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Ce qui m'a surpris ce jour-là, c'était d'entendre Jorion répondre à côté de la question et donc finalement, de la dégager en touche : à Slama qui demande si c'est bien responsable, que de préconiser un effondrement des banques, Jorion répond par les 3 arguments de logique / efficacité / droit. On remarque en passant que l'idée ou la valeur d'efficacité, pourtant fréquemment bannie de l'idéologie éconophobe, retrouve ses droits quand elle est mise au service de la révolution. C'est d'ailleurs parfaitement logique, car ce qui est absurde, c'est de nier que l'efficacité soit une valeur universelle. Mais c'est là une autre question. Il s'agit donc, dans cet extrait, d'efficacité révolutionnaire :
Jorion le dit explicitement qu'il est en faveur de la révolution. Mais laquelle, et comment ? Eh bien en mettant les banques k.o. Voici le dialogue :
- pensez-vous l'idée de mettre en faillite les banques ce soit vraiment responsable que de la présenter comme un moyen de résoudre les problèmes de notre société ?
- si on veut faire s'écrouler le système bancaire, oui, c'est tout-à-fait logique et rationnel (
suivi d'un mini-tunnel de généralités pour accaparer le temps de parole - puis il répète sa réponse - c'est donc déjà la même méthode de martelage)
- enfin il ajoute que chacun a le droit de dire ce qu'il pense, notamment un footballeur a le droit de provoquer un effondrement économique.
Il y a de quoi s'interroger, alors je me suis interrogé : le footballeur dont l'intelligence n'est pas douteuse, mais apparemment privé des connaissances sociales d'un étudiant moyen ou peut-être même d'un bachelier, a-t-il conscience du chaos et de la violence qui résulteront d'un blocage -réel celui-là et non figuré comme celui qu'évoque Jorion dans la suite de sa réponse- du système économique ? Je pense que Cantona ne mesure pas la portée de ses paroles. Mais si Jorion le juge aussi légitime et celle-ci aussi juste, alors il est permis de s'interroger sur l'intellectuel : instruit des systèmes de parenté en Afrique et des entreprises de pêcherie de la côte bretonne, quelle est sa réelle connaissance du métabolisme économique ? Ou bien quelle image s'en fait-il ? Dans son petit développement, il vise plutôt les spéculateurs. Donc les banques sont assimilées à des instances de spéculation et c'est tout ? Mais c'est quand même léger, que de résumer l'organe bancaire à un simple spéculateur-accapareur !
A ceux qui gobent un tel tour de passe-passe, on pourrait tenter d'ouvrir les yeux en usant d'une analogie, non pas une image-choc comme celles que Jorion utilise pour faire peur, mais une simple image pédagogique : la diabolisation des banques et le souhait de les mettre k.o. c'est un peu comme si le cerveau disait "le coeur est un accapareur car il utilise l'énergie du corps et le sang de l'organisme pour assurer sa propre survie et nous dominer tous - le coeur est donc un tyran qu'il faut arrêter - débranchons-le !! ".
Résumons : Jorion est interrogé sur la responsabilité, car le blocage de l'économie entrainerait des troubles graves, des violences, et à défaut d'une révolution par la violence politique directe d'un soulèvement, du moins un chaos et un climat de violence induit. Il répond sur la logique, l'efficacité, et le droit. Puis il continue à préconiser l'arrêt du système économique, sans avoir répondu sur les effets désastreux pour tous qu'entrainerait un tel arrêt.
J'avais trouvé ce moment ahurissant. J'aurais peut-être été moins surpris si j'avais eu encore en mémoire le dialogue entre Jorion et J-C Casanova dans la Rumeur du monde un an plus tôt : émission du 19 décembre 2009. Celle-la n'est plus disponible sur le site de FC, mais elle dort dans mes archives. Je la proposerai d'ici peu au chargement pour que chacun puisse se faire son idée.
Dans l'immédiat, pour écouter les deux parties du 7 décembre 2010 avec Paul Jorion :
http://www.mediafire.com/download.php?jp1tuuucjab5306Et si les lecteurs de ce fil ont des préférences quant aux émissions à proposer en priorité, eh bien la liste que je propose dans le post n°2 de ce fil est là pour ça : tous sont invités à se prononcer pour pouvoir réécouter l'une ou l'autre.