire, de l’économie, de la sociologie, de la psychanalyse à n’en plus finir.

Alors certaines d’entre elles sont sauvées du naufrage parce qu’elle sont des résidus de la période Philippe Garbit qui tournent encore un peu. D'autres émissions d’avant l’an 2000 reprennent les obsessions des émissions du jour, mais avec plus de moyens, plus de talent, plus de professionnalisme. Elles avaient leur place dans une grille nettement plus diversifiée qu’actuellement.

Trois exemples :
Les samedis de France Culture - Dis-moi ce que tu rêves ? (19/04/1975)
par Germaine Rouvre
avec Jean-Bertrand Pontalis et Michel Jouvet
avec les voix de Alain Cuny, Serge Merlin, Jean Leuvrais, Jacques Alric, Daniel Emilfork, Jean Topart, Jean Bollery, Jean-Loup Philippe et Maurice Bourbon
réalisation Jean-Pierre Colas

Rien d’original, mais c’est toujours mieux que les bavardages en direct et bafouillant sans réel contenu que l’on a dans la grille de jour. Beaucoup de lectures de textes par des voix connues (Serge Merlin est difficilement supportable), et les explications d'un biologiste et d’un psychanalyste. Intéressant car le biologiste remet en question les explications du psychanalyste.
Par exemple, lorsque ce dernier trouve une explication à l’absence de visages reconnaissables dans les rêves, le biologiste explique que c’est dû à ce que durant le rêve les deux hémisphères de notre cerveau ne sont pas connectés.
Quant au trop plein de symboles sexuels (Germaine Rouvre nous lit des rêves on ne peut plus explicites), ils sont mis en avant, mais Pontalis expédie d’une pichenette le fait que bien sûr il n’y a pas que le sexe.
Malgré la qualité de certaines lectures, l’émission devient monotone : trop de lectures qui se suivent et qui semblent s’empiler pour s’empiler.

Atelier de Création Radiophonique - Sœurs, combien encore vivantes ? (15/10/1974)
par René Farabet et Pascale Werner, assistés de Anne-Marie Abou, Jean-Claude Duval, collaboration technique Danièle Bizien, Marcel Grenier
Lectures de Jacques Charby et Hermine Karagheuz.

Un ACR avec
- les mouvements féministes des années 70,
- les rapports homme/femme dans une famille d’ouvriers
- les relations garçons/filles dans les lycées
- les luttes des ouvrières (LIP...)
- les employées du Crédit Lyonnais.
Les Nuits ont découvert qu’ils avaient cette émission sur leur site, et l’ont rediffusée en octobre. L’émission est là depuis sa précédente diffusion en 2014, avec une présentation sobre et efficace de Marc Floriot et une page sur le site riche en absence d’informations.
La comparaison avec la grille de jour est cruelle, c’est une vraie émission de création radiophonique : bien construite, réalisée avec soin, qui donne l’occasion à l’auditeur d’exercer son esprit critique :
une mère abuse gratuitement de son autorité sur sa fille, ou, autre exemple, vers la fin, une ouvrière gréviste laisse échapper, dans ses paroles émues que les grévistes ont « réalisé ce que eux (= les universitaires) pensaient en quelque sorte ». Une autre forme de soumission… qui peut se discuter.
L’émission est émaillée de chants révolutionnaires italiens. Difficile de dire qu’elle ne prend pas partie, mais elle vole au-dessus des racoleurs « Pieds sur terre » qui cultivent avec des techniques de plus en plus grossières l’indignation de l’auditeur, et au-dessus des discussions de salons parisiens (les 3/4 des programmes de France Cu) entre des sociologues souvent militants, qui parlent à la place des personnes concernées directement et qui les classent en différentes catégories, tout cela pour conclure, comme des politiques en campagne, par des propositions qui à leur énoncé paraissent tout simples, mais qui tiennent rarement compte de la réalité, celle-ci ne s’accordant hélas que partiellement à leurs désidératas.

Terre des merveilles : Relation véridique de la conquête du Pérou par François Pizarre (1984)
par Marie-Hélène Fraïssé - Avec Jean-François Bouchard et Danièle Lavallée (1) et Nathan Wachtel (2, 3)
lectures Jean-Claude Durant et Jean Bollery
réalisation Annie Delers (1) Eliane Milhaud (2, 3)

1 - 12/06
2 - 19/06
3 - 26/06
Un petit peu de colonialisme pour finir. Il se trouve que ces trois émissions volent sans forcer au-dessus des mixtures de jour.
Les passages du journal écrit par le secrétaire de Francesco Pizarro (en v.o.), Francisco de Xeres, publié en en 1534 sont parfaitement lus, et les trois spécialistes qui interviennent reconstituent le voyage et les folies de ce conquistador qui ressemble à un héros de Joseph Conrad.
Un seul bémol, le même que dans les autres numéros de « Terre des merveilles » (cf « Le voyage à Tombouctou »), une musique synthétique typique des années 80, et qui a très mal vieilli.


A suivre, le 16 octobre, Mendès France (de la politique, pour changer), et le 23 octobre une nuit spéciale krachs boursiers. « Krachs boursiers : la crise du capital », une nuit préparée par un certain Mathias Le Gargasson, dont l'obsession de l’anticapitalisme et du colonialisme irrigue dorénavant le programme des nuits.
« Le krach boursier est un moment proprement catastrophique, forme d’apocalypse moderne...
(…)  cette Nuit (...) interroge les mécanismes à l’œuvre dans les crises boursières et financières depuis une centaine d’années »

Au programme, notamment, deux « Entendez-vous l’éco » presque à la file (leur première diffusion est encore disponible à l’écoute). Le pied.
Il faudrait peut-être que ce producteur modèle élargisse sa vision du monde (voir début de ce billet).
… A moins qu’il ne fasse qu’obéir à une direction qui semble imposer le labourage intensif de ces sujets.

Toutefois, une exception (pas si exceptionnelle, la série ayant été mise en ligne sur YouTube en 2021) à partir du 24 octobre,
Histoires fantastiques, une série en 10 parties d'Hélène Auffret, réalisée par Arlette Dave, avec pour commencer
1- Axolotl de Julio Cortazar ( 06/10/1975) avec René Farabet
2- Les Saules d’Algernon Blackwood (07/10/1975) avec Michel Ruhl et Jean Leuvrais
3- La foule de Ray Bradbury (08/10/1975) avec Philippe Moreau, Benoît Allemane, Marcel Charvey et Yves Bureau
4- L’araignée de Hans Heinz Ewers (09/10/1975) avec Roger Bret
5- La sève de l’arbre de Mildred Clingerman (10/10/1975) avec Ginette Pigeon, Michel Puterflam et Michele Patre

Le générique de « Terre des merveilles » commence par l'introduction d'une pièce du groupe Weather Report, « Gibraltar ».

                                                                                  

Philaunet 

Philaunet
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Claude Mettra et Michel Abgrall, auteurs de ''Selma Lagerlöf : Du bleu de la nuit au bleu des neiges'' - Sam 15 Oct 2022, 09:37

On se saurait trop recommander l'écoute de cette œuvre radiophonique de Claude Mettra et Michel Abgrall : Selma Lagerlöf : "Du bleu de la nuit au bleu des neiges..." Une vie, une œuvre 06/02/1986 (rediff. 3 février 2019).

Une biographie poétique composée de lectures de grande qualité et d'exégèses interpolées dans les contes  par Claude Mettra. Les commentaires interprétatifs de ce dernier ouvrent ces histoires sur des dimensions  et symboles souvent évoqués dans les années 1980, quand l'ethnologie (Lévy-Strauss et Malaurie, p. ex.) et la vogue de "la psychanalyse des contes de fées" (+ Jung) habitaient une bonne partie des intellectuels œuvrant sur la chaînes (1970-2000).

La première lecture, "Sigrid la superbe" : [son mp3="https://media.radiofrance-podcast.net/podcast09/13915-03.02.2019-ITEMA_21947424-5.mp3" debut="09:57" fin="16:38"]

L'exégèse de cette première partie de la lecture par Claude Mettra : l'opposition entre paganisme et christianisme, la notion d'amour et de pitié, le combat de la lumière et de l'ombre [son mp3="https://media.radiofrance-podcast.net/podcast09/13915-03.02.2019-ITEMA_21947424-5.mp3" debut="16:38" fin="17:53"]

Tiré du recueil Selma Lagerlöf - Les Liens invisibles, 1910 (1894) Livre électronique de Bibliothèque numérique romande (https://ebooks-bnr.com). Ce livre vous est proposé en téléchargement libre.

Le documentaire d'art et d'essai signé ici par Claude Mettra et Michel Abgrall fait partie de ces trésors produits à l'époque de Jean-Marie Borzeix, ex-rédacteur en chef des Nouvelles Littéraires et directeur de la station de 1984 à 1997.

L’univers de Selma Lagerlöf (1858-1940), romancière suédoise, première femme prix Nobel de littérature, est peuplé de sorcières, de génies mauvais de la forêt, d’elfes noirs mais aussi d’oiseaux rédempteurs, on y trouve une parfaite conjonction de l’ombre et de la lumière. Cet univers onirique, poétique se déploie dans ses contes, ses romans étranges, brûlants d'amour, et aussi bien sûr dans son magnifique récit du merveilleux voyage de Nils Holgersson.

Dans ce documentaire, Claude Mettra et Michel Abgrall, donnaient la parole à Florence Bouteiller, Laurence Jeanneret, André Almuro et Isabelle Attali, et laissai[en]t une large place à des lectures d'extraits des œuvres de Selma Lagerlöf.

Curly 

Curly

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Tex Avery (Mardis du cinéma, 1987) & Les artisans maçons (Chemins de la connaissance, 1982) - Dim 16 Oct 2022, 14:52

Mardis du cinéma - Tex Avery (14/07/1987)
par Simone Douek
avec Marcel Gotlib, Jean Douchet, Jean-Pierre Berthomé et Robert Benayoun
réalisation Josette Colin

En 1987, Tex Avery était régulièrement programmé à la télévision, et  le « Cinéma de minuit » de Patrick Brion au moment des fêtes de fin d’année le mettait toujours copieusement à l’honneur.
Depuis, Tex Avery a connu quelques revers. Pas sûr qu’aujourd’hui il soit si connu que cela. Plus de programmations, et censure de certains gags, qui relayaient des stéréotypes quelque peu racistes qui à l’époque passaient comme une lettre à la poste. En 1987, ça passait toujours. Au lieu de les signaler comme tels, la MGM a préféré les couper (l’édition DVD, et toutes les copies en circulation actuellement sont tronquées), puis, en raison du rythme trépidant de ces dessins animés, de leurs incohérences voulues et de leur violence extrême – mais factice – ils ont un peu disparu des écrans radars et télévisuels. Dans les années 90, une série télé fut créée, « Le monde fou de Tex Avery », un monde fou aseptisé, donc vidé de son essence.

Cette émission est un portrait qui n’oublie rien d’essentiel. Elle raconte globalement la carrière de Tex Avery, le style, les différents types de gags, et les deux périodes importantes, la Warner (1936-41) et, surtout, la MGM (1942-54), période durant laquelle, et ce n'est pas dit dans l'émission, les budgets alloués à l'animation vont progressivement diminuer, contraignant les animateurs à une sobriété qui va nuire à leur inspiration.
Jean-Pierre Berthomé nous explique que le personnage de Bugs Bunny est une création collective, ce qui est vrai, chaque animateur, Chuck Jones, Bob Clampett, Friz Freleng, Robert McKimson essentiellement, apportant au lapin sa touche personnelle. Mais c’est bien Tex Avery qui signe le tout premier cartoon, « A Wild Hare » (1940).
Marcel Gotlib raconte sa découverte au cinéma de ces dessins animés qui ont marqué ses bandes dessinées, de « Gai Luron » à la « Rubrique à brac ».
Robert Benayoun revient sur sa quête longue mais finalement fructueuse de Tex Avery, tandis que Jean Douchet, jamais à court de théories, propose celle de l’âge mental des grands comiques. S’il situe Buster Keaton à l’adolescence, il considère que l’humour de Tex Avery équivaut à celui d’un enfant de quatre ans.
Il est mentionné les différents articles de la revue « Positif » qui dans les années 50/60 revenaient sur ces dessins animés. Ne gonflons pas leur importance. Lorsque l’on feuillette certains numéros, si l’on met à part le feuilleton de Benayoun qui raconte les péripéties surmontées afin de rencontrer notre héros, nous avons dans l’ensemble de simples catalogues (les gags, les personnages, synopsis, relevés de dialogues…), et non des textes de réflexions et d’analyses.
Rien dans l’émission sur l’après-MGM. Tex Avery va travailler dans la publicité avant de finir dans les années 70 comme sous-fifre pour Hanna et Barbera. Sad ending, isn’t it ?
Simone Douek et Josette Colin font preuve d’imagination pour se mettre au niveau texaverien : voix accélérées, mélange des personnages et des intervenants. L’auditeur imagine bien Jean Douchet dans celui de Droopy.
Les extraits des bandes-sons montrent que même sans le visuel, un cartoon de Tex Avery est drôle.  
Il y eut d’ailleurs un CD édité en 1993, chez Milan bien sûr (éditeur spécialisé dans les musiques de films), qui reprenait sur certaines plages juste la musique de Scott Bradley, sans les dialogues ni les bruitages.  

Les chemins de la connaissance - Au pied du mur : Les artisans maçons :
-1 : Faire du beau, -2 : Un jeune maçon d'autrefois, -3 : Restaurer au village, -4 : Le coup de truelle sarde, -5 : Gâcher le plâtre (05 au 09/04/1982)
par Francesca Piolot
avec (1) Patrick Gay, (2) Pascal Montmarthe, (3) Christian Macron, (4) Paolino Marino et (5) Jean Alic Tuquat

Cinq émissions bout à bout, d’un peu plus d’un quart d’heure chacune. Cinq rencontres avec des ouvriers maçons, des artisans, qui racontent leurs méthodes de travail, l’évolution de leur métier.
En parallèle, Roland Ménard lit des extraits des « Mémoires de Léonard, ancien garçon maçon » (1895) de Martin Nadaud.
Les intervenants sont bien choisis (chacun apporte une touche différente, pas de redondance) : de l’artisan à l’ouvrier, en passant par l’immigré italien arrivé au début des années 60, le travail de construction et celui de la restauration…
Les entretiens sont bien menés, Francesca Piolot arrive à faire parler des personnes qui ne se confient pas naturellement au micro, même si, - il y a des limites -, l’ouvrier sarde refuse de chanter pour l’émission.
Une série qui s’intéresse à un corps de métier en tant que tel, non pas pour créer du sensationnalisme, ni pour construire un discours politique.

Curly 

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Histoire fantastique ? - Mer 19 Oct 2022, 17:57

Tout commença un beau jour de printemps, il y a déjà quelques années.
Ce matin-là, je me réveillai pourtant d'excellente humeur. Je ne sais pas pourquoi, sans doute en raison d'un rêve agréable dont le souvenir s'était effacé comme une trace de pneu recouverte par une pluie torrentielle. J'allumai la radio avec entrain. L'invité était un sociologue. Curieux. On en entendait peu, c'était nouveau. Alors oui, il bégayait un peu, criait dans le micro des injonctions et des conseils avisés, nous apprenait que si des choses ne tournaient pas rond, c'était qu'il fallait juste les remettre dans le sens de la rondeur, tout bêtement, que finalement si tout le monde faisait ce qu'il préconisait, nous vivrions dans le meilleur des mondes possibles. C'était bien. C'était beau.
Le lendemain, après un rêve peuplé d'axolotls qui me fixaient d'un regard vide, je me réveillai un peu moins frais que la veille. Pourtant, c'est toujours avec énergie que j'allumai la radio. Tiens, cette fois-ci il y en avait deux. Deux sociologues. Ils devaient s'être reproduits durant la nuit. Ils étaient tous deux d'accord pour refaire le monde, pour constater que d'après les statistiques fournies par des études toutes fraiches des choses n'allaient pas dans le monde et qu'il fallait juste faire ce qu'il fallait pour que tout allât au mieux.
Deux jours à la suite, des sociologues. Ce devait juste être une coïncidence. Pas de quoi paniquer.
La nuit suivante fut plus agitée, je rêvai que j'habitai loin de la foule agitée de la ville, sur une île bordée de saules, ce qui en soi n'était pas désagréable, sauf qu'une araignée en me piquant le petit doigt du pied gauche me réveilla d'un coup. Pas de quoi en faire un drame non plus. Je mis la radio.
Merde. Cette fois-ci ils étaient trois. Pas de chance. Ils bégayaient encore plus fort que la veille. Je coupai.
Ce n'était plus une coïncidence.
L'idée n'avait pas encore germée dans ma tête, mais elle était déjà tapie dans un coin de mon cerveau. Deux heures plus tard, pris d'un doute, je remis la radio. Il y en avait juste un. Un sociologue de la catastrophe. Oui, ça existait dorénavant.
Je décidai de partir une semaine en vacances dans le sud, et d'oublier ce que j'avais entendu dans le poste. Mon cœur battit à un rythme à nouveau plus régulier. Comme la sève de l'arbre, mon sang pouvait refaire ses tours tranquillement à l'intérieur de mon corps soulagé. Ah...
Des amis me trouvèrent plus calme. Les amis des amis aussi, c'est dire. Les gens que je croisais dans la rue se retournaient pour me dire que j'avais l'air apaisé. C'est dire si j'allais mieux.
Je rentrai chez moi. Sans penser à ce qui m'était arrivé auparavant, un matin, j'allumai la radio. Un réflexe.
Quatre. Quatre sociologues. Le présentateur, un sociologue lui aussi, passa bien deux minutes à les présenter. La folie me guettait à nouveau. Pris d'une frénésie irrésistible, je fis plein de tableaux à deux entrées :  les sociologues EHESS d'un côté, les Sciences Po de l'autre. Je commençais à les trier mais bien vite je confondais les deux. N'étaient-ils pas les deux faces d'une même pièce ? J'étais perdu. A toute heure, j'éteignais et rallumais la radio : des sociologues de la maison, des sociologues du livre, des sociologues de la cuisine, des sociologues de la danse, des sociologues de la glace à la pistache, des sociologues des ours en peluche... Je m'enfuis de chez moi, courus dans la rue comme un dément. Une limousine bleue – je me souviens du bleu parce que c'est la couleur du tee-shirt de Science Po que portait le sociologue du sommeil qui m'était apparu dans mon cauchemar de la veille – une limousine bleue me fonça dessus. Elle était conduite par un sociologue. Je me réfugiai dans une ruelle ténébreuse par laquelle le bolide ne put passer. J'étais sauvé. J'entrai dans une boutique. Le commerçant écoutait la radio.
Mon Dieu.
Des sociologues de la sociologie. Des EHESS de Sciences Po, des EHPo, des Sciences ESS, des EHPo, des sociologues des marsouins, des sociologues de la montagne, des sociologues de la politique, des politologues de la sociologie, qui bredouillaient, qui bafouillaient sans cesse, sans cesse brayant des injonctions sur tout. L'horreur. Je compris enfin. Ils étaient là, partout, ils envahissaient notre esprit, neurone par neurone, nous contaminant. A ce rythme, dans quelques mois nous serions tous sociologues.
Le commerçant m'expliqua qu'il était en réalité un sociologue de la sorcellerie, et qu'il fallait pour me guérir que je disparaisse une bonne fois pour toutes de cet univers socio-popo qui ne servait à rien, qui tournait en rond en se mordant la queue.
Oui, c'était la bonne solution, celle qui me permettrait enfin de caser le dixième titre de la série des "Histoires fantastiques" dans mon histoire sociologico-politique : l'escamotage.
Mais le commerçant ajouta que lui ne savait pas comment me faire disparaître. Eh oui... il était sociologue.

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''Chasse au fantôme à Odessa au son du jazz et de la musique klezmer'' - Jeu 27 Oct 2022, 10:33

On ne sait trop quel adjectif louangeur utiliser pour qualifier le 3e numéro de la série  « Ukraine, les silences de l'empire » diffusé en 2004 dans Surpris par la nuit et rediffusé en juin 2022 : Chasse au fantôme à Odessa au son du jazz et de la musique klezmer 15/04/2004.

Un mot vient à l'esprit : "sensible". Pierre Goëtschel, qui mène ce documentaire, l'est assurément, sensible. Et la réalisation ne l'est pas moins : montage, prise de son des paroles, des musiques, des ambiances, choix des traducteurs et traductrices, dont certains sont des génies.

La moitié de l'émission est consacrée, à partir de la 46e', à l'identité juive de la ville, et là on atteint des sommets de finesse et d'émotion. Pierre Goëtschel propose, en guise de narration, une forme de journal personnel, un monologue intérieur où il s'adresse à lui-même. Une poésie, dont il est presque inutile de préciser qu'elle a disparu de ondes depuis longtemps sur la radio dite culturelle.
Avec le fil conducteur de la musique traditionnelle et populaire, ce documentaire donne la parole à ceux qui ont vécu le passé glorieux de la ville d'Odessa en Ukraine et qui, en 2004, en sont encore la mémoire vivante. "Chasse au fantôme à Odessa", épisode 3 d'une série pour "Surpris par la Nuit".
Il peut paraitre surprenant qu’on parle de la gloire passée d’Odessa : cette ville portuaire, située au Sud de l’Ukraine sur les bords de la Mer Noire, ne jouit pas en France d’une réputation prestigieuse. Pourtant, Odessa fut l’un des lieux les plus foisonnants d’Ukraine, véritable ville cosmopolite où se mêlaient des dizaines de cultures et de populations différentes.

Avant leur exil massif vers l’Israël ou les Etats-Unis, il y avait par exemple plus de 40.000 juifs à Odessa qu’on appelait la capitale juive de l’Ukraine, et les rues étaient remplies aussi bien de jazz que de musique klezmer. On y croisait même d’improbables émigrés coréens, signe d’une ville complètement ouverte sur le monde. (...)
A partir du fil conducteur de la musique traditionnelle, ce documentaire donne la parole à ceux et celles qui vécurent ce passé glorieux et en sont la mémoire vivante. L’occasion de découvrir les jours de gloire d’une ville à l’histoire méconnue qui fut, pour un court moment, le centre névralgique d’une culture ouverte et cosmopolite tombée désormais dans l’oubli.
Avec Sacha Garatchouk , Irina Shikhovskaïa , Iouri Kouznetsov , Alexandre Teplich Issakovitch, , Alexandre Rozenbaum et Mary et Dimitri Goutakov.
• Par Pierre Goëtschel
• Réalisation : Jean-Philippe Navarre
Volets 1, 2 et 4.

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Le livre de chevet (1966-67) - Histoires fantastiques (1975) - Fernand Crommelynck (1981) - Sam 29 Oct 2022, 12:11

Le livre de chevet par Jean-Vincent Bréchignac
réalisation Janine Antoine, sauf Maldoror par Jacques Devin
Jean-Vincent Bréchignac, qui fut en 1947 le tout premier directeur de Paris-Inter (future France Inter), proposait à ses invités de lire, ou de faire lire, un livre qui leur était particulièrement cher. Cette émission était diffusée sur France Culture entre 1965 et 1968 à 23h40.
Comme l’explique Tania Balachova dans sa présentation, il ne vaut mieux pas choisir un ouvrage de longue haleine impossible à fragmenter en portions de dix minutes, durée de chaque émission.
Dans les séries suivantes, les invités ont justement choisi des ouvrages qui se prêtaient bien à ce découpage.
Certaines séries ne sont pas proposées en intégralité, ce qui explique l’absence du court entretien avec Dominique Rolin, qui avait lu dans les émissions précédentes des extraits du Journal de Franz Kafka.
Nous rencontrons dans cette émission deux types de lectures.
D’abord la lecture par un acteur, et en ce cas nous pourrons parler plutôt d’interprétation, c’est le cas des

Chants de Maldoror de Lautréamont (1966) livre choisi par Philippe Soupault, interprétation Jean Négroni
Parties 1 & 2 (06 & 07-06)
Parties 3, 4 & 5 (08 au 10-06)
Parties 6 & 7 (14 & 15-06)
Parties 8 & 9 (16 & 17-06)
Philippe Soupault présente le texte. Il a eu la bonne idée de laisser la place ensuite à Jean Négroni, qui lit quelques passages bien choisis, sans doute par Soupault. Le choix de cet acteur est pertinent, tant sa voix, proche de celle d’un François Chaumette, en plus granuleuse, s’associe naturellement à ce texte diabolique.
Les extraits se promènent de manière désordonnée dans l’ensemble du poème, sans que cela soit gênant pour l’auditeur.

Autre type de lecture, celle de l’écrivain. C’est le cas des
Mille et Une Nuits (1967), version d'Antoine Galland
avec Michel Butor
Parties 1 à 6 (10 au 17-04)
Parties 7 à 10 (18 au 21-04)
Cette série combine entretiens et lectures, ces dernières ayant ben sûr la part belle. Michel Butor a découpé sa série en deux : parties 1-7 la lecture du début des Mille et Une Nuits, avec le récit-cadre et l’histoire des trois vieillards, et parties 8-10 la description du palais d’Aladin.
Michel Butor n’est peut-être pas comédien, mais il est un excellent lecteur. Les quelques explications qu’il donne en début d’émission sont parfois discutables, puisqu’il mélange la notion de traduction et d’adaptation. Antoine Galland, et Michel Butor le signale, a considérablement adapté le texte des Mille et une Nuits, et il est difficile en ce cas de parler de traduction. Aussi, il explique que l’ensemble contient bien mille et un conte, ce qui reste à vérifier car certains grands contes s’étalent sur plusieurs dizaines de nuits.
Par ailleurs, ses explications sont agréables à suivre. Il n’oublie pas, en ouverture de la septième partie, de rappeler, citations à l’appui, l’influence ce ces contes sur Proust et Joyce (pour ce dernier cf la très brève recension de « Un homme, une ville »).

Autre lecture par un écrivain,
Lettre au père de Franz Kafka (1966)
lue par Dominique Rolin
1- 14-03
2- 15-03
3- 16-03
4- 17-03
5- 18-03
Cette lettre, écrite en 1919, n’a été publiée qu’en 1952, soit donc qu’une dizaine d’années avant cette lecture par Dominique Rolin.
Pas de présentation, comme signalé plus haut. Il faut croire que ce texte n’a pas été choisi par hasard, car il convient bien à la voix de Dominique Rolin. Celle-ci la lit comme on lirait une lettre que l’on vient de décacheter, ce qui évite de se lancer dans une mauvaise interprétation du texte. Par la magie du montage, la lecture a été nettoyée de ses imperfections. Les coupes sont, si l'on y fait bien attention, sensiblement perceptibles.
Les généreux extraits balaient l’ensemble de la lettre.
Il existe d’autres versions radiophoniques de cette lettre, celle de 2020 n’est plus disponible à l’écoute et ce n’est pas plus mal.
Nous préférerons renvoyer vers André Dussollier, qui lui a les moyens de se lancer dans une lecture plus nuancée.
Lettre au père (21-04-1997), émission « Parole donnée », enregistrement public dans le Grand Auditorium de la BNF.
réalisation Marguerite Gateau

Deux autres séries :
Rikki-Tikki-Tavi de Rudyard Kipling (1966)
avec Tania Balachova
1- 17-10
2- 18-10
3- 20-10
Cette histoire extraite du « Livre de la Jungle » nous est contée en entier. Cependant, ces trois émissions étaient suivies à l’origine de six autres, dont le contenu n’est pas précisé dans l’INAthèque. Peut-être d’autres extraits du « Livre de la Jungle ». Mais comme Tania Balachova parle d’autres textes dans sa présentation, rien n’est certain.

Hors catégorie, et déjà signalé dans un précédent billet :
Ligéia d’Edgar Allan Poe (23 au 28-02-1966), livre choisi par Carzou.
interprétation Roger Blin
La série Blin/Carzou contient dix émissions. Voici celles consacrées à Ligéia. Par ailleurs, Roger Blin lisait dans les deux premières parties des textes de Baudelaire sur l’art, (Salon de 1846 essentiellement) et dans quatre autres parties des extraits de « Sylvie » de Gérard de Nerval.

Retour sur d’autres lectures avec
Histoires fantastiques, par Hélène Auffret et Arlette Dave
1- Axolotl de Julio Cortazar ( 06/10/1975) avec René Farabet
2- Les Saules d’Algernon Blackwood (07/10/1975) avec Michel Ruhl et Jean Leuvrais
3- La foule de Ray Bradbury (08/10/1975) avec Philippe Moreau, Benoît Allemane, Marcel Charvey et Yves Bureau
4- L’araignée de Hans Heinz Ewers (09/10/1975) avec Roger Bret
5- La sève de l’arbre de Mildred Clingerman (10/10/1975) avec Ginette Pigeon, Michel Puterflam et Michele Patre
6- Les amis des amis de Henry James (13-10-1975) avec Claude Winter, Michel Ruhl, Vera Feyder
7- La limousine bleue de Ann Bridge (14-10-1975) avec Catherine de Seynes, Ginette Pigeon, Michel Ruhl
8- Le sud de Jorge Luis Borges (15-10-1975) avec Sylvain Joubert, Robert Bazil
9- La ruelle ténébreuse de Jean Ray (16-10-1975) avec Jean Leuvrais, René Clermont, Robert Bazil
10- Escamotage de Richard Matheson (17-10-1975) avec Robert Rimbaud, Roger Bret, Véra Feyder

Les lectures sont encore différentes de celles du « Livre de chevet ». D’abord, même si les textes ne sont pas lus en intégralité, elles forment un tout homogène, et ensuite elles sont interprétées plus que lues, et enrichies de bruitages qui font que ces fictions sont en réalité plus proche de fictions radiophoniques que de simples lectures.
Les présentations d’Hélène Auffret sont riches, précises, bien que brèves. Elle revient sur la définition de Todorov en y apportant quelques modifications. Elle insiste sur la notion de brouillage de point de vue, caractéristique du récit fantastique.

Pour deux des récits, il existe une autre version, réalisée pour le « Théâtre de l’étrange », série ambitieuse qui alternait adaptations et textes originaux, interprétée par d’excellents acteurs, qui fut diffusée sur Inter Variétés entre 1965 et 1968, avant de passer entre la rentrée 68 et 1973 sur France Inter, puis à nouveau pour sa dernière année sur Inter Variétés. 1974 fut une année noire pour la fiction radiophonique, puisque fut arrêté l’essentiel des émissions de fictions diffusées sur les chaînes dites « généralistes » (fin de la chaîne Inter Variétés dans la foulée).

Les saules (09-04-1967)
réalisation Guy Delaunay, adaptation Monique Rousselet
avec Jacques Ciron, Pierre Ferval, Antonin Baryel, Marcelle Dornac, Denis Savignat, Robert Murzeau

La ruelle ténébreuse (13-11-1966)
réalisation Arlette Dave, adaptation Jacqueline Clancier
avec Michel Bouquet, R-J Chauffard, René Clermont, Marcel Bozzuffi, Roger Crouzet, Armand Meffre, Lucien Raimbourg, Maurice Travail, Gaétan Jor.
Les deux fictions de la série de 1975 sont brillantes, mais celles-ci bénéficient de plus de temps, et d’une réalisation plus riche.

Documentaire du vendredi - Hommage à Fernand Crommelynck (08-03-1981)
par Marie-Hélène Baconnet
avec Henri Ronse, Jeanine Moulin, Paul Delvaux, Henri Storck, et Albert Crommelynck
Documentaire sur un dramaturge quelque peu oublié et qui eut son heure de gloire. Jusque dans les années 80, France Culture produisit des adaptations radiophoniques de ses pièces.
Pour Jeanine Moulin, le théâtre de Crommelynck annonçe celui de Genet, ainsi que le théâtre de l’absurde.
Le documentaire part de la mise en scène récente par Henri Ronse des « Amants puérils ». Il alterne témoignages de personnalités l’ayant connu, des archives, et revient, et c’est la partie la plus intéressante car pour nous la plus lointaine, sur sa carrière d’acteur et de directeur de troupe au début du XXème siècle.
France Culture, en 1986, réalisa une version des « Contes de la grand-mère » (3 X 30mn), des pièces écrites pour les enfants.
Extrait de « Crommelynk et les metteurs en scène » par Jeanine Moulin (1987) :
« En 1916, avec l’aide d’un généreux « sponsor », le jeune homme (il avait à peine trente ans) fonda sa propre troupe à Bruxelles : le Théâtre Volant, ainsi nommé parce qu’il volait de salle en salle disponible (à la Gaité, à la salle Patria et au Palais des glaces). On y donnait des matinées poétiques, des séances chorégraphiques accompagnées de musique et des spectacles pour enfants : « Les Contes de la grand-mère. » Revêtu d’un habit du dix-huitième siècle, Crommelynck feignait d’y lire un livre à voix haute, tandis que les acteurs jouaient ce qu’ils entendaient. »

Les documents diffusés, qui remontent jusqu’à la fin des années 30, laissent entendre un Crommelynck à la voix quelque peu vieillie. mais capable de débattre avec énergie.



Dernière édition par Curly le Sam 29 Oct 2022, 22:13, édité 2 fois

Philaunet 

Philaunet
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Fernand Crommelynck (1886-1970), dramaturge - Sam 29 Oct 2022, 15:39

Curly(https://regardfc.1fr1.net/t852p420-le-programme-de-nuit-ilot-de-culture-ii#38301) a écrit: (...) Documentaire du vendredi - Hommage à Fernand Crommelynck (08-03-1981)
par Marie-Hélène Baconnet
avec Henri Ronse, Jeanine Moulin, Paul Delvaux, Henri Storck, et Albert Crommelynck
Documentaire sur un dramaturge quelque peu oublié et qui eut son heure de gloire. Jusque dans les années 80, France Culture produisit des adaptations radiophoniques de ses pièces.
Pour Jeanine Moulin, le théâtre de Crommelynck annonçe celui de Genet, ainsi que le théâtre de l’absurde.
Le documentaire part de la mise en scène récente par Henri Ronse des « Amants puérils ». Il alterne témoignages de personnalités l’ayant connu, des archives, et revient, et c’est la partie la plus intéressante car pour nous la plus lointaine, sur sa carrière d’acteur et de directeur de troupe au début du XXème siècle.
France Culture, en 1986, réalisa une version des « Contes de la grand-mère » (3 X 30mn), des pièces écrites pour les enfants.
Extrait de « Crommelynk et les metteurs en scène » par Jeanine Moulin (1987) :
« En 1916, avec l’aide d’un généreux « sponsor », le jeune homme (il avait à peine trente ans) fonda sa propre troupe à Bruxelles : le Théâtre Volant, ainsi nommé parce qu’il volait de salle en salle disponible (à la Gaité, à la salle Patria et au Palais des glaces). On y donnait des matinées poétiques, des séances chorégraphiques accompagnées de musique et des spectacles pour enfants : « Les Contes de la grand-mère. » Revêtu d’un habit du dix-huitième siècle, Crommelynck feignait d’y lire un livre à voix haute, tandis que les acteurs jouaient ce qu’ils entendaient. »

Les documents diffusés, qui remontent jusqu’à la fin des années 30, laissent entendre un Crommelynck à la voix quelque peu vieillie. mais capable de débattre avec énergie.
Marie-Hélène Baconnet : un nom qui est resté comme un des repères de la qualité radiophonique à France Culture dans les années 1980-90. Exemple dans un numéro de La matinée des autres "Musique et possession" 25/03/1980 (rediffusé dans les Nuits en 1999).

Extraits entre 1h et 1h20 (sur 1h30).

Les auteurs de nationalité belge ; les langues française et flamande ; le mouvement symboliste ; Georges Rodenbach, Maurice Maeterlinck, Charles Van Lerberghe, Émile Verhaeren : [son mp3="https://media.radiofrance-podcast.net/podcast09/13915-15.09.2017-ITEMA_21435475-3.mp3" debut="70:25" fin="73:11"]

"La scène la plus célèbre du 'cocu magnifique'" ; reproche de la crudité de langage ; un public formé ; un public de l'intelligence ; un théâtre à deux dimensions ; un théâtre qui passionne les gens intelligents ; un théâtre moral ; une morale à consonance chrétienne ; un théâtre politique [son mp3="https://media.radiofrance-podcast.net/podcast09/13915-15.09.2017-ITEMA_21435475-3.mp3" debut="75:10" fin="80:29"]

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