Dans Le Temps de ce 13 août 2016, une courte mais mémorable interview de la chef d'orchestre Emmanuelle Haïm sous le titre Emmanuelle Haïm, quel était le livre de vos quinze ans?.
Extrait : Après le festival d’Aix-en-Provence, la chef d’orchestre baroque est attendue à Lucerne pour un concert avec l'Orchestre philharmonique de Vienne. Elle se souvient pour nous de ses lectures d’adolescente
Le Temps: Est-ce qu’un livre a marqué vos 15 ans?
Emmanuelle Haïm: Le Rouge et le Noir de Stendhal.
- Racontez-nous à quelle occasion vous l’avez lu?
- J’avais une hépatite qui m’a épuisée pendant des mois et j’ai passé des semaines à l’hôpital. C’était très particulier comme lecture. J’étais si fatiguée que je lisais une ou deux pages et je m’endormais une ou deux heures. Puis je reprenais. J’ai mis tout le temps de la maladie à lire le Rouge et le Noir à toutes petites doses homéopathiques. Cela m’a donc pris très longtemps, malgré le fait que j’avais envie de le dévorer. J’étais prise par l’histoire et les personnages.
Pendant toutes ces semaines d’hôpital, Julien Sorel et Madame de Rênal m’ont accompagnée dans une sorte de brouillard nébuleux. Je pense aussi que ce livre m’a aidée à supporter et à traverser cette période de maladie, et peut-être à guérir plus vite, et mieux. J’en garde un très bon souvenir, très fort, et à la fois un peu dans les vapes.
- Pourquoi vous a-t-il marqué à ce point?
- Son grand romantisme m’a envoûtée. Le côté passionné des personnages et le tragique de l’histoire me fascinaient. A l’époque j’allais beaucoup au cinéma pour découvrir les grands classiques. C’était pareil pour la littérature. Mais plus tard je me suis orientée vers les auteurs d’Amérique du Sud, comme Alejo Carpentier ou Gabriel Garcia Marquez, notamment. Leur écriture et leur imaginaire foisonnants, beaucoup plus baroques, m’ont enchantée.
- Qu’est-ce que Le Rouge et le Noir a changé en vous à l’époque ?
- Il n’a pas particulièrement transformé ma vie. S’il y a un livre qui a changé quelque chose, ce serait plutôt Martin Eden de Jack London. Il y avait une telle force de volonté dans ce personnage qui désirait y arriver coûte que coûte, et qui décidait de punaiser tous les jours une dizaine de mots de vocabulaire! Je trouvais ça exemplaire. Cela représentait un genre d’idéal qui me parlait: j’aurais toujours aimé savoir plus de choses que je ne savais." (...)
À chaque fois qu'il est question de lectures de jeunesse, je ne ne peux m'empêcher de repenser à l'interview de Marie Richeux (aux manettes d'une quotidienne sur France Culture) qui répond aux Inrocks qu'elle n'a rien lu avant l'âge de 20 ans, qu'elle n'aime pas sa voix et refuse de s'écouter (pour quelqu'un dont le travail est de parler dans un micro...) et qu'enfin son univers culturel est celui des séries télévisées pour enfants (d'où ses peluches et sa marelle ?).
Emmanuelle Haîm, une sacrée grande dame qui montre la culture française à son meilleur niveau. Et Le Temps, un journal qui mérite l'attention pour ses articles de fond.
Extrait : Après le festival d’Aix-en-Provence, la chef d’orchestre baroque est attendue à Lucerne pour un concert avec l'Orchestre philharmonique de Vienne. Elle se souvient pour nous de ses lectures d’adolescente
Le Temps: Est-ce qu’un livre a marqué vos 15 ans?
Emmanuelle Haïm: Le Rouge et le Noir de Stendhal.
- Racontez-nous à quelle occasion vous l’avez lu?
- J’avais une hépatite qui m’a épuisée pendant des mois et j’ai passé des semaines à l’hôpital. C’était très particulier comme lecture. J’étais si fatiguée que je lisais une ou deux pages et je m’endormais une ou deux heures. Puis je reprenais. J’ai mis tout le temps de la maladie à lire le Rouge et le Noir à toutes petites doses homéopathiques. Cela m’a donc pris très longtemps, malgré le fait que j’avais envie de le dévorer. J’étais prise par l’histoire et les personnages.
Pendant toutes ces semaines d’hôpital, Julien Sorel et Madame de Rênal m’ont accompagnée dans une sorte de brouillard nébuleux. Je pense aussi que ce livre m’a aidée à supporter et à traverser cette période de maladie, et peut-être à guérir plus vite, et mieux. J’en garde un très bon souvenir, très fort, et à la fois un peu dans les vapes.
- Pourquoi vous a-t-il marqué à ce point?
- Son grand romantisme m’a envoûtée. Le côté passionné des personnages et le tragique de l’histoire me fascinaient. A l’époque j’allais beaucoup au cinéma pour découvrir les grands classiques. C’était pareil pour la littérature. Mais plus tard je me suis orientée vers les auteurs d’Amérique du Sud, comme Alejo Carpentier ou Gabriel Garcia Marquez, notamment. Leur écriture et leur imaginaire foisonnants, beaucoup plus baroques, m’ont enchantée.
- Qu’est-ce que Le Rouge et le Noir a changé en vous à l’époque ?
- Il n’a pas particulièrement transformé ma vie. S’il y a un livre qui a changé quelque chose, ce serait plutôt Martin Eden de Jack London. Il y avait une telle force de volonté dans ce personnage qui désirait y arriver coûte que coûte, et qui décidait de punaiser tous les jours une dizaine de mots de vocabulaire! Je trouvais ça exemplaire. Cela représentait un genre d’idéal qui me parlait: j’aurais toujours aimé savoir plus de choses que je ne savais." (...)
À chaque fois qu'il est question de lectures de jeunesse, je ne ne peux m'empêcher de repenser à l'interview de Marie Richeux (aux manettes d'une quotidienne sur France Culture) qui répond aux Inrocks qu'elle n'a rien lu avant l'âge de 20 ans, qu'elle n'aime pas sa voix et refuse de s'écouter (pour quelqu'un dont le travail est de parler dans un micro...) et qu'enfin son univers culturel est celui des séries télévisées pour enfants (d'où ses peluches et sa marelle ?).
Emmanuelle Haîm, une sacrée grande dame qui montre la culture française à son meilleur niveau. Et Le Temps, un journal qui mérite l'attention pour ses articles de fond.
Dernière édition par Philaunet le Sam 20 Jan 2018, 10:44, édité 5 fois