Après les remarques de Lola, d'Antonia & de Basil, j'ai à mon tour entrepris de faire route "Vers le Nord", en espérant que l'écoute pourrait me permettre d'illustrer le point de vue que j'avais développé
dans cet autre fil sur le documentaire en général. Chance, d'ailleurs, car ce doc je ne l'avais pas entendu lors de sa première diffusion. Entre temps j'ai eu écho d'une polémique mesurée qui aurait eu lieu chez Syntone, mais à ce moment je n'ai pas lu l'article critique : comme souvent j'ai remis la lecture à plus tard, non sans mauvaise conscience, et puis finalement je ne l'ai toujours pas lu. Mais je le ferai après avoir posté et ça me donnera peut-être la matière d'un complément. Quand même dire ceci : j'ai toutefois perçu au passage comme un écho de malaise entre la production et la critique. A mon avis ce hiatus est un très bon signe : ça veut dire que les œuvres ne tombent pas dans le vide critique, mais ça c'est un autre sujet.
En tous cas maintenant j'écoute "Vers le Nord", et après seulement quelques minutes d'émission on se rend compte que ce n'est pas un documentaire mais une création radio, plutôt fiction. Certes porteuse d'une certaine part de documentaire (mais à mi-parcours c'est encore bien léger), et à laquelle je ne vois guère de reproche à faire au plan de la qualité ni du soin apporté. Ce c'est pas étonnant : ce qui subsiste à France Culture, c'est le métier, et puis comme le truc a été primé maintenant 2 fois dont une chez
Phonurgia Nova, étant donné que c'est surement pas pour le texte ça doit être pour la forme, en effet impeccable. Bon je continue : plus haut Basil a relevé une faiblesse du côté de la vraisemblance ? Oui, moi aussi : un peu boiteuse dit-il ça c'est sévère mais enfin il est clair assez vite qu'on est là en face d'une œuvre hybride. S'il n'y avait la part de fiction, c'eût été un reportage, voisin du making-of. Nous avons donc un faux making-of. La transgression n'est pas très clairement annoncée en fin d'émission, sauf dans la désannonce de Jean. De mon point de vue l'auditeur n'est pas abusé à ce niveau-là : on ne lui a pas vendu un mensonge déguisé en vérité ; là où il est abusé, c'est qu'on persiste à lui fourguer autre chose que du documentaire dans une case qu'on dit dévolue au documentaire. mais je finirai là-dessus. En, tous cas, au plan créatif je n'y vois pas de faute : n'oublions pas que le même genre de transgression a donné naissance au free-cinéma, et qu'il y a une parenté entre ce cinéma marginal et les émissions de création radiophonique de FC. Donc encore une fois : rien de choquant pour moi.
Enfin rien de choquant, sauf qu'avec cette confusion, on ne sait plus trop où on en est : le sociologue qu'on entend est-il vraiment un sociologue ? Après tout, son propos est un peu convenu, mollement jargonnant. Alors : vrai / faux / vrai / faux ? N'importe quel adulte ayant un peu lu et même vaguement réfléchi à la question va nous sortir les mêmes trivialités. Comme tout le monde n'a pas le temps de réfléchir, là c'est cette voix qui s'en charge pour nous. Eh bien, c'est à ça que servent les œuvres, de l'esprit, n'est-ce pas ? Donc là encore, pas de reproche non ? Non, enfin sauf qu'on ne sait toujours pas si c'est un acteur ou pas qui est en train de nous causer. Moi je ne suis pas convaincu. Il faudra attendre la fin pour savoir; il y a eu brouillage. Un de plus ? On peut l'assumer hein, c'est pas un drame. Non, y a pas mort d'homme, mais brouillage, oui. Après tout on est dans le docu-fiction, donc on (I mean : l'auditeur) assume.
Par contre du côté de l'écriture, comme brièvement évoqué plus haut là franchement c'est pas très bon : les dialogues de la partie fiction sont tissés de banalités et de facilités, peut-être que c'est voulu d'ailleurs mais enfin on ne rend pas nécessairement le banal en écrivant banal, surtout quand on passe à ce point à côté du naturel. Je sais bien que la difficulté n'est pas neuve mais là les auteurs n'ont pas trouvé la solution du problème. Que ce soit dans l'écriture ou dans le choix, non, c'est pas terrible (au fait je ne sais absolument pas qui a fait quoi ; peut-être plusieurs auteurs puisqu'il y a eu des noms mentionnés, dont un démenti, bref j'en sais pas plus donc je balance mes remarques à l'aveugle, je joue le jeu quoi, merci d'en tenir compte). En tous cas le jeu des comédiens n'en est pas facilité et avec cette inégale qualité qui réduit la vraisemblance, je trouve qu'ils s'en sortent plutôt bien, (sauf les scènes au téléphone portable là c'est le naufrage). Et à la fin le bouquet, la scie des scies, c'est la dramatisation finale de l'état de l'assistante, mais bon sang pour dénoncer des clichés il faut donc recourir à d'autres clichés ? Pitié, pitié... Enfin au fond c'est pas vraiment grave tout ça, car au passage on s'est quand même laissé prendre par l'ambiance et par le propos documentaire.