A Philaunet qui écrivit à peu près ceci sur le fil de Maison d'études :
Je pense pour ma part que Kant anticipe ici, et c'est à son honneur, de nombreux développements et a plusieurs « héritiers » en cette idée de l’insociable sociabilité, signe au moins de sa fertilité, sinon de sa justesse. A commencer par la parabole bien connue des porcs-épics de Schopenhauer bien sûr, qui semble tout droit inspirée par ce passage.
Kant y donne aussi, surtout, un cas de mise en mouvement de la nature par la composition des actions de deux tendances antagonistes, mécanisme qui paraîtra tout-à-fait fondamental à Hegel.
Kant ayant été grand lecteur de la dynamique de Newton et l'un de ses grands épistémologues, il ne serait pas étonnant que ce genre d'image lui ait été suggéré par la formation d'un couple et d’un moment autour d'un axe quand deux forces égales et opposées s'appliquent à deux bras de cet axe.
Autre aspect, les éthologues dressent généralement le même portrait de l'homme que Kant quant à ses instincts sociaux : ni une fourmi parfaitement sociale, ni fauve, il est un animal qu'on nous présente comme grégaire, et c'est probablement cette situation médiane, comme le sont beaucoup de situation médianes, qui est source de complexité (au passage, ainsi me semble-t-il en aller de cette autre situation, par exemple, qui nous place à une échelle de taille très particulière dans la nature, à l’interface des domaines d’échelle où règnent d’un côté la gravitation, et de l’autre l'interaction électromagnétique, sans que l'une n'écrase vraiment l'autre, les deux jouant à plein et s'entremêlant dans la formation de l'environnement à notre échelle, tellement plus divers qu'un système stellaire ou qu'une molécule [oui, ce genre de considération est probablement très éthérée, mais c'est ici le conversatoire, et même dans l'un des avatar du troquet métaphysique, lieu bâti pour qu'on puisse y être aussi éthéré qu'on le veut...]).
Et dernier cousinage que je verrais à ce développement de Kant, c'est le Huis clos, de Sartre. Cet enfer que seraient les autres me semble tiré du même genre de constat.
Sur les implications sociales : pourquoi lui faire grief des conséquences malheureuses d'un trait qu'il croit déceler - à tort ou non - dans la nature humaine ? Je ne crois pas lire qu'il s'en félicite ni ne les souhaite, mais qu'il y voit la source, opposée aux tendances sociales de l'homme, d'une mise en branle qui n'est sans doute pas l'origine de toute l'évolution culturelle de l'homme, mais qui pourrait jouer un rôle pour une belle part.
@Alain : vous voyez qu’on n’a pas complètement sombré, ici. Il ne tient qu’aux participants du forum de ne pas faire de cette section un mouroir à hors-sujets au service des autres sections. Une explication à cette mauvaise santé relative du conversatoire, c’est aussi peut-être que, comme l’évoquait Disalvo, on hésite parfois sur ce forum à être aussi ouverts sur nos opinions relatives aux sujets autres que France Culture, que ne l’ont été Nessie et Henry Faÿ à propos d'Israël et des Palestiniens.
Je compte vous répondre sur les uchronies scientifiques et leurs effets imaginables sur les philosophes du passé, là encore Kant est un bon client à mon avis, mais il vaut mieux s’en remettre à un prochain message pour ça, en attendant les vôtres.
« Autodiscipline » : j’espère que vous n’entendez pas par là « autocensure » !
Peut-être que certaines explications m'aideront à comprendre ce que veut dire Kant dans la 4e proposition de "L'Idée d'une histoire universelle du point de vue cosmopolitique" citée plus haut par Alain Machefert et reprise par Masterkey dans son exemplaire contribution
Notamment ceci :
"(...) Sans ces propriétés, certes en elles-mêmes fort peu engageantes, de l’insociabilité, d’où naît l’opposition que chacun doit nécessairement rencontrer à ses prétentions égoïstes, tous les talents resteraient cachés en germes pour l’éternité, dans une vie de bergers d’Arcadie , dans une concorde, un contentement et un amour mutuel parfaits ;"
Un tableau horrible en effet...
"(...) Il faut donc remercier la nature pour leur incompatibilité d’humeur, pour leur vanité qui en fait des rivaux jaloux, pour leur désir insatiable de possession et même de domination !"
Qui est "la nature" ? Quelle est cette entité ? Qui doit remercier pour les conséquences inévitables du "désir insatiable de possession et même de domination !" chez les hommes ? (lesquels ?) Help Raph' !
"Sans cela, toutes les excellentes dispositions naturelles qui sont en l’humanité sommeilleraient éternellement sans se développer."
Je pense pour ma part que Kant anticipe ici, et c'est à son honneur, de nombreux développements et a plusieurs « héritiers » en cette idée de l’insociable sociabilité, signe au moins de sa fertilité, sinon de sa justesse. A commencer par la parabole bien connue des porcs-épics de Schopenhauer bien sûr, qui semble tout droit inspirée par ce passage.
Kant y donne aussi, surtout, un cas de mise en mouvement de la nature par la composition des actions de deux tendances antagonistes, mécanisme qui paraîtra tout-à-fait fondamental à Hegel.
Kant ayant été grand lecteur de la dynamique de Newton et l'un de ses grands épistémologues, il ne serait pas étonnant que ce genre d'image lui ait été suggéré par la formation d'un couple et d’un moment autour d'un axe quand deux forces égales et opposées s'appliquent à deux bras de cet axe.
Autre aspect, les éthologues dressent généralement le même portrait de l'homme que Kant quant à ses instincts sociaux : ni une fourmi parfaitement sociale, ni fauve, il est un animal qu'on nous présente comme grégaire, et c'est probablement cette situation médiane, comme le sont beaucoup de situation médianes, qui est source de complexité (au passage, ainsi me semble-t-il en aller de cette autre situation, par exemple, qui nous place à une échelle de taille très particulière dans la nature, à l’interface des domaines d’échelle où règnent d’un côté la gravitation, et de l’autre l'interaction électromagnétique, sans que l'une n'écrase vraiment l'autre, les deux jouant à plein et s'entremêlant dans la formation de l'environnement à notre échelle, tellement plus divers qu'un système stellaire ou qu'une molécule [oui, ce genre de considération est probablement très éthérée, mais c'est ici le conversatoire, et même dans l'un des avatar du troquet métaphysique, lieu bâti pour qu'on puisse y être aussi éthéré qu'on le veut...]).
Et dernier cousinage que je verrais à ce développement de Kant, c'est le Huis clos, de Sartre. Cet enfer que seraient les autres me semble tiré du même genre de constat.
Sur les implications sociales : pourquoi lui faire grief des conséquences malheureuses d'un trait qu'il croit déceler - à tort ou non - dans la nature humaine ? Je ne crois pas lire qu'il s'en félicite ni ne les souhaite, mais qu'il y voit la source, opposée aux tendances sociales de l'homme, d'une mise en branle qui n'est sans doute pas l'origine de toute l'évolution culturelle de l'homme, mais qui pourrait jouer un rôle pour une belle part.
@Alain : vous voyez qu’on n’a pas complètement sombré, ici. Il ne tient qu’aux participants du forum de ne pas faire de cette section un mouroir à hors-sujets au service des autres sections. Une explication à cette mauvaise santé relative du conversatoire, c’est aussi peut-être que, comme l’évoquait Disalvo, on hésite parfois sur ce forum à être aussi ouverts sur nos opinions relatives aux sujets autres que France Culture, que ne l’ont été Nessie et Henry Faÿ à propos d'Israël et des Palestiniens.
Je compte vous répondre sur les uchronies scientifiques et leurs effets imaginables sur les philosophes du passé, là encore Kant est un bon client à mon avis, mais il vaut mieux s’en remettre à un prochain message pour ça, en attendant les vôtres.
« Autodiscipline » : j’espère que vous n’entendez pas par là « autocensure » !
Dernière édition par masterkey le Ven 19 Fév 2016, 22:52, édité 7 fois