Le titre de ce fil est à prendre au second degré.
Depuis que des gens suffisamment instruits ont compris la chose, je veux dire la molle tendance à pleurnicher sur le passé, il est devenu impossible en France de critiquer le présent en se référant à un passé. Immédiatement fuse la remarque "ah oui hein, c'était mieux avant...". Assortie d'un air entendu légèrement narquois, ou d'un ricanement léger, ou d'un air lassé à la Thierry Pech, mais dans tous les cas c'est avec un air de supériorité qu'on vous renvoie à votre étable.
J'aurais beaucoup à dire sur ce trick qui emprunte parfois à l'affrontement théorique ou idéologique, et parfois aux jeux transactionnels tel qu'Eric Berne les avait théorisés : il avait donné cette appellation générique à des jeux de société un peu minables qui ont pour terrain et plateau de jeu l'ordinaire espace de la conversation. Jeux de domination, de dévalorisation de l'autre ; jeux pour passer le temps ; jeux pour tenir sa place dans l'échange quand bien même on n'a rien à y apporter ; jeux pour éviter l'entente et l'intimité quand on sait d'avance et inconsciemment qu'on ne pourra pas les assumer.
Je crée ce sujet parce que ça fait 15 ans qu'on nous objecte cette réponse stérile : "ah oui (hin hin hin) vous croyez que ça allait mieux avant ? (hin hin hin)". J'aurais pu intituler ce fil "France Culture avant et maintenant" ou "Radio comparée", ou encore "Le niveau baisse / Ah bon vous croyez ?". Mais parce qu'il est centré sur un biais de conversation je préfère précisément ce titre-là. Dans la suite de la discussion, je donnerai des exemples précis, puisés dans le cadre de la controverse France Culture.
Cela dit, les forumeurs intéressés pourront transférer les mécanismes du jeu sur nombre de polémiques : l'éducation nationale, l'état de la langue, l'économie ou la politique du pays de leur choix. Dans tous ces domaines, il leur est interdit de seulement comparer le passé et le présent : une police d'esprits forts se chargera de les traiter de nostalgiques. Ricaneurs à qui on a parfois envie de distribuer des baffes.
Histoire de conclure ce billet initial par une fioriture, en l'occurrence une mise en abîme, disons que ce jeu agaçant n'a pas toujours existé. Hé hé, ça voudrait dire qu'on vivait mieux avant ? Euh non pas : aux temps où ce doux mépris n'était pas encore de mode, les flics de la pensée et les emmerdeurs du quotidien avaient déjà bien d'autres outils pour asticoter autrui (outils qu'ils ont toujours, d'ailleurs).
Depuis que des gens suffisamment instruits ont compris la chose, je veux dire la molle tendance à pleurnicher sur le passé, il est devenu impossible en France de critiquer le présent en se référant à un passé. Immédiatement fuse la remarque "ah oui hein, c'était mieux avant...". Assortie d'un air entendu légèrement narquois, ou d'un ricanement léger, ou d'un air lassé à la Thierry Pech, mais dans tous les cas c'est avec un air de supériorité qu'on vous renvoie à votre étable.
J'aurais beaucoup à dire sur ce trick qui emprunte parfois à l'affrontement théorique ou idéologique, et parfois aux jeux transactionnels tel qu'Eric Berne les avait théorisés : il avait donné cette appellation générique à des jeux de société un peu minables qui ont pour terrain et plateau de jeu l'ordinaire espace de la conversation. Jeux de domination, de dévalorisation de l'autre ; jeux pour passer le temps ; jeux pour tenir sa place dans l'échange quand bien même on n'a rien à y apporter ; jeux pour éviter l'entente et l'intimité quand on sait d'avance et inconsciemment qu'on ne pourra pas les assumer.
Je crée ce sujet parce que ça fait 15 ans qu'on nous objecte cette réponse stérile : "ah oui (hin hin hin) vous croyez que ça allait mieux avant ? (hin hin hin)". J'aurais pu intituler ce fil "France Culture avant et maintenant" ou "Radio comparée", ou encore "Le niveau baisse / Ah bon vous croyez ?". Mais parce qu'il est centré sur un biais de conversation je préfère précisément ce titre-là. Dans la suite de la discussion, je donnerai des exemples précis, puisés dans le cadre de la controverse France Culture.
Cela dit, les forumeurs intéressés pourront transférer les mécanismes du jeu sur nombre de polémiques : l'éducation nationale, l'état de la langue, l'économie ou la politique du pays de leur choix. Dans tous ces domaines, il leur est interdit de seulement comparer le passé et le présent : une police d'esprits forts se chargera de les traiter de nostalgiques. Ricaneurs à qui on a parfois envie de distribuer des baffes.
Histoire de conclure ce billet initial par une fioriture, en l'occurrence une mise en abîme, disons que ce jeu agaçant n'a pas toujours existé. Hé hé, ça voudrait dire qu'on vivait mieux avant ? Euh non pas : aux temps où ce doux mépris n'était pas encore de mode, les flics de la pensée et les emmerdeurs du quotidien avaient déjà bien d'autres outils pour asticoter autrui (outils qu'ils ont toujours, d'ailleurs).
Dernière édition par Nessie le Jeu 10 Juil 2014, 22:26, édité 1 fois