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Radio mémoire    Page 3 sur 3

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Pièces radiophoniques -12- Théâtre populaire juin 44 - Mer 19 Avr 2023, 09:24

2022/23 : le feuilleton, ainsi que les résidus de fictions produites par France Culture sont devenus les 3/4 du temps (un peu plus même, mais je ne vais pas faire le calcul exact), des lectures d'extraits, souvent par des acteurs à la voix amorphe et sans aucune  personnalité. La présence de temps en temps d'un acteur comme Hervé Pierre (La gloire de mon père & Le chateau de ma mère) fait exception à la règle.
La mue est terminée, et merci le confinement, beau prétexte sur lequel la direction d'alors a sauté pour achever l'évolution entamée depuis plusieurs années déjà : produire environ 4/5 feuilletons par an, et balancer le reste du temps des rediffusions (de lectures !), les nouveautés étant... des lectures d'extraits souvent mal lus.

Les fictions suivantes, et précédentes, ne se soucient pas de rentrer dans une case d'une heure, ou deux : elles durent le temps que dure la pièce adaptée. Elles sont notamment interprétées par une partie des acteurs qui à l'époque travaillaient abondamment pour la radio, car jusqu'aux années 90, France Culture disposait d'une troupe bien rodée, d'un réservoir de voix radiophoniques qui a été atomisé, pour laisser place à quelques professionnels qui ressemblent souvent à des amateurs débutants.

Théâtre populaire juin 44
Toutes les émissions sont produites par Maurice Bertrand.

Douze hommes en colère de Reginald Rose (France Culture, 03-12-1970)
réalisation Henri Soubeyran
adaptation André Obey
bruitages Louis Amiel
assistant de production Bruno Flamant
collaboration technique Marcel Lebras
chef opérateur du son Robert Pirel
avec Marcel Bozzuffi, Gérard Darrieu, André Valmy, Jacques Jouanneau, Claude Vernier, Fulbert Janin, Roger Crouzet, Georges Atlas, Geo Wallery, Paul Bonifas, Georges Audoubert, Gérard Dournel

Édition de midi de Mihaïl Sebastian (France Culture, 04-06-1970)
adaptation Pierre Hechter
réalisation Henri Soubeyran
présentation Paul-Louis Mignon
bruitages Jean-Jacques Noël
chef opérateur du son Lucien Moncel
collaboration technique Claude Gautier
assistante de production Marie-Rose Derouet
avec Jacques Grello (le professeur Andronic), et Christian Alers, François Maistre, , Henri Poirier, Michel Creton, Andrée Tainsy, Laurence Weber, Maud Rayer, Jean Mauvais, Jean-Jacques Steen, Pierre Mirat, Robert Darame, Philippe Moreau, Bernard Valdeneige

Edmée de Pierre-Aristide Bréal (France Culture, 11-09-1969)
réalisation Évelyne Frémy
bruitages Louis Matabon
chef opérateur du son Robert Lavoignat
collaboration technique Raymond Anna
assistante de production Marie-Rose Derouet
avec Nadia Barentin (Edmée), Lucien Raimbourg (Léon), Jacques Jouanneau (Théodore), Berthe Bovy (tante Léontine), Jean-Jacques Steen (Philogène), Pierre Ferval (Pelure), Marcel Alba (le docteur), Fanny Marette (madame Philogène), Andrée Gire (la récitante)

Inès de Portugal de Alejandro Casona (France Culture, 18-04-1968)
réalisation Évelyne Frémy
adaptation André Camp
musique originale Jacques Degor
chef opérateur du son Daniel Toursière
collaboration technique Marcel Grenier
bruitages Jean-Jacques Noël
assistante de production Marie-Rose Derouet
avec Geneviève Casile (l'infante), Jean-Roger Caussimon (le roi), Clotilde Joano (Inès), Michel Ruhl (Pedro), Jacques Degor (le maréchal), Marcel Alba (Alvar Gonzales), Gaëtan Jor (Fragoso), Pierre Olivier (Coelho), Jean Péméja (Pacheco), Hélène Callot (Juan), Andrée Gire (Elvire), Fanny Marette (Léonore), Olga Nilza (Amaranta)


La guerre de Carlo Goldoni (France Culture, 05-11-1964)
réalisation Roger Dathys
adaptation Antoinette Riva
chef opérateur du son Francis Granal
collaboration technique Jean-Jacques Limal
bruitages Jo Valry
assistant de prodution Marc Darnaud
avec Roger Coggio (Don Faustino), Pierre Bertin (Don Polidoro), Denise Noël (Dona Florida), Gilbert Gil (Don Ferdinando), Jean Martinelli (Don Edigio), Armand Vallé-Valdy (un aide de camp), Jacques Mancier (Don Cyrillo), Marcel Alba (un caporal), Pierre Ferval & Jean Bourgogne (des soldats), Louis Raymond (Don Sigismondo), Jean Marconi (Don Fabio), Jean-François Calvé (le comte Claudio), Nathalie Nerval (Dona Aspasia), Olga Nilza (la récitante), Antoinette Riva (Orsolina), Fanny Marette (Lisetta)

La parisienne de Henry Becque (Programme Parisien, 10-10-1957)
réalisation Roger Dathys
bruitages Henri Saint Georges
prise de son René Cambien
collaboration technique Jean Pantaloni
assistante de production Odette Brianne
avec Madeleine Renaud (Clotilde), Henri Guisol (Du Mesnil), Jean Desailly (Laffont), Jacques Toja (Simpson), Fanny Marette (Adèle), Andrée Gire (la récitante)

La savetière prodigieuse de Federico Garcia Lorca (France Culture, 02-12-1965)
traduction Mathilde Pomès
réalisation Philippe Guinard
bruitages Joé Noël
collaboration technique Jean Laurence
chef opérateur du son Robert Borel
assistante de production Danièle Attoun
avec Rosy Varte (la savetière), Pascal Mazzotti ( le savetier), Claude Piéplu (le maire), et Marcel Alba, Linette Lemercier, Pierre Ferval, Fanny Marette, Olga Nilza, Armand Vallé-Valdy, Robert Vérany, Andrée Gire

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Pièces radiophoniques -13- Théâtre populaire juin 44 - Lun 24 Avr 2023, 12:03

Treizième et dernière partie, avec

Théâtre populaire juin 44
production Maurice Bertrand
diffusion France Culture

L'absence de Charles Vildrac (09-07-1970)
réalisation Henri Soubeyran
bruitages Louis Matabon
collaboration technique Nicole Clermont
chef opérateur du son Robert Pierel
assistante de production Françoise Deville
avec Danielle Volle (Marie Bruyère), Roger Hanin (Pierre Martinez), Bernadette Lange (Simone Vivain), Pascal Mazzotti (Henri de Courtray), Marcel Alba (monsieur Straebler), Michel de Ré (Albert Molinier), Fanny Marette, Andrée Tainsy (Angèle), Olga Nilza (Madame Straebler), Jean-Pierre Lituac (Galabert), Marcel Bozzuffi (Perillard)

Il existe une autre version, réalisée en 1950, sans doute rediffusée en 1952, puisque

                                                                                                              Radio mémoire - Page 3 Oper1756

L'autre danger de Maurice Donnay (12-03-1970)
réalisation Évelyne Frémy
chef opérateur du son Lucien Montcel
collaboration technique Jacqueline Rieu
assistante de production Marie-Rose Derouet
avec Sylvie Artel (Claire), Christian Riehl (Frédières), Maud Rayer (Madeleine), Jean Leuvrais (Étienne Jadin), Henri Poirier (M. Ernstein), Nadia Barentin (Mme Ernstein), et Pierre Ferval, Olga Nilza, Fanny Marette, Luc Ponette, Jacques Josselin, Robert Darame, Odile Poisson, Andrée Gire, Claude Barey

Agnès Bernauer de Friedrich Hebbel (11-01-1968)
adaptation Thierry Maulnier et Pierre Sabatier
réalisation Arlette Dave
bruitages Louis Amiel
prise de son René Cambien et Pierre Brault
assistante de production Catherine Bouvard
avec Danièle Ajoret (Agnès), Jacques Dumesnil (le duc Ernest), Michel Ruhl (le duc Albert), Jean-Roger Caussimon (le chancelier Preising), Henri Nassiet (Gaspard Bernauer), Georges Riquier (le maréchal de Pappenheim), Fanny Marette (la récitante), et Jean Brassat, Marcel Alba,  James Olivier, François Timmerman, Jean Bollery, , Pierre Ferval, Jean Mermet, Robert Verany, Marcel Lestan, Lucien Fregis

Le signe du feu de Diego Fabbri (06-07-1967)
adaptation Thierry Maulneir et Costa du Rels
réalisation Arlette Dave
prise de son Madeleine Sola assistée de Pierre Brault
avec Jean Négroni (Stéphane), Bachir Touré (Hudson), Jean-Roger Caussimon (Ignace de Loyola), Pierre Peloux (le supérieur), Alain Mottet (Farrell), Jacques Fayet (Alexis), Anne Doat (la jeune fille), Mony Dalmès (l'étrangère), Marcel Alba (le jeune homme), Pierre Ferval (le standardiste), Olga Nilza (la récitante), Jean Brassat (Pedro), Bernard Veyron (le voyageur), Jean-Paul Moulinot (Monseigneur), Robert Verany (le directeur)

Le tir Clara de Jean-Louis Roncoroni (12-02-1970)
réalisation Henri Soubeyran
présentation de la pièce par l'auteur
bruitages Louis Amiel
chef opérateur du son René Cambien
collaboration technique Francis Benimelli
assistante de production Colette Chemama
avec Rosy Varte (Clara), Marie Versini (Rosy), Sylvie Favre (Minouche), William Sabatier (Stéphane), Maurice Sarfati (Antonin), Bernard Murat (Victor), Olga Nilza (la récitante), Pierre Ferval (l'appariteur), Guy Bousquet (le jeune forain), Géo Wallery (le client)

Un goût de miel de Shelagh Delaney (08-10-1970)
adaptation Françoise Mallet-Joris et Gabriel Arout
réalisation Évelyne Frémy
avec Germaine Montero (Hélène), Anne Doat (Jo), Jean Leuvrais (Peter), Gérard Lartigau (Geoffrey), Daniel Kamwa (Jimmy)

Un homme qui n'est pas d'ici de Walter Jens (07-05-1964)
traduction et adaptation de Roger Richard
réalisation Roger Dathys
bruitages Géo Valry
chef opérateur du son Robert Lavoignat
collaboration technique Edouard Campras
assistante de production Claude Masset
avec Lucien Nat (le professeur Hartmann), Jean Leuvrais (Dietrich), Bernadette Lange (Irène), Maurice Chevit (l'aveugle), Paula Dehelly (La Rue), Nathalie Nerval (Brigitte Mathis), Olga Nilza (la crémière), Marcel Alba (le crémier), Pierre-Jacques Moncorbier (le grand-père Johann), Louis Raymond (le professeur Lauenfels), Tristan Sévère (le pilleur de ruines), Jacques Berger (le brigadier-chef de la police), Alain Durthal (le doyen de la faculté de droit), Délia Col (madame Milner), Armand Vallé-Valdy (Kraus), André Var (Heinz Werner), Jackie Catalayud (le petit Klaus, Fanny Marette (la guichetière de la gare), Andrée Gire (la jeune paysanne)

Un roi, deux dames et un valet de François Porché (03-02-1966)
d'après un récit inédit de Madame Simone (=Madame François Porché)
réalisation Philippe Guinard
bruitages Jean-Jacques Noël
collaboration technique Edouard Campras
chef opérateur du son Pierre Planès
assistante de production Danièle Attoun
avec Denise Gence (madame de Maintenon), Lise Delamare (madame de Montespan), René Clermont (Bontemps), et Patrice Galbeau, Fanny Marette, Andrée Gire, Marcel Alba, Armand Vallé-Valdy, Robert Verany, Pierre Ferval, Olga Nilza, André Bézu, Brigitte Morizot, Claire Nobis

Les pièces proposées dans cette série de billets proviennent, à quelques exceptions près, du précieux site Internet archive.

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''Mon bébé'' d'après Margaret Mayo, avec Jean Poiret & Michel Serrault (1956) - Sam 08 Juil 2023, 10:38

Mon bébé, de Maurice Hennequin, d’après « Baby Mine » de Margaret Mayo (07-04-1956, Programme National)
« Le théâtre où l’on s’amuse », production Philippe Soupault & Jean Chouquet, réalisation Jean Chouquet
prise de son Albert Laracine
Michel Serrault (Jimmy Scott), Jean Poiret (William Harrison), Jacqueline Porel (Kathy Harrison), Monique Delaroche (Maggy Scott), José Artur (Henri, le maître d’hôtel du Savoy), Solange Certain (Zoé), Geneviève Morel (Maud la blanchisseuse), Denise Grey (Miss Petinkton la directrice), Georges Carmier (John le valet & le policeman à la fin du 3ème acte)

Maurice Hennequin, auteur chevronné de vaudevilles (il co-signe « Le système Ribadier » avec Feydeau), adapte un succès du théâtre anglo-saxon, basé lui aussi sur les quiproquos et mensonges à foison. Le système est toujours le même : un grain de sable, un mensonge de rien du tout, provoque une accumulation d’autres mensonges, tous de plus en plus énormes, farfelus, avant que la vérité n’éclate vite fait bien fait car il faut conclure la pièce.
La pièce fut donc très vite adaptée au cinéma, en 1917, avec Madge Kennedy, puis en 1927 (réalisation Robert Z. Leonard, un spécialiste ès comédie).

Radio mémoire - Page 3 Oper1880Radio mémoire - Page 3 Oper1883

La version radiophonique précède de peu celle, télévisuelle celle-là, de Marcel Cravenne (2 juin 56) qui reprend le duo Poiret/Serrault, mais pas le reste de la distribution.

                                 Radio mémoire - Page 3 Oper1882

La version radio est une petite merveille. Jean Poiret & Michel Serrault sont déjà au sommet de leur art. La même année, ils sont choisis par Sacha Guitry pour incarner les deux principaux rôles de « Assassins et voleurs », un beau morceau d’humour noir, où ils font preuve d’un peu plus de retenue.
Dans « Mon bébé », les deux acteurs ne tiennent pas compte de l’absence de public. Ils foncent tête baissée, ils dégagent une telle énergie qu’ils emportent vite l’auditeur dans cette histoire invraisemblable.
Le point de départ est donc un mensonge dont on ne saura pas trop les tenants et aboutissants. Jimmy Scott (Serrault) a invité un midi la femme (J. Porel) de son meilleur ami (Poiret) au restaurant, et ceux-ci tiennent à garder ce moment secret afin d’éviter une scène de jalousie.
Pas de chance, ce meilleur ami apprend que sa femme a déjeuné avec un inconnu… Crise de jalousie et départ du foyer.
Pour qu’il revienne, sa femme a l’idée, au bout de quelques mois (huit, c’est important…) de faire croire qu’elle a accouché d’un bambin dont il n’est autre que le père.
Jimmy Scott (Serrault) s’emmêle un peu les pinceaux dans les adoptions, les bébés vont entrer et sortir (un bruiteur ne s'est même pas démené pour rendre leur présence palpable pour l'auditeur), s’accumuler dans le berceau. A l’arrivée, il y aura un beau triplet. Trois garçons. Dont une fille (Napoléon).

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Quand le jour meurt sur les canaux de Bruges, par Stéphane Pizella (1-5, 1967-68) - Mar 24 Oct 2023, 13:09

Il serait temps, maintenant que plus de cinquante années ont coulé depuis le passage de ces émissions, de séparer toute la nostalgie que peuvent éprouver des auditeurs d’un certain âge, et la réalité de ces émissions, leurs qualités intrinsèques, qui en font des œuvres du patrimoine radiophonique. C’est chose facile, car l’auteur de ces lignes est né au mitan des années 70.
Et il serait peut-être temps que ces émissions circulent vers d’autres sphères que celles des nostalgiques d’une époque passée puisque révolue.
Voici donc une brève présentation du début de

Quand le jour meurt sur les canaux de Bruges
par Stéphane Pizella
adaptation du roman de Georges Rodenbach, « Bruges-la-Morte »
46 émissions de la série « Les nuits du bout du monde » (Inter Variétés, 1967/1969), parties 1 à 5

Le terme « adaptation », ou l'expression « transcription radiophonique »  utilisée parfois au générique, sont à préciser. Stéphane Pizella (1909-1970) est capable de prendre n’importe quel ouvrage, si possible un ouvrage qui fait voyager à travers le monde (quand ce n'est pas le cas, il s'occupe d'y ajouter ce qu'il faut, ce que nous allons voir ici), afin de respecter la promesse donnée dans le titre de son émission, et de se l’approprier à tel point que si l’on met bout à bout l’ensemble de la série, qui reprend des textes très variés (Kessel, Dumas, des polars du Fleuve Noir, des contes recueillis par Philippe & Ré Soupault, Orson Welles et son Arkadin), l’impression qui domine est celle d’une grande unité de ton et d’inspiration.
Le roman d’une centaine de pages de Georges Rodenbach, dont Stéphane Pizella tire quarante-six émissions, sert de point de départ, et forme l’armature de l’ensemble, dans laquelle le conteur peut se perdre en ajoutant des parties plus personnelles.
Le récit s’étire, voire fait du surplace, jusqu'à épuisement de la matière narrative. Tant qu’il offre à l’auditeur matière à rêverie.

Il ne reste pas beaucoup d’émissions de Stéphane Pizella dans les archives. L’INA ne commence à les répertorier qu’en 1964, et à partir de là jusqu’en 1970, il semble que tout ait été gardé.
L’homme fut d’abord reporter pour la presse écrite dans les années 20/30 avant de passer à la radio.
En 1964, les émissions sont enregistrées, ce qui explique peut-être la raison de leur conservation. Avant, l’ingénieur du son René Cambien et S. Pizella jonglaient avec les disques et les récits en direct.

Pour définir l’art de Stéphane Pizella, ce sera simple : il est le maître-étalon du conteur radiophonique. Dès qu’il prononce les premières syllabes, et après ce long générique (« Sunset », extr de la suite « Grand Canyon » de Ferde Grofé + la voix de Claude Herval) qui met l’auditeur dans de bonnes conditions d’écoute, impossible de ne pas être immédiatement captivé, prêt à partir n’importe où, à être embarqué pour toutes les destinations.
La magie opère à partir de deux éléments très simples, mais encore faut-il avoir le talent pour les assembler comme il faut et les combiner avec art : une voix, et des disques.
Autant dire que le texte de l’émission seul ne vaut rien sans sa mise en voix, et bien sûr la musique.

Entre fin décembre 1967 et mars 1969, toutes les émissions de cette période ne furent pas consacrées à cette histoire. Il y eut, intercalées, d’autres histoires plus courtes, ou de nouvelles diffusions.
Le besoin au début de chaque émission de rappeler la précédente peut s’expliquer ainsi. Toutefois il y a autre chose : remettre les auditeurs dans l’ambiance de l’histoire (une semaine s’écoule entre chaque émission) et rendre aussi chaque partie autonome, afin d’accueillir tout auditeur qui arriverait en cours de route, ou qui aurait raté quelques émissions.

Dans le roman de Rodenbach, la ville de Bruges joue un rôle important. C’est trop étroit pour S. Pizella, qui va nous faire partir très vite à Paris, en Italie et en Espagne, pour placer des récits entièrement de son cru.
Le 19 décembre, avant d’attaquer la première partie du récit, l’émission titrée « Morte la ville » présente la nouvelle histoire et répond au courrier des auditeurs. L’histoire précédente « La dame pale de Fontenay aux Roses », d’après Dumas, n’a pas enthousiasmé les auditeurs, qui l’ont fait très vite savoir. Stéphane Pizella voulait s’essayer au genre de l’épouvante, oh sans aller très loin certes.
Il va donc revenir à des éléments plus familiers aux habitués : une histoire d’amour triste, donc beaucoup de mélancolie, et du dépaysement.

Pour toutes les émissions  : prise de son René Cambien (sauf indiqué), assistante Suzanne David (qui était la compagne de S. Pizella).
1- Quand le jour meurt sur les canaux de Bruges (26-12-1967)
collaboration technique Serge Elbod (?)
Dans cette première partie, reprise en cassette Radio France en 1996 sous le titre « Les carillons de Bruges », le récit superpose différents moments, pour les faire durer le plus longtemps possible : l’arrestation du pianiste Klaus Vanheim à Bruges, son dernier concert cinq ans plus tôt, dernier car correspondant à la mort de sa femme (la veille de Noël, pour coller sans doute, à peu près, à la date de diffusion), et, nouveau retour en arrière, sa rencontre avec la cantatrice Maria Palermo, dix ans plus tôt.  
L’intrigue policière est laissée pour l’instant en friche.
La musique est donc ici, pour employer des termes techniques, extra et intradiégétique : concert du pianiste (Chopin/Liszt essentiellement) et l’opéra italien (Verdi/Rossini/Puccini…).
Dans le roman, ce n'est pas une cantatrice mais une danseuse du nom de Jane Scott. Elle danse dans « Robert le Diable » de Meyerbeer. Pas de « Bohème » de Puccini. Le symbole n'est pas le même...
Aussi, Scott est la seconde femme de Vanheim, celle qu'il assassine, alors que Palermo est la première, jamais nommée dans le roman.
Pizella ne se soucie pas ce moment de l'intrigue criminelle, mais de l'intrigue amoureuse.

2- Maria Palermo (1) (02-01-1968)
Commence ici la grande soirée de la rencontre entre Vanheim et la cantatrice Maria Palermo.
Le coup de foudre dans le bureau de Reynaldo Hahn, qui situe le récit dans le temps, et surtout la soirée à l’opéra avec la représentation de  « La bohème ». La musique a double fonction, c’est la magie Pizella/ Cambien. Quelle que soit la musique utilisée, elle n’est jamais illustrative. Elle s’écoute certes en tant que telle, mais aussi, et surtout, en tant que narratrice. La musique joue un rôle comparable à celui du conteur. Elle fait naître la scène racontée par S. Pizella sous nos yeux. Durant son écoute prolongée (R. Cambien sait parfaitement combine de temps la faire durer) et après que la voix de S. Pizella se soit tue, l’auditeur imagine la scène que lui raconte alors cette musique.

3- Maria Palermo (2) (16-01-1968)
L’émission manquante, celle du 9 janvier, était une nouvelle diffusion d’une précédente histoire, « à la demande des auditeurs ».
Prise de son Robert Pirel
L’utilisation généreuse de « La bohème » oblige à certaines précisions dans le générique de fin, pour devancer sans doute la demande des auditeurs. La version diffusée est celle de la Tebaldi, et les références exactes de l’enregistrement sont données dans la foulée.
M. Palermo est interprétée par Nathalie Nerval, non mentionnée au générique. Elle le sera dans le suivant.
La soirée « La bohème », suite et fin. Toujours, la narration revient régulièrement au moment où Vanheim voyage en train vers Gênes, après la mort de la cantatrice. Le corps de la défunte l’accompagne, au sens propre comme au figuré.

4- Parlo con te – Je parle avec toi -  (23-01-1968)
collaboration technique Yann Paranthoën
Le récit fait durer la soirée dans le restaurant russe entamée dans la précédente partie.
La partie la plus audacieuse consiste en l’association de la musique tzigane avec le poème dit par Palermo. Le rythme de la poésie doit épouser celui de la musique tzigane. Toute la diction de Nathalie Nerval tend à faire correspondre texte et musique.
De plus en plus déconnecté du roman de Rodenbach, l'émission va rebondir sur une action vraiment infime. Nouveau souvenir du pianiste : le moment où à Paris il était venu voir la cantatrice pour lui amener son dernier enregistrement. Encore de la musique…
Et même, arrivé à Gênes, le piano qui trône dans le salon d’un hôtel va refaire à nouveau dialoguer voix et musique. De Gênes, le récit part dans d’autres souvenirs, et nous voici à Tolède.
C’est le prélude à

5- Dans un jardin de Tolède (30-01-1968)
collaboration technique Guy Lioret
Toute la première partie reprend généreusement toute la fin de l’émission précédente.
Une manière de mettre en condition l’auditeur pour découvrir la suite, une balade dans Tolède.
Stéphane Pizella place un texte qui n’a plus grand-chose à voir avec Rodenbach, mais dans lequel il a soin de placer ses deux personnages. Plus grand chose à voir car repris d'un numéro de « Concerto pour une ombre », une des précédentes moutures (milieu années 50) des « Nuits du bout de monde ».
Une remarque sur la musique : même employée sous la voix de S. Pizella, elle ne parasite en rien le récit. Elle en fait partie, sans compter que la voix du conteur capte suffisamment l’attention pour ne pas créer ce déséquilibre qui perturbe souvent l’écoute lorsque voix et musique se superposent.

N.B. : Les liens vers les 5 parties sont éphémères.

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Quand le jour meurt sur les canaux de Bruges, par Stéphane Pizella (6-14, 1968) - Sam 11 Nov 2023, 12:08

Quand le jour meurt sur les canaux de Bruges
par Stéphane Pizella
46 émissions de la série « Les nuits du bout du monde » (Inter Variétés, 1968), parties 6 à 14

6- La mort d’un torero (06-02-1968)
prise de son Robert Pirel
collaboration technique Roger Vronat (?)
Vanheim à Gênes reprend la lecture de son petit carnet de souvenirs. Stéphane Pizella devient Vanheim et les personnages du roman prétextes à des évocations.
Comme la partie précédente, il s’agit de la reprise d’un texte de « Concerto pour une ombre », écrit dans les années 50.
Une curiosité : pour varier les plaisirs, le trop célèbre Ave Maria est choisi dans une version pour harmonica.

7- Adios Manuelito (13-02-1968)
prise de son Pierre Braud
collaboration technique Nicolas Choulic (?)
La cérémonie d’enterrement du torero est reliée ensuite à Vanheim et sa femme, qui sont à nouveau quelque peu abandonnés pour une promenade dans les quartiers interlopes de Barcelone, puis une autre sur le Montserrat.
Les religieux ayant fait leurs études en France, les organistes sont élèves de Messiaen et Maréchal.
Stéphane Pizella interprète Vanheim, mais comme il reprend  là encore certainement un ancien texte, il s’exprime en son propre nom, et sort de temps en temps de son personnage lisant le petit carnet. Il s’adresse parfois directement aux auditeurs.
Les mêmes musiques reviennent comme des leitmotivs. Par exemple ici, la relation amoureuse Palermo/Vanheim attire irrésistiblement la Consolation n°3 de Liszt.

8- Le bal du Comte Jordan (20-02-1968)
prise de son Pierre Braud
collaboration technique Christian Pelodex (?)
Un bal masqué à Barcelone, chez le Comte Jordan Herrera de Obeire.
Suite du journal de Vanheim, et suite de textes vraisemblablement plus anciens greffés à l’histoire. Vanheim/Pizella est seul, puis rejoint en soirée, au bal, par Palermo.
Le voyage est justifié par une blessure au bras qui a stoppé momentanément la carrière de concertiste de Vanheim.
Le bal injecte encore plus d’exotisme début de siècle, alors que nous verrons par la suite que Pizella va transporter, pour les besoins de son histoire, son intrigue quelques décennies plus tard, sans aucun soucis de vraisemblance.
Le bal se termine par un spectacle avec négrillon et femme nue dans une danse orientale.
Le récit relie la soirée à l’histoire du torero Manuelito Rodriguez. La femme aperçue pleurant dans l’arène lors de l’accident fatal n’est autre que la danseuse.
Le clou de la soirée est bien sûr un grand numéro de Palermo dans Mme Butterfly que Pizella laisse infuser longuement.

9- Une cellule à Palma de Majorque (27-02-1968)
collaboration technique Pierrette Soula (?)
Dans cette cellule du monastère vint se réfugier Chopin.
Entre Butterffly repris au début, puis Chopin, le folklore hispanique, et enfin la musique de dancing, la musique de cette partie est variée.
Le narrateur est-il Pizella ou Vanheim ? C’est selon les moments, et d’ailleurs l’auditeur n’y prête pas trop attention.
Lorsqu’il raconte l’anecdote de l’écriture du prélude « Goutte d’eau », avec Chopin et Sand, il s’adresse à nouveau directement aux auditeurs.
Pizella reprend et rattache à son histoire un ancien texte, qu’il lut dans l’émission du 24-01-1967, soit un an auparavant. La version 1967 était-elle déjà une reprise ?

10- Dans Cordoue un soir (05-03-1968)
collaboration technique Marcel Grenier
La mention du roman de Rodenbach a disparu des génériques depuis un bon moment.
Le récit s’engouffre dans les grottes souterraines des Baléares avec ses ballades  sur les lacs, puis arrive à Cordoue, comme promis dans le titre.
Pizella utilise le carnet vert des souvenirs pour relier ses deux personnages à ces récits de voyages. L'atmosphère est toujours mélancolique : le deuil, le souvenir de celle qui n’est plus, le temps qui passe…
À Cordoue : la cathédrale, la mosquée, et, très important, les gitans. La description de ces derniers va faire partir avec lenteur le récit vers la jeunesse de M. Palermo, ses talents de diseuse de bonne aventure… et son pressentiment d’un grand malheur à venir.

11- J’entends le pas des chevaux (12-03-1968)
avec Évelyn Selena
collaboration technique Raymond Anna
La transition est en cours, Pizella a besoin de changer d’air.
Retour à Grenade, avec Évelyn Selena qui reprend le rôle tenu au début par Nathalie Nerval, sans accent cette fois-ci, ce qui est préférable.
Pizellla continue ses reprises d’anciens textes. Le conte oriental avec les Abencérages reprend une émission de janvier 1967.
La chanson de Matteo le Laoutar, qui revient de moins loin (partie 4), cette fois-ci lu par S. Pizella.
Matteo est le père de Maria, et nous voici partis dans le monde des tziganes et de leur musique, qu'affectionnait particulièrement Liszt.

12- Roulotte, feu de camp et Jaguar (19-03-1968)
avec Évelyn Selena, Jean Péméja et Jean Topart
collaboration technique Marcel Grenier
L’histoire évolue au coup par coup, et s’éloigne de plus en plus de son point de départ. Stéphane Pizella trouve que cette histoire de tzigane contient un certain potentiel, il nous y a préparé.
Il va l’exploiter, sans se soucier de ce qui fut raconté les semaines précédentes. Le carnet de souvenirs de Vanheim ? Plus clair du tout. D’ailleurs, il n’est plus mentionné dans le résumé.
Maria Palermo raconte son enfance, et apprend à Vanheim qu’elle est née en 1930, alors qu’au début nous avions appris que le couple s’était rencontré par l’entremise de Reynaldo Hahn. Aucune importance, c’est l’inspiration du moment qui commande, et l’envie de recadrer l’histoire à l’époque contemporaine de la diffusion.
Donc, nous voilà partis à Budapest chez les tziganes. Toujours beaucoup de musique, ici : violon et cymbalum.
Les personnages ont souvent soit à portée de main un pick-up avec un disque tout prêt à partir, soit une source de musique à proximité durant leurs flâneries.
Deux courtes apparitions :
Jean Péméja joue un homme qui va embaucher Matteo au cabaret le Jaguar, et Jean Topart un vieux vendeur de fleurs que Palermo rencontre dans la rue, alors qu’elle vient d’être chassée du cabaret le Jaguar.

13- Ils avaient le regret de la route (26-03-1968)
avec Évelyn Selena et Jacques Degor
prise de son Robert Pirel
collaboration technique Raymond Anna
Deux temps : enfance à Budapest, en 1939, Maria vendeuse de fleur et diseuse de bonne aventure au Jaguar / Grenade, où Maria raconte ses souvenirs.
É. Selena est mise en avant dans cette partie.
S. Pizella souhaite s’attarder dans le cabaret « Le Jaguar ». Accumulations de descriptions et d’impressions, le récit est vidé de toute tension dramatique.
Rencontre avec un des tziganes, Kostaki, interprété par Jacques Degor, questionné par S. Pizella, qui entre dans les souvenirs de Maria en tant qu’interprète de Matteo, le père de Maria, alors qu’ E. Selena de son côtés interprète brièvement le doyen des tziganes.

14- Vers la frontière (02-04-1968)
avec Évelyn Selena et Jacques Degor
prise de son Robert Pirel
collaboration artistique Pierre Braud
La caravane des tziganes part de Budapest. Un dernier tour au cabaret, où E. Séléna assure la totalité du récit. La raison du déplacement de l’intrigue au début de la guerre apparaît dorénavant clairement. La caravane se déplace vers le nord de l’Europe pour arriver, et là Stéphane Pizella revient de manière inattendue à son point de départ : la Belgique, où Palermo va être laissée par son père à des religieuses.
Le narrateur revient au milieu de l’épisode, pour faire transition, vers le carnet de souvenirs lu par Vanheim à Gênes.

N.B. : Les liens vers les 9 parties sont éphémères.

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Le petit Eyolf (1959) - Mer 03 Jan 2024, 10:37

Le petit Eyolf  (déjà répertorié dans  un précédent billet)
de Henrik Ibsen (France III Nationale, 08-10-1959)
dans la série « Le théâtre scandinave », production et réalisation Léon Ruth
traduction de Maurice Prozor
présentation Georges Lerminier
assistant de production Luc Godevet [?]
prise de son Jean Pantaloni
avec Raymond Gérôme (Alfred Allmers), Françoise Spira (Rita Allmers), Marcelle Tassencourt (Asta Allmers), Bernard Woringer (l’ingénieur Borgheim), Denise Gence (la femme aux rats), Michel Sausin (Eyolf), Robert Chandeau (celui qui voit = didascalies)

Admirable réalisation et présentation de l’une des dernières pièces d’Ibsen, qui eut un retour en grâce durant les années 2010 (7 mises en scènes différentes entre 2010 et 2018 selon Wiki).
L’une d’entre elles est disponible en vidéo sur YouTube, celle de Julie Berès, traduction d’Alice Zeniter (2015, Comédie de Caen).
Y jeter un œil, c’est se rendre compte que la modernisation, et la surcharge en symboles d’une pièce déjà chargée au départ ne font que rendre la pièce insupportable.
La version radio est infiniment supérieure. D’abord parce qu’un moyen efficace de faire passer cette surcharge de symboles et de pathos est de faire le moins d’effets possible. Le décor du dernier acte, le jardin de la villa des Allmers dominant toute la ville (opposition attendue riche / pauvre = haut / bas), ainsi que le récit d’Alfred rencontrant la mort, est plus facile à rendre en radio (l’imagination de l’auditeur peut tout) que sur une scène.
Le décor en question : « Coin de bois dans la propriété d'Allmers. Un petit ravin étroit, près de la grève. A gauche, de vieux arbres de haute futaie étendent leurs branches au-dessus du ravin. A droite, quelques arbres isolés, entre lesquels des éclaircies découvrent le fjord. Au fond, un courant d'eau descend la colline et se perd entre les pierres, sur la lisière du bois. Un sentier longe le courant. Au bord du fjord, on aperçoit le coin d'un hangar devant lequel est amarré un bateau. À l'ombre des vieux arbres, à gauche, une table, un banc et des chaises en minces troncs de bouleau. L'air est lourd, chargé de pluie et de brume. »
L’interprétation est parfaitement sobre, ce qui ne fait que renforcer la  tragédie.
Cela met d’autant plus en valeur le cri qui retentit au moment de la mort d’Eyolf.
La présentation de Georges Lerminier, au lieu de survendre la pièce, en détaille les défauts, réels (le mélo surchargé en symboles), mais aussi les qualités. Et parmi ses qualités, il y a celle de se prêter parfaitement à la radio. Théâtre psychologique, dans lequel, plutôt que la scène de la mort du petit Eyolf (l’évènement tragique a lieu au début, et non à la fin), peuvent se développer les longues scènes entre les personnages principaux : le mari, sa sœur et sa femme.
Quoi de mieux que la radio pour apprécier la subtilité des dialogues, et la complexité des relations entre ces trois personnages : sœur qui n’est pas vraiment sœur, sœur qui se confond avec le fils disparu, avec la femme aussi, ce qui trouble considérablement les liens qu’elles ont toutes deux avec cet homme.
Seule Denise Gence charge son interprétation, puisqu’elle joue un personnage qui pourrait sortir d’un conte de fée. « La dame aux rats » est une sorte de personnification de la mort, comme il y en aura une autre à la fin de la pièce dans le récit du mari.
L’interprétation est sans défaut : le trio Raymond Gérôme / Françoise Spira / Marcelle Tassencourt joue avec la retenue qui convient, sachant manier les silences avec science.
Ajoutons à cela les choix de réalisation de Léon Ruth, qui, rappelons-le, évite toujours les grands effets : bruitages minimalistes et absence de musique. Juste un discret coup de cloche pour marquer la fin d’une scène.

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Quand le jour meurt sur les canaux de Bruges, par Stéphane Pizella (15-17, 1968) - Lun 11 Mar 2024, 18:51

Quand le jour meurt sur les canaux de Bruges
par Stéphane Pizella
46 émissions de la série « Les nuits du bout du monde » (Inter Variétés, 1968), parties 15 à 17

Cf parties 1 & 2

15- Au béguinage de Bruges (09-04-1968)
avec Claude Herval, Évelyn Selena et Jacques Degor
prise de son Robert Pirel
collaboration technique Monique Germain
Claude Herval, qui assure le générique de l’émission, tient aussi le rôle de la sœur qui recueille Maria durant la guerre (voir partie précédente).
L’histoire se perd dans les souvenirs de ses personnages principaux, et les développements semblent infinis, jusqu’au moment où l’auteur décide d’y mettre fin.
Pour donner un peu de relief au récit, Vanheim ferme le cahier de souvenir pour rappeler un autre souvenir, celui d’une tournée qui l’amena à Bruges, et où il complète ce que lui raconta Maria avec sa visite au béguinage, celui qui recueillit Maria.
Présentation du lieu, et étymologie fort curieuse du nom de « béguinage » qui viendraient de l’association des initiales des trois sœurs qui l’ont fondé.
Cette partie fort mouvementée (superposition de plusieurs époques et plusieurs points de vue) se termine par le récit, par la voix de la sœur et de Maria, de la mort de Matteo le laoutar, qui était passé dans la résistance. La poésie à son sujet revient pour la troisième fois. Les précédentes fois : dans le cabaret à Budapest, où l’identité du personnage restait mystérieuse. La seconde : lorsqu’il est dévoilé que Matteo est le père de Maria.

16- Le grand rassemblement tzigane (16-04-1968)
avec Évelyn Selena, Jacques Degor, Marcel Bozzuffi
prise de son Robert Pirel
collaboration technique Yann Paranthoën
Suite du récit de Maria, qui reprend l’histoire au moment où les tziganes viennent la chercher au beguinage. Une respiration avant le grand rassemblement pour rappeler l’existence de Vanheim, qui reçoit ces confidences. Le récit de Maria est assuré alternativement par Evelyn Selena et Stéphane Pizella, sans que cela surprenne à aucun moment l’auditeur.
L'émission se termine avec la longue agonie du roi des tziganes, accompagnée de chants.
En sourdine, mais omniprésentes, les persécutions nazies envers le peuple tzigane…

17- Dans le golfe de Bosnie (23-04-1968)
avec Claude Herval, Évelyn Selena et Jacques Degor
collaboration technique Brigitte Véron
Le récit, comme à l’accoutumée, repart en arrière, car il faut bien préparer la tragédie qui va terminer la partie tzigane de l’histoire.
Lorsque S. Pizella a envie de changer d’air, il lui suffit de faire changer l’identité de son personnage principal, ici Maria, et de l’envoyer, grâce à un coup de théâtre vite préparé, mais efficace, à l’autre bout du monde.
C’est chose faite dans cette partie, qui fait durer, en reprenant la fin de la précédente, l’agonie du roi des tziganes, et le meurtre du nouveau roi par Gregorishka, frère de Maria, qui va ensuite se suicider.
Kostaki va sauver Maria de la vengeance des tziganes, qui doit s’abattre sur toute la famille du coupable.
Évelyn Selena, Maria et Stéphane Pizella, dans le rôle du narrateur qui fait souvent oublier qu’il interprète Vanheim, personnage laissé en friche depuis un moment.
Le récit de la fuite de Maria et de Kostaki jusqu’à Göteborg, à pieds, puis en bateau, offre son lot de nouvelles descriptions.
Retour à la fin à Bruges, dans le béguinage. Kostaki prend alors la voix de Jacques Degor, et la religieuse du béguinage celle de Claude Herval, voix du générique de l’émission.
La décision va être prise d’envoyer Maria, dans un couvent en Argentine, près de Buenos Aires.
Mais Stéphane Pizella va changer d’avis et préférer le Brésil à l’Argentine, peut-être parce qu’il avait un ancien texte sous le coude à recaser et fondre dans cette histoire.

À suivre...

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Quand le jour meurt sur les canaux de Bruges, par Stéphane Pizella (18-22, 1968) - Mer 13 Mar 2024, 17:56

Quand le jour meurt sur les canaux de Bruges
par Stéphane Pizella
46 émissions de la série « Les nuits du bout du monde » (Inter Variétés, 1968), parties 18 à 22

Suite du précedent billet

18- Rio de Janeiro (30-04-1968)
avec Évelyn Selena et Claude Herval
chef opérateur du son Robert Lavoignat
collaboration technique Marcel Grenier
Le résumé, fait par Maria, avec la voix de Claude Herval et non d’Évelyn Selena, efface la décision prise dans la partie précédente : non, ce ne sera pas Buenos Aires, mais Rio de Janeiro.
Claude Herval est, dans un même élan, la narratrice, Maria, et la bonne sœur, sans que cela choque l’auditeur. Stéphane Pizella est coutumier du fait. L’art du conteur consiste justement à tout faire accepter à celui qui écoute. La narratrice est rejointe par Stéphane Pizella, et le récit est assuré ensuite à deux voix.
Kostaki vient prendre Maria dans le cloître de Bruges. Tous les malheurs passés sont oubliés, c’est dans le bonheur que Maria change de continent, change d’identité, quitte tout le monde de son enfance.
Pour la partie musicale, les fils conducteurs sont une boîte à musique et une valse.
Le récit à ce moment éprouve le besoin de rappeler que depuis le début, Vanheim lit le journal de Maria. C’est donc par sa voix que le récit reprend.
L’arrivée à Rio, et de manière générale les deux parties qui vont suivre, mélangent culture espagnole et portugaise. Les chants choisis sont espagnols, or nous savons que Rio s’exprime en portugais.
La description de la ville est complétée par une musique de mariachis, comme si nous étions au Mexique. Évidemment, Maria débarque en plein carnaval, histoire de compléter la description.
Retournement de situation. Finalement, continuer l’histoire dans un couvent de bénédictines n’est pas si porteur. Maria ne va pas y aller, et rencontrer dans un bar un musicien qui va la faire embaucher « à Copacabana ». La voici à la guitare, quittant provisoirement le répertoire tzigane. Par miracle, très rapidement, Maria Eteradosi [?] monte un groupe de musique hongroise qui va remporter un succès phénoménal.
Quelle destinée..  marquée par les besoins et les envies de l’auteur, qui se doit de varier le plus possible les ambiances de son récit.

19- Ce sont eux les plus forts (07-05-1968)
avec Évelyn Selena
collaboration technique Joseph Régnault [?]
Malgré le changement d’atmosphère, le fil conducteur n’est pas perdu. La malédiction du peuple tzigane poursuit notre héroïne (Vanheim est laissé de côté), comme le rappelle le titre, et la conclusion de cette partie. Pourtant, il est possible de soupçonner Stéphane Pizella de réutiliser une partie d’un ancien texte, récit de l’ascension d’une musicienne dans une boîte de Copacabana et d’une romance entre Maria et un riche héritier, le comte Forzi. Après le mélange hispano-portugais, voici un nom italien pour désigner «une vieille famille brésilienne ». Un an s’est écoulé, pratique pour replacer ici le carnaval de Rio dans le passage obligé qu’est la promenade romantique dans la ville. À deux reprises, Maria devient Muriel, peut-être est-ce le résidu d’une ancienne version du texte, ou deux simples lapsus.
Pour accompagner le retour à la tragédie, la malédiction des tziganes qui va s’abattre sur celui qui aurait voulu épouser Maria, l’usage du concerto d’Aranjuez rappelle que finalement, Brésil, Espagne, Italie, tout se mélange un peu sans que cela prête à conséquence, le plus important étant la tension dramatique et la variété des choix musicaux.

20- Monsieur Reza-Finzi, attaché d’ambassade (14-05-1968)
collaboration technique Édouard Campras
La fuite de Maria dans la jungle suite à la tragédie qui clôturait la précédente prélude à un nouveau changement. La vedette de Copacabana va vite tomber dans l’oubli. La voix d’Évelyn Selena entendue au début n’est qu’une reprise de la partie précédente. Seul Stéphane Pizella assure la narration, ce sera le cas dans les émissions de la fin de saison 67/68.
Cette seconde romance va ressembler à la précédente, puisqu’interrompue aussi par cette malédiction des tziganes. Des membres  de la tribu la retrouvent à chacun de ses pas.
Revenons au début. Coup de chance, la fuite éperdue de Maria dans la jungle l’amène chez un notable, un attaché d’ambassade.
Pour la musique, du léger, du superficiel, présenté d’ailleurs comme tel, avec du Charlie Kuntz, que Maria se retrouve à jouer au piano dans la luxueuse villa de son nouveau protecteur au nom aussi peu brésilien que le précédent (la mère se nomme Farida Finzi).
Reza Finzi l’emmène finalement au cabaret de Copacabana, où Maria est maintenant bien oubliée, remplacée par un autre orchestre, du jazz pour varier un peu, mais du jazz allégé et mollasson, celui de l’orchestre de Glenn Gray.
Mais le sortilège s’abat donc encore une fois, la victime étant le charmant attaché d’ambassade.
Stéphane Pizella stoppe net son histoire pour un récapitulatif inattendu, comme pour boucler, provisoirement, son récit.

21- La main de la chance (25-06-1968)
chef opérateur du son Jean Pantaloni
collaboration technique Pierre Braud
La reprise plusieurs semaines plus tard, n’est pas des plus heureuses.
Stéphane Pizella reprend exactement l’histoire là où il l’avait laissée, avant, au bout de quelques minutes, de procéder à un résumé.
Ensuite, deux rebondissements improbables. Ce ne serait pas les premiers depuis le début. Il faut vraiment tout le talent Stéphane Pizella pour qu’on y croie, et suivant nos dispositions nous pouvons trouver cette bifurcation brutale de l’intrigue un peu gonflée, alors que paradoxalement elle était attendue depuis un moment déjà.
D’abord la rencontre inopinée d’un couple à l’aéroport, qui va fournir à Maria un billet pour New York, puis les débuts états-uniens de la nouvelle cantatrice, capable, lors d’une émission télé à la Guy Lux, de passer du répertoire tzigane au bel canto avec une maîtrise, sans répétition aucune, digne de la Callas ou de la Tebaldi.
La main de la chance, c’est peu de le dire. Stéphane Pizella n’y est pas allé de main morte.
C’est ici que notre héroïne, qui reprend le patronyme de son logeur à New York, devient la cantatrice Maria Palermo.

22- La main de la chance (02-07-1968)
chef opérateur du son Jean Pantaloni
collaboration technique Pierre Braud
Une émission très particulière, qui éclaire les conditions d’enregistrement de la précédente partie. Il nous est expliqué qu’elle fut enregistrée le 14 mai.
Durant un quart d’heure, l’histoire de la cantatrice est laissée à l’abandon, et Stéphane Pizella revient sur les semaines agitées durant lesquelles les programmes avaient été interrompus. Les évènements sociaux et politiques ne sont jamais évoqués directement. Il raconte l’ambiance dans la Maison de la Radio durant cette période, où il retrouva de nombreux amis qu’il avait perdus de vue, qu’il ne croisait plus dans cette immensité circulaire.
La chanson « Roule s’enroule » de Nana Mouskouri se met à évoquer, outre le passage du temps, l’architecture de la Maison de la Radio.
Puis, la suite de l’émission reprend in extenso les débuts de Maria Palermo aux États-Unis, laissant de côté l’emboîtement du récit dans celui du pianiste Vanheim. Des problèmes d’émetteurs avaient empêché de nombreux auditeurs de suivre la reprise de l’émission la semaine précédente. Parmi ces auditeurs, l’assistante de production Suzanne David, qui officiait alors dans « Les nuits du bout du monde » et « Les maîtres du mystère », cette dernière émission étant encore appelée ainsi malgré sa séparation en deux (« Mystère, mystère » et « L’heure du mystère »).

À suivre...

Curly 

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Quand le jour meurt sur les canaux de Bruges, par Stéphane Pizella (23-25, 1968) - Mer 20 Mar 2024, 19:07

Quand le jour meurt sur les canaux de Bruges
par Stéphane Pizella
46 émissions de la série « Les nuits du bout du monde » (Inter Variétés, 1968), parties 23 à 25

23- Le jour se levait sur Gênes (09-07-1968)
chef opérateur du son Jean Pantaloni
collaboration technique Cécile Brunner
Au lieu de continuer le récit de l’ascension extraordinaire de la cantatrice, le récit revient vers Klaus Vanheim. Peut-être est-ce lié à l’absence d’Évelyn Selena.
Cette fois-ci, Stéphane Pizella reste un narrateur à la troisième personne. Il n’est plus ni le pianiste, ni Maria. L’histoire revient quasiment à son début : Vanheim est à Gênes pour l’enterrement de Maria. Pour les amateurs de l’émission, cela nous renvoie plus de six mois en arrière. Or, pour les auditeurs qui auraient manqué le début, impossible de s’y perdre : le récit est resserré sur la situation rappelée plus haut, ni plus ni moins. Si le titre nous ramène en Italie, cette partie est pour l’essentiel une rêverie, une petit promenade à travers les États-Unis, d’abord à travers le regard de Vanheim, puis, à la fin, de Maria, revenue à New York auprès de la famille Palermo qui l’avait auparavant accueillie. Entre temps, le récit, avec de brefs va-et-vient passé/présent, Italie/États-Unis, traîne chez les tatoueurs chinois de San Francisco, au-dessus puis dans le Grand Canyon, dans les fêtes mormon de Salt Lake City.
Le récit traîne, et stagne même. Il faut dire que son auteur serait capable de continuer ainsi indéfiniment. Tant qu’exotisme et mélancolie sont du voyage...
S. Pizella n’a peut-être pas envie de se lancer dans la grande aventure avant l’interruption du programme pour cause de vacances.

24- Ce sont eux les plus forts (16-07-1968)
chef opérateur du son Jean Pantaloni
collaboration technique Bernard Galli [?]
Ce n’est pas une nouvelle diffusion de la partie 19. La présentation n’est pas de C. Herval, qui doit être partie en vacances.
Cette émission est présentée comme la fin de la série, alors qu’en octobre elle connaîtra de nouveaux rebondissements.
Toute la partie policière a été abandonnée, pour l’instant, et le vagabondage dans le passé de Maria Palermo ressemble fort à une rétrospective, partielle, des précédentes parties.
Retour à New-York, chez les Palermo, où Maria se souvient de son enfance, de Budapest, de Bruges… mais sans passer par toute la partie brésilienne de l’histoire.
Nous quittons Maria alors qu’à New York, un tzigane l’a repérée, encore une fois. Mais pas de nouvelle vengeance, le récit s'arrête avant. La cantatrice va refuser la proposition faite par un impresario. Un début de carrière foudroyant, avec formation accélérée et trois mois de tournée.
Comme il faut conclure, le récit revient à Gênes, avec Vanheim et l’enterrement de Maria. Sur le plan musical, le panorama est large, et reprend ce que nous avons déjà entendu, mais en version accélérée.

25- Réminiscences pour une histoire (01-10-1968)
chef opérateur du son Jean Pantaloni
collaboration technique Robert Altabert
Après une pause de deux mois et demi, S. Pizella annonce qu’il va continuer son histoire. Il commence par répondre aux auditeurs qui n’ont pas très bien compris l’évolution de l’histoire de Klaus Vanheim et Maria Palermo depuis mai 68 : entre arrêt prolongé, reprise ratée, et nouvel arrêt mi-juillet, avec, annoncée au générique, la fin de cette série.
S. Pizella se défend : la radio contient une grille d’été, qui va de juillet à octobre, et il n’est pas responsable de cet arrêt. Il finit par se présenter comme un « auteur qui écrit pour la radio », qui s’interroge constamment sur l’intérêt que peut prendre, ou non, les auditeurs.
Il ne se démonte pas, et rassure ses auditeurs en promettant une émission, certes diffusée à une heure plus tardive (22h15 au lieu de 21h35), mais qui va reprendre à l’identique, et, mieux encore, va en ce jour remettre les carillons de Bruges à l’heure.
Chose faite en un temps record. Si au début quelques échappées musicales se mêlent au résumé, qui reprend à l’émission de décembre 1967 avec l’arrestation de Vanheim devenu Hugues Viane, qui se superpose à un retour en arrière de quatre ans, ensuite la musique disparait lorsque l’histoire de Maria Palermo doit être résumée dans ses grandes lignes.
L’émission suivante pourra reprendre l'histoire là où elle avait été laissée en juillet, ou plutôt en mai, puisqu'elle patinait un peu depuis la reprise de juin/juillet.
Il est curieux que dans sa narration S. Pizella persiste et signe en situant Rio de Janeiro en Argentine.

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